Le Parlement européen a adopté une résolution sur le rapport annuel 2011 sur la protection des intérêts financiers de l'Union - Lutte contre la fraude.
Observations générales : le Parlement souligne limportance de combattre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union, tant au niveau de la perception des ressources de l'Union qu'au niveau des dépenses.
La Commission est invitée à examiner le lien entre le signalement des fraudes par les États membres et l'absence d'un droit pénal harmonisé prévoyant une définition commune du comportement frauduleux et des infractions en matière de protection des intérêts financiers de l'Union.
Le Parlement rappelle que l'Union européenne et les États membres partagent la responsabilité de la protection des intérêts financiers de l'Union et de la lutte contre la fraude, et qu'une étroite coopération entre la Commission et les États membres est essentielle.
- Définitions des délits et critères dévaluation : les députés regrettent que le rapport de la Commission se limite aux données communiquées par les États membres et souligne que ces derniers utilisent diverses définitions pour la même catégorie de délits et que tous ne collectent pas de statistiques détaillées similaires selon des critères communs, ce qui empêche d'évaluer l'ampleur globale réelle des irrégularités et de la fraude dans les différents États membres. Le Parlement demande donc que des critères d'évaluation uniformes pour les irrégularités et les fraudes soient mis en place dans tous les États membres et assortis de sanctions appropriées pour les contrevenants.
- Irrégularités : les députés relèvent que, selon le rapport annuel de la Commission, 1.230 irrégularités ont été signalées comme frauduleuses en 2011 et que leur impact financier, d'un montant de 404 millions EUR, a baissé de 37% par rapport à 2010, la politique de cohésion et l'agriculture demeurant les deux grands secteurs où la fraude est la plus élevée. La Commission est invitée à garder un il attentif sur l'efficacité des systèmes de surveillance et de contrôle actuellement appliqués dans les États membres et à s'assurer que les informations communiquées sur le taux d'irrégularité dans chaque État membre reflètent la réalité.
- Administration en ligne : le Parlement souligne que l'Union européenne doit redoubler d'efforts pour renforcer les principes d'administration en ligne en vue d'assurer une plus grande transparence des finances publiques. Il attire l'attention sur le fait que les transactions électroniques, autres qu'en liquide, sont référencées ce qui rend la fraude plus difficile. Il encourage donc les États membres à abaisser leurs seuils relatifs à l'obligation de modalités de paiement autres qu'en liquide.
- Journalisme dinvestigation : les députés rappellent que le journalisme d'investigation a joué un rôle essentiel dans la dénonciation des fraudes et qu'il représente une source d'information qui devrait être prise en considération par l'OLAF, les organismes répressifs et les autres autorités compétentes des États membres.
- Déclarations nationales de gestion : dans sa résolution du 6 avril 2011 concernant rapport annuel 2009, le Parlement demandait la mise en place de déclarations nationales de gestion obligatoires dûment contrôlées par un cabinet national d'audit et consolidées par la Cour des comptes. Les députés regrettent que rien n'ait été fait dans ce sens.
- Recouvrement à la suite dirrégularités : la résolution reconnaît que le montant à recouvrer à la suite des irrégularités détectées en 2011 atteint 321 millions EUR, dont 166 millions ont déjà été recouvrés par les États membres; en 2011, le taux de recouvrement pour le secteur des ressources propres traditionnelles est remonté à 52% alors qu'il était de 46% en 2010. Les députés demandent qu'une attention particulière soit accordée aux affaires de fraude douanière, qui font partie des domaines présentant les taux les plus élevés de corruption systémique en Europe.
Recettes : les députés rappellent que lon estime à 1000 milliards EUR le montant des fonds publics qui sont perdus chaque année dans l'Union européenne sous l'effet de la fraude et de l'évasion fiscales, ce qui représente un coût annuel approximatif de 2000 EUR pour chaque citoyen européen. Dès lors, la lutte contre l'évasion fiscale doit être une priorité absolue pour la Commission comme pour les États membres.
La Commission est invitée à renforcer sa coordination avec les États membres afin de recueillir des données fiables sur le déficit de droits de douane et de TVA dans les pays concernés et à rendre régulièrement compte de la situation au Parlement.
