Femmes migrantes sans papiers dans l'Union européenne
Le Parlement européen a adopté 327 voix pour, 303 voix contre et 36 abstentions une résolution sur les femmes migrantes sans papiers dans l'Union européenne.
Le Parlement rappelle que les "migrants sans papiers" sont des ressortissants de pays tiers dont la présence sur le territoire d'un État membre ne remplit pas les conditions d'entrée fixées à l'article 5 du code frontières Schengen ou toute autre condition d'entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre, et dont la détection par les services de l'immigration conduirait à une décision de retour ou à une expulsion. Il rappelle également que les migrants sans papiers ne disposent souvent d'aucuns moyens financiers et sont dès lors contraints à chercher des solutions inacceptables pour s'assurer des moyens de subsistance.
Dans ce contexte, les femmes migrantes sont particulièrement exposées et vulnérables. Toutefois, la Plénière na pas retenu la proposition de sa commission au fond de reconnaître aux femmes migrantes sans papiers le statut de groupe social vulnérable, exposé à la traite des êtres humains, à la discrimination et à l'exploitation sur le marché du travail.
Rappelant combien l'immigration illégale était un phénomène d'actualité et que la politique d'immigration et la gestion des flux migratoires étaient l'objet d'une responsabilité commune et solidaire des États membres, le Parlement rappelle la nécessité d'un cadre juridique commun en matière de politique d'immigration pour protéger les migrants et les victimes potentielles, en particulier les femmes et les enfants, vulnérables aux différentes formes de criminalité organisée dans le contexte de l'immigration et de la traite des êtres humains.
Il souligne que les migrantes sans papiers lesbiennes, bisexuelles et transsexuelles sont victimes d'une double discrimination et que leur condition fragile d'étrangère sans papiers vient s'ajouter à leur situation déjà compliquée.
Il dénonce les fausses promesses faites aux femmes dans leur pays dorigine, de contrats de travail dans les pays développés et encourage les États membres à appliquer la directive définissant l'aide à l'entrée, au transit et au séjour irréguliers pour réduire le risque de situations de mauvais traitements ou d'exploitation.
Vulnérabilité et défense des droits de lhomme : le Parlement encourage les États membres à lever l'obligation de présenter une pièce d'identité afin d'accéder aux foyers d'accueil gérés par l'État membre pour les migrants sans papiers dans les situations les plus vulnérables. Il insiste pour qu'il soit tenu compte de la situation de grande vulnérabilité des personnes ayant des besoins spécifiques, comme les enfants et les adolescents, les personnes âgées, les personnes handicapées et les migrants persécutés dans leur pays d'origine pour leurs idées, leur orientation sexuelle ou leurs caractéristiques physiques, etc., et les femmes victimes de la violence sexiste.
Il souligne au passage que le droit à la santé est un droit humain fondamental et encourage donc les États membres à dissocier les politiques de santé des contrôles migratoires. Par conséquent, le Parlement demande que lon ne contraigne pas les professionnels de la santé à signaler les migrants sans papiers et que lon encourage les États membres à fournir des soins et une aide appropriés en tenant compte des besoins spécifiques en fonction des genres.
De même, le Parlement encourage les États membres à :
- proposer une formation spécialement consacrée aux questions de l'égalité des genres aux officiers qui sont en contact avec ces personnes et à ne pas exiger des écoles le signalement des enfants de migrants sans papiers ;
- à garantir une assistance psychologique, sanitaire et juridique adéquate aux femmes sans papiers.
Il condamne également toutes les formes de violence, de traite des êtres humains, d'abus et de discrimination dont sont victimes les femmes migrantes. Il les encourage tout particulièrement à dénoncer leurs agresseurs.
Dans la foulée, le Parlement invite les États membres à :
- prendre les mesures pour prévenir la prolifération de la prostitution des femmes migrantes ;
- mettre en place des mécanismes permettant aux travailleurs migrants sans papiers d'intenter un recours contre un employeur pour tout salaire impayé ;
- assurer la mise en uvre de la protection prévue par la directive sur les sanctions aux employeurs, qui oblige les États membres à mettre en place des mécanismes permettant aux travailleurs migrants sans papiers d'intenter un recours contre un employeur pour tout salaire impayé ;
- prendre des mesures pour mettre un terme aux pratiques discriminatoires, lutter contre le travail non déclaré et l'exploitation, entre autres grâce à des inspections du travail, et à reconnaître les femmes sans papiers comme des victimes et leur permettre d'avoir accès aux services de santé de base ;
- mettre en place des formations adéquates à destination des services de polices et autres pour une meilleure prise en charge des femmes migrantes victimes de violences ;
- ratifier la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique ;
- trouver des solutions pour reconnaître la valeur du travail des femmes migrantes qui exercent des activités utiles et contribuent au bon fonctionnement de la société qui les accueille ;
- veiller à ce que toutes les femmes migrantes, y compris les femmes migrantes sans papiers victimes d'abus et de violence, bénéficient d'une protection et d'une prise en charge ;
- mettre en uvre la directive retour dans son intégralité et délivrer une attestation en cas de report d'une expulsion afin d'éviter les situations de vide juridique.
Pour sa part, la Commission est appelée à :
- proposer la révision la directive sur les sanctions aux employeurs en introduisant la possibilité de mécanismes permettant aux migrants en séjour irrégulier de déposer une plainte formelle de façon anonyme contre un employeur abusif et renforcer la protection des droits fondamentaux des migrants placés en rétention ;
- modifier la directive retour afin d'assurer le respect des droits humains des migrants en situation irrégulière, en particulier des femmes enceintes et des enfants ;
- veiller à ce que les normes établies par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant demeurent au cur de toutes les mesures prises en faveur des droits de l'enfant.
Enfin, les États membres et la Commission sont appelés, chacun à leur niveau, à :
- combler les lacunes existantes en ce qui concerne des données fiables et les connaissances disponibles sur le nombre et la situation des personnes sans papiers dans l'UE et développer des campagnes de sensibilisation européennes pour sensibiliser les femmes migrantes sans papiers à leurs droits ;
- mettre à la disposition des femmes sans papiers, un personnel féminin en nombre suffisant pour respecter leur religion et culture.
En revanche, la Plénière nappelle pas les États membres et la Commission à proposer des formules de financement pour les organisations offrant une aide juridique, humanitaire et sociale aux femmes migrantes sans papiers et à étendre la portée du Fonds social européen et du Fonds européen d'intégration pour y inclure tous les migrants, indépendamment de leur statut de résidence.