En adoptant le rapport de Cecilia WIKSTRÖM (ADLE, SE), la commission des affaires juridiques recommande que le Parlement européen lève l'immunité parlementaire de Marine LE PEN (NI, FR).
Pour rappel, le procureur général près la Cour d'appel de Lyon a demandé la levée de l'immunité parlementaire de Marine Le Pen dans le cadre d'une action judiciaire relative à une infraction présumée d'incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence contre un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse.
Aux termes de l'article n° 9 du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'Union européenne, les membres du Parlement européen bénéficient, sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du parlement de leur pays. Cette immunité couvre donc les opinions exprimées par le député dans l'exercice de ses fonctions.
Selon la Cour de justice toutefois, "une déclaration effectuée par un député européen en dehors du Parlement européen ayant donné lieu à des poursuites pénales dans son État membre d'origine au titre du délit de dénonciation calomnieuse ne constitue une opinion exprimée dans l'exercice des fonctions parlementaires relevant de l'immunité prévue à cette disposition que lorsque cette déclaration correspond à une appréciation subjective qui présente un lien direct et évident avec l'exercice de telles fonctions". De même, la Cour a rappelé récemment la jurisprudence qu'elle a établie dans l'affaire Gollnisch, à savoir que l'opinion (au sens large du terme) d'un député ne peut être couverte par l'immunité établie sur le fondement du droit de l'Union que si elle été émise "dans l'exercice de [ses] fonctions", impliquant ainsi l'exigence d'un lien entre l'opinion exprimée et les fonctions parlementaires. Ce lien doit être direct et s'imposer avec évidence.
En l'espèce, les faits ne permettent pas de conclure à l'existence d'un tel lien direct et évident. L'affaire n'entre pas dans le champ des activités politiques de Marine Le Pen en sa qualité de députée au Parlement européen, mais relève d'activités d'un caractère purement national ou régional, étant donné que le discours au cours duquel certaines phrases ont été énoncées, a été prononcé à Lyon devant des électeurs lors de la campagne que Mme Le Pen a conduite en vue de la désignation du président du Front National et ne s'inscrivait pas dans son activité de députée au Parlement européen.
Par conséquent, les actes présumés n'ont pas de rapport direct ou évident avec l'exercice par Marine Le Pen de ses fonctions de députée au Parlement européen ni ne constituent une opinion émise dans le cadre de ses fonctions de députée au Parlement européen au sens de l'article 8 du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'Union européenne. L'accusation n'a pas de lien avec le mandat de député au Parlement européen qu'exerce Mme Le Pen et daprès les explications fournies au sein de la commission parlementaire, il n'y a pas de motif de suspecter un cas de fumus persecutionis.
Eu égard aux considérations qui précèdent, la commission des affaires juridiques recommande, après avoir examiné les arguments tant en faveur que contre la levée de l'immunité de la députée, que le Parlement européen doit lever l'immunité parlementaire de Marine LE PEN.