Protection internationale: critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande introduite par un ressortissant de pays tiers ou un apatride. Refonte

2008/0243(COD)

Dans sa communication sur la position du Conseil en première lecture sur l’adoption d’un règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale, la Commission indique qu’elle appuie pleinement le texte du compromis issu des négociations entre les deux co-législateurs, ce dernier apportant une valeur ajoutée aux normes actuelles en matière de traitement des demandeurs soumis à la procédure de Dublin. Il garantit le droit à l’information et l’accès à un recours effectif contre les décisions de transfert pour les demandeurs, et introduit des règles claires en matière de rétention et d’accès à l’aide judiciaire gratuite. Il crée en outre un environnement plus prévisible pour les relations entre les différents États membres et des conditions plus favorables de regroupement des personnes vulnérables, en particulier des mineurs non accompagnés, avec leur famille ou leurs proches.

Analyse des principales différences entre la position commune et la proposition modifiée de la Commission de 2011 :

Renforcement de l’efficacité du système : la position commune limite la possibilité d’introduire une requête justifiée par des motifs humanitaires à la période antérieure à la première décision sur le fond. La Commission comprend que ce changement vise à prévenir tout abus sous la forme de requêtes multiples lorsque la première décision sur le fond est négative. Les délais de dépôt des requêtes, de réponse aux demandes et d’exécution des transferts ont été réduits pour les personnes placées en rétention relevant spécifiquement de la procédure de Dublin.

Renforcement du niveau de protection offert aux demandeurs soumis à la procédure de Dublin :

- suspension des transferts/mécanisme d’alerte rapide : la position commune ne retient pas l’introduction du mécanisme proposé par la Commission initialement, par crainte qu’il ne devienne un facteur d’attraction de migrants irréguliers et que les États membres n’y voient un encouragement à ne pas respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit de l’Union. La position commune a remplacé les dispositions relatives à la suspension des transferts par l’instauration d’un mécanisme d’alerte rapide, de préparation et de gestion des crises qui vise principalement à détecter les causes profondes des problèmes pouvant engendrer des crises en matière d’asile et à s’y s’attaquer. La position commune renforce également les considérations relatives à la solidarité et à la protection des droits fondamentaux. De plus, elle garantit aux demandeurs le même niveau de protection que celui que prévoyait la proposition de suspension des transferts de la Commission ;

- droit de recours effectif contre les décisions de transfert : le règlement de Dublin en vigueur ne prévoit aucune disposition concernant un droit de recours effectif. La position commune prévoit un système reposant sur une des options suivantes:

  • un effet suspensif automatique (en cas d’introduction d’un recours, l’intéressé se voit toujours accorder le droit de rester sur le territoire en attendant l’issue de son recours);
  • un effet suspensif automatique d’une durée limitée (cette durée devant être suffisante pour permettre un examen rigoureux de la demande);
  • un effet suspensif sur demande (la suspension du transfert n’est pas appliquée automatiquement à tous les demandeurs ayant contesté une décision de transfert mais uniquement à ceux qui l’ont sollicitée ; par conséquent, le transfert est suspendu pendant la période durant laquelle la juridiction doit se prononcer).

De plus, une nouvelle disposition a été introduite : elle prévoit qu’un demandeur ne peut être transféré dans un État membre où existe un risque de violation des droits fondamentaux.

- rétention : il n’existe actuellement aucune disposition spécifique relative au placement en rétention de personnes soumises à la procédure de Dublin. La proposition de la Commission visait essentiellement à prévenir toute rétention arbitraire des personnes soumises à la procédure de Dublin. Pendant les négociations, il a été décidé, pour des raisons de cohérence juridique, de privilégier le regroupement de toutes les dispositions nécessaires relatives aux garanties applicables aux personnes placées en rétention et aux conditions de rétention dans un unique instrument en matière d’asile: la directive sur les conditions d’accueil. Seuls le motif et les conditions de rétention spécifiques à Dublin devaient être définis dans le règlement de Dublin.

