Agence de coopération judiciaire en matière pénale de l'Union (Eurojust)

2013/0256(COD)

OBJECTIF : instituer une Agence de l'Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust).

ACTE PROPOSÉ : Règlement du Parlement européen et du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Parlement européen décide conformément à la procédure législative ordinaire sur un pied d’égalité avec le Conseil.

CONTEXTE : Eurojust a été instituée par la décision 2002/187/JAI du Conseil afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité organisée dans l’Union européenne. Depuis lors, Eurojust a facilité la coordination et la coopération entre les différentes autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites dans le traitement d’affaires concernant plusieurs États membres.

Ces dernières années, cet organe européen a connu un développement continu et est devenu un acteur central dans la coopération judiciaire en matière pénale.

Au même moment, la lutte contre la criminalité organisée et le démantèlement des organisations criminelles a également largement progressé, faisant naître la nécessité d’une réponse coordonnée à l’échelle européenne.

Dans cette perspective, le rôle d’Eurojust dans l’amélioration de la coopération et de la coordination entre les autorités judiciaires compétentes des États membres et dans l’assistance apportée aux enquêtes impliquant des pays tiers demeure essentiel.

Le traité de Lisbonne a introduit de nouvelles possibilités de renforcer l’efficacité d’Eurojust. L’article 85 du traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE) reconnaît explicitement la mission d’Eurojust et prévoit que la structure, le fonctionnement, le domaine d’action et les tâches d’Eurojust soient déterminés par voie de règlements adoptés conformément à la procédure législative ordinaire, associant notamment le Parlement européen à l’évaluation des activités d’Eurojust.

C’est dans ce contexte qu’il est proposé de refondre le règlement instituant Eurojust en créant un nouveau cadre juridique visant à créer une Agence de l’UE pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust), successeur légal de l’unité Eurojust.

ANALYSE D’IMPACT : la présente proposition n’a pas fait l’objet d’une analyse d’impact formelle. Néanmoins, la Commission a organisé une réunion consultative avec des experts des États membres et des représentants du Secrétariat du Conseil, du Parlement européen et d’Eurojust, pour discuter des questions liées à une éventuelle réforme au titre de l’article 85 du TFUE, parmi lesquelles figuraient notamment :

  • le renforcement de la gouvernance,
  • l’implication des parlements européen et nationaux,
  • la possibilité d’octroyer des compétences supplémentaires à Eurojust,
  • les liens avec la mise en place du Parquet européen.

De manière générale, les participants à la réunion se sont prononcés en faveur d’une amélioration de la structure de gouvernance et de l’efficacité d’Eurojust.

BASE JURIDIQUE : article 85 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

CONTENU : la présente proposition de règlement vise à instituer une l’Agence de l’Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) et à abroger les décisions 2002/187/JAI, 2003/659/JAI et 2009/426/JAI.

Objectifs : la proposition comporte de nombreux objectifs:

  • accroître l’efficacité d’Eurojust en la dotant d’une nouvelle structure de gouvernance;
  • améliorer l’efficacité opérationnelle d’Eurojust en définissant de façon homogène le statut et les compétences des membres nationaux;
  • définir le rôle du Parlement européen et des parlements nationaux dans l’évaluation des activités d’Eurojust, dans le respect du traité de Lisbonne;
  • mettre le cadre juridique d’Eurojust en conformité avec l’approche commune, tout en respectant pleinement son rôle spécifique en matière de coordination des enquêtes pénales en cours;
  • veiller à ce qu’Eurojust puisse coopérer étroitement avec le Parquet européen, une fois celui-ci mis en place.

Missions et compétences : la proposition définit les tâches et compétences de la future Agence européenne. Celles-ci sont détaillées dans une annexe au projet de règlement.

Á noter qu’Eurojust possède la capacité juridique la plus large reconnue aux personnes morales par les législations nationales.

Organisation d’Eurojust : les principaux éléments de la réforme porte sur l’organisation de la nouvelle Agence :