Douanes : le Parlement sinquiète de la conclusion de la Cour des comptes, selon laquelle de graves insuffisances sont observées dans la surveillance douanière au niveau national. Il invite la Commission à mettre en place toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les autorités douanières des États membres agissent ensemble et à surveiller la mise en uvre. Il propose également la création d'un corps de fonctionnaires douaniers européens spécialisés dans la lutte anti-fraude.
Code des douanes modernisé (CDM) : la résolution déplore le fait que la Commission et les États membres ne soient pas en mesure d'assurer la mise en uvre prompte du code des douanes modernisé (CDM). La Commission est invitée à évaluer le coût du report de la pleine application du CDM afin d'en quantifier les conséquences budgétaires.
TVA : préoccupés par le caractère généralisé de la fraude à la TVA, les députés notent que le modèle de perception de la TVA n'a pas changé depuis son introduction et qu'il est obsolète, étant donné les nombreuses modifications que l'environnement technologique et économique. Ils soulignent la nécessité de la communication en temps réel des transactions commerciales aux autorités fiscales afin de lutter contre la fraude fiscale.
Contrebande de cigarettes : la perte de recettes douanières résultant de la seule contrebande de cigarettes est estimée à plus de 10 milliards EUR par an. La résolution souligne dès lors l'importance de renforcer la dimension extérieure du plan d'action de la Commission pour la lutte contre la contrebande de cigarettes et d'alcool le long de la frontières orientale de l'Union européenne.
Dépenses : les députés rappellent que 94% du budget de l'Union est investi dans les États membres et qu'il est d'une importance capitale de veiller à ce que cet argent soit bien dépensé. Ils déplorent que la plupart des irrégularités frappant les dépenses de l'Union soient commises à l'échelon national. Soulignant la nécessité de garantir la transparence complète des bénéficiaires des fonds européens, ils renouvellent leur demande à la Commission de mettre au point un système qui répertorie tous les bénéficiaires des fonds européens sur un seul et même site Internet.
Agriculture : les députés soulignent que le nombre d'irrégularités signalées comme frauduleuses dans le secteur de l'agriculture ne reflète pas la situation réelle et que la Commission elle-même a fait part de son inquiétude quant au fait que les données transmises relatives aux fraudes peuvent ne pas donner une image totalement fidèle. Ils demandent une meilleure coopération et un échange des meilleures pratiques dans les États membres afin de réagir aux fraudes et de les communiquer à la Commission.
Préoccupés par le taux de fraude étonnamment bas signalé par la France, l'Allemagne, l'Espagne et le Royaume-Uni, les députés regrettent que la Commission n'ait pas donné de réponse définitive à la question de savoir si les faibles taux de fraude présumée signalés par ces pays sont le résultat d'un non-respect des règles d'information, ou s'ils sont liés à la capacité des systèmes de contrôle mis en place dans ces États membres à détecter les fraudes. Les États membres susmentionnés sont invités fournir des explications précises quant à la faiblesse des taux de fraude présumée qu'ils ont signalés.
Politique de cohésion : les députés saluent le fait qu'en 2011, le taux de recouvrement pour la politique de cohésion soit passé à 93%, contre 69% en 2010. Ils demandent à la Commission européenne et aux États membres de simplifier les dispositions applicables à la passation des marchés publics ainsi que les procédures de gestion des fonds structurels.
Relations extérieures, aide extérieure et élargissement : le Parlement constate que le rapport annuel de la Cour des comptes européenne relatif à l'exercice 2011 a signalé des erreurs relatives aux paiements finaux qui n'avaient pas été détectées lors des contrôles de la Commission, et en a conclu que ceux-ci n'étaient pas pleinement effectifs. La Commission est invitée à suivre les recommandations de la Cour des comptes en vue de parfaire ses mécanismes de suivi afin d'assurer une dépense efficace et adéquate des fonds alloués.