La position commune reflète cette décision et prévoit:

  • qu’il soit fait référence à la directive sur les conditions d’accueil, dont les garanties et conditions de rétention s’appliquent aux personnes placées en rétention pendant la procédure de Dublin, et qu’il soit précisé qu’une personne soumise à la procédure de Dublin ne peut être placée en rétention que pour un motif lié à Dublin;
  • que soit introduit le principe selon lequel une personne ne peut être placée en rétention au seul motif qu’elle est soumise à la procédure de Dublin;
  • que soient établis des délais précis pour chaque étape de la procédure de Dublin, de façon à garantir qu’une personne ne puisse pas être placée en rétention pendant plus de 3 mois au total (sinon, la procédure de Dublin dans son intégralité peut durer jusqu’à 11 mois), à défaut de quoi la personne est libérée.

- mineurs et personnes à charge : la position commune restreint la notion de famille à la famille nucléaire, comme convenu dans la directive relative aux conditions requises, mais elle introduit des références aux membres de la famille élargie dans les articles pertinents. Elle accepte d’inclure les mineurs mariés dans la définition des mineurs non accompagnés. Elle introduit une définition du terme «proche» désignant l’oncle, la tante ou les grands-parents d’un mineur. Elle fait obligation aux États membres d’être proactifs et de rechercher la famille d’un mineur non accompagné. Elle permet le regroupement d’un mineur non accompagné marié avec sa famille et ses frères et sœurs, lorsque celui-ci n’est pas accompagné de son épouse.

Le critère relatif aux personnes à charge est exclu de la hiérarchie des critères et n’implique plus une obligation aussi stricte.

En ce qui concerne la situation d’un mineur non accompagné qui n’a ni famille ni proche sur le territoire de l’UE, la position commune prévoit que l’État membre responsable soit celui où le mineur a introduit une demande de protection internationale. Une déclaration est jointe à la proposition de règlement : elle prévoit que la Commission présentera une nouvelle proposition sur cette question dès que la Cour de justice de l’Union européenne aura rendu son arrêt à titre préjudiciel dans l’affaire C-648/11. Le Parlement européen et le Conseil exerceront alors tous deux leurs compétences législatives, en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant.

- droit à l’information et entretien individuel : la position commune rend l’entretien individuel obligatoire, à de rares exceptions près, et instaure l’obligation d’informer le demandeur non seulement des critères, mais aussi de leur hiérarchie, et notamment du fait que la demande peut être examinée par un État membre qui n’est pas l’État membre responsable en vertu de la hiérarchie des critères (clause de souveraineté), ainsi que du fait que la personne concernée a la possibilité de demander la suspension du transfert.

Actes délégués: la position commune prévoit que la Commission soit habilitée à adopter des actes délégués contenant des règles supplémentaires sur le regroupement des mineurs et des personnes à charge avec leur famille et leurs proches; un considérant souligne qu’il convient que la Commission procède à des consultations d’experts, notamment de l’ensemble des autorités nationales concernées. La possibilité d’adopter des règles supplémentaires sur le coût des transferts n’a pas été retenue, le Conseil considérant que les règles de l’acte de base sont suffisantes à cet égard.

En ce qui concerne les transferts, la position commune prévoit uniquement la possibilité d’adopter des règles d’exécution uniformes et non des règles supplémentaires.

Le délai accordé au Parlement et au Conseil pour exprimer une éventuelle objection à un acte délégué adopté par la Commission a été fixé à 4 mois, et peut être prolongé de 2 mois à l’initiative du Parlement européen ou du Conseil.

Quant au pouvoir d’adopter des actes d’exécution, la position commune introduit une limitation des pouvoirs de la Commission en prévoyant que celle-ci ne puisse adopter un acte lorsque le comité qui l’assiste n’émet aucun avis sur le projet d’acte.