  • Membres nationaux d’Eurojust : la réforme maintient le lien des membres nationaux avec leur État membre d’origine, mais le nouveau règlement énumère explicitement leurs compétences opérationnelles communes, ce qui leur permettra de coopérer les uns avec les autres et avec les autorités nationales de manière plus efficace.
  • Structure : la proposition se concentre sur la nouvelle structure d’Eurojust et réglemente respectivement le collège, le conseil exécutif et la fonction de directeur administratif. La gouvernance d’Eurojust est améliorée par une distinction claire entre deux compositions du collège, selon que ce dernier exerce des fonctions opérationnelles ou de gestion. Les premières représentent les activités essentielles d’Eurojust, à savoir le soutien apporté aux enquêtes nationales et leur coordination. Les secondes se rapportent, par exemple, à l’adoption du programme de travail, du budget annuel ou du rapport annuel de l’Agence. Un nouvel organe, le conseil exécutif, est mis en place pour préparer les décisions du collège en matière de gestion et pour assumer directement certaines tâches administratives. La Commission est représentée au sein du collège lorsque celui-ci exerce ses fonctions de gestion, ainsi qu’au conseil exécutif. La procédure de nomination, les responsabilités et les tâches du directeur administratif sont clairement détaillées. Cette structure introduit un double degré de gouvernance, tout en maintenant la spécificité d’Eurojust et en préservant son indépendance. Elle est également économe et contribue à l’efficacité d’Eurojust, étant donné que les membres nationaux seront assistés en matière de questions budgétaires et administratives, ce qui leur permettra de se concentrer sur leurs tâches opérationnelles.
  • Questions opérationnelles : les mécanismes opérationnels existants sont maintenus : i) dispositif permanent de coordination (DPC), ii) système national de coordination Eurojust (SNCE), iii) échanges d’informations, iv) suivi des demandes d’Eurojust. Il en va de même pour l’architecture du système de gestion des dossiers Eurojust.

Traitement des informations et protection des données à caractère personnel : la proposition complète le dispositif existant se rapportant à la protection des données par Eurojust. Elle spécifie et complète le règlement (CE) n° 45/2001 en ce qui concerne les données à caractère personnel de nature opérationnelle, en respectant la spécificité des activités de coopération judiciaire tout en tenant compte de la nécessité d’assurer la cohérence et la compatibilité avec les principes de protection des données pertinents. La possibilité de définir des restrictions relatives au traitement des données à caractère personnel demeure.

Le chapitre consacré à la protection des données est également mis en conformité avec les nouvelles garanties offertes aux personnes issues des mesures réformant la protection des données, adopté par la Commission en janvier 2012. De plus, il prévoit un important changement dans le mécanisme de surveillance et définit les compétences du Contrôleur européen de la protection des données en ce qui concerne le suivi du traitement de toutes les données à caractère personnel par Eurojust. Le Contrôleur européen de la protection des données reprend les tâches de l’organe de contrôle commun établi par la décision du Conseil instituant Eurojust.

Relations avec les partenaires : la proposition souligne l’importance du partenariat et de la coopération entre Eurojust et d’autres institutions, organes et organismes de l’Union dans la lutte contre la criminalité.

Sont détaillées :

  • les relations avec les secrétariats du Réseau judiciaire européen, du réseau d’experts des équipes communes d’enquête et du réseau génocide, accueillis par Eurojust ;
  • les relations spécifiques avec le Parquet européen ;
  • la relation privilégiée avec EUROPOL afin de renforcer l’efficacité des deux organes pour la lutte contre les formes graves de criminalité internationale relevant de leur compétence et l’établissement d’un mécanisme de contrôle croisé de leurs systèmes respectifs d’information ;
  • les coopérations à prévoir avec les pays tiers : dans ce domaine, le traité de Lisbonne a modifié la manière dont l’UE exerce ses relations extérieures dans le cadre des agences (ces dernières ne seront plus en mesure de négocier des accords internationaux elles-mêmes: ces accords devront être conclus conformément à l’article 218 du TFUE, même si Eurojust pourra conclure des arrangements pratiques pour renforcer la coopération avec les autorités compétentes des pays tiers, notamment par l’échange d’informations). Á noter que le transfert de données à des organisations ou à des pays tiers est également prévu mais dans des conditions strictement réglementées.

Dispositions financières : des dispositions sont prévues pour moderniser l’établissement et l’exécution du budget d’Eurojust, la reddition des comptes et les dispositions relatives à la décharge.

Personnel : un ensemble de dispositions sont consacrées au personnel d’’Eurojust. La nature hybride d’Eurojust et l’importance du lien opérationnel entre les bureaux nationaux et leurs États membres d’origine expliquent que les salaires et émoluments du personnel soient à la charge des États membres.

Le directeur administratif d’Eurojust est toujours nommé par le collège d’Eurojust, toutefois sur la base d’une liste de candidats dressée par la Commission à la suite d’une procédure de sélection ouverte et transparente. Cette procédure respecte l’autonomie de l’Agence tout en garantissant une évaluation rigoureuse des candidats. Une procédure similaire est prévue pour le licenciement du directeur administratif.

Évaluation et rapports : le Parlement européen et les parlements nationaux seront associés à l’évaluation des activités d’Eurojust. Cette évaluation doit être menée de façon économique, en se fondant sur le rapport annuel d’Eurojust, tout en préservant l’indépendance opérationnelle de l’Agence. Une évaluation globale périodique d’Eurojust est également prévue tous les 5 ans.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la réforme de la gouvernance n’a pas d’incidence budgétaire (collège assumant les tâches d’un «conseil d’administration») et aucune nouvelle tâche n’est prévue pour Eurojust dans la proposition, hormis l’assistance gratuite apportée au Parquet européen.