OLAF : les députés réaffirment la nécessité de renforcer l'indépendance et l'efficacité de l'OLAF, notamment par l'indépendance et la capacité opérationnelle du comité de surveillance de l'OLAF, lequel devrait être doté des moyens nécessaires pour assumer effectivement son rôle. Ils se félicitent de la stratégie antifraude, mais sinquiètent cependant des conclusions de la Commission, selon lesquelles les mesures dissuasives à l'encontre de tout usage des fonds du budget de l'Union à des fins délictueuses dans les États membres s'avèrent insuffisantes. Ils saluent les propositions de la Commission visant à résoudre ce problème et recommandent que les pays tiers bénéficiaires soient également associés aussi pleinement que possible.
Le Parlement prend note des préoccupations exprimées par le Comité de surveillance de l'OLAF dans son rapport d'activité 2012, en particulier en ce qui concerne le cas transmis en octobre 2012 aux autorités judiciaires nationales qui a conduit à la démission d'un membre de la Commission européenne. Il est d'avis que ces préoccupations devraient faire l'objet d'un examen approfondi par les autorités judiciaires compétentes.
Les députés sont également préoccupés par les conclusions du comité de surveillance. Ils estiment que les infractions aux règles essentielles de procédure lors des enquêtes préparatoires risquent d'affecter la légalité de la décision finale adoptée sur la base des enquêtes de l'OLAF et que la responsabilité légale de la Commission risque dêtre engagée. Ils demandent à l'OLAF de régler immédiatement ce problème.
Mesures denquête : le Parlement réaffirme qu'aucune violation des droits fondamentaux par l'OLAF ou d'autres services de la Commission ne peut être acceptée. Il se réfère à cet égard à l'avis du comité de surveillance de l'OLAF selon lequel l'OLAF est peut-être allé au-delà des mesures d'enquête explicitement prévues par le règlement actuellement en vigueur, notamment en ce qui concerne la préparation du contenu d'une conversation téléphonique pour un tiers avec une personne faisant l'objet de l'enquête en étant présent lors de cette conversation, qui a été enregistrée.
Enregistrement des conversations téléphoniques : les députés demandent à l'OLAF d'informer la commission compétente du Parlement concernant la base juridique qui l'autorise à contribuer et à préparer l'enregistrement de conversations téléphoniques de personnes privées sans leur consentement préalable et à utiliser le contenu aux fins d'enquêtes administratives. Ils renouvellent leur demande à lOLAF de fournir au Parlement - parallèlement à une demande similaire du Conseil - une analyse juridique de la légalité de ces enregistrements dans les États membres.
La Commission, en coopération avec la commission compétente du Parlement européen, est invitée à analyser la légalité des opérations de l'OLAF, à prendre toutes les mesures nécessaires pour améliorer la gestion de l'OLAF, et à formuler des solutions pratiques pour remédier aux insuffisances avant la fin de l'année 2013. Les députés invitent la Commission et le Conseil, dans l'intervalle, à bloquer toutes les discussions et décisions sur la création d'un Parquet européen.
Le Parlement est également préoccupé par l'efficacité et le fonctionnement interne de l'OLAF. Il invite par conséquent la Commission, en coopération avec la commission compétente du Parlement européen, à analyser la légalité des opérations de l'OLAF, à prendre toutes les mesures nécessaires pour améliorer la gestion de l'OLAF, et à formuler des solutions pratiques pour remédier aux insuffisances avant la fin de l'année 2013. Il invite la Commission et le Conseil, dans l'intervalle, à bloquer toutes les discussions et décisions sur la création d'un Parquet européen.
Initiatives de la Commission dans le domaine de l'activité antifraude : la résolution salue le fait qu'à la suite de la demande du Parlement, la Commission définisse actuellement une méthode permettant de mesurer le coût de la corruption dans les marchés publics en ce qui concerne les fonds de l'Union. Il observer toutefois que malgré toutes les initiatives positives de la Commission, la plupart des politiques de lutte contre la corruption sont actuellement de nature passive. Il invite les directions générales de la Commission à renforcer la prévention de la fraude dans leurs domaines de compétence respectifs.
Les députés attendent avec intérêt la présentation par la Commission de la proposition législative relative à la création d'un parquet européen, qui sera chargé de rechercher, de poursuivre et de traduire en justice les personnes portant atteinte aux intérêts gérés par ou pour le compte de l'Union, que la Commission a annoncée pour juin 2013.