Rôle régional du Pakistan et relations politiques de ce pays avec l'Union européenne

2013/2168(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté le rapport d’initiative de Boris ZALA (S&D, SK) sur le rôle régional du Pakistan et les relations politiques de ce pays avec l'Union européenne.

Les députés soulignent que le rôle stratégique du Pakistan dans la région et ses relations avec ses voisins et avec l'Union européenne revêtent une importance majeure et grandissante pour l'Union européenne.

Les élections législatives de mars 2013 ont marqué le premier passage de pouvoir entre deux gouvernements civils élus dans l'histoire moderne du Pakistan. Néanmoins, les progrès politiques et économiques du pays sont entravés par des problèmes de sécurité omniprésents à l'intérieur du pays et au niveau de la région (l'extrémisme, le fanatisme, les attentats-suicides et les assassinats ciblés).

Les députés rappellent que le Pakistan est l'un des principaux bénéficiaires de l'aide au développement et de l'aide humanitaire de l'Union européenne, et que cette dernière est le principal marché d'exportation du pays. L'Union européenne et le Pakistan ont récemment choisi d'approfondir et d'élargir leurs relations bilatérales, comme en témoignent le plan quinquennal de coopération, lancé en février 2012, ainsi que le premier dialogue stratégique UE-Pakistan, tenu en juin 2012. En outre, depuis le 1er janvier 2014, le Pakistan est désormais intégré dans le schéma de préférences tarifaires généralisées "SPG+" de l'Union européenne.

Le rapport considère que l'instauration d'une démocratie durable et d'une société pluraliste – ainsi que l'établissement d'une plus grande justice sociale, l'élimination de la grande pauvreté et de la malnutrition qui touchent certaines zones du pays, l'élévation du niveau d'éducation et la préparation du pays aux effets du changement climatique – passe par des réformes profondes et difficiles de l'ordre politique et socioéconomique du Pakistan.

Celui-ci reste caractérisé par :

  • des structures féodales de propriété foncière et d'allégeances politiques ;
  • des déséquilibres dans les priorités entre les dépenses militaires, d'une part, et la protection sociale, l'éducation et le développement économique, d'autre part ; et
  • un système défaillant de collecte des recettes qui sape fondamentalement la capacité de l'État à produire des biens publics.

Les députés estiment que des gouvernements civils élus, dotés d'une légitimité démocratique, la décentralisation de compétences aux provinces et l'efficacité des collectivités locales sont les meilleurs moyens de contenir la vague de violence et d'extrémisme. Ces mesures devraient également permettre de rétablir l'autorité de l'État dans les zones tribales sous administration fédérale (FATA), et de garantir la souveraineté et l'intégrité territoriale du Pakistan.

En ce qui concerne les attaques de drones américains, le rapport note que le gouvernement pakistanais a clairement fait part de son opposition à de telles attaques sur son territoire. Par ailleurs, il approuve la résolution de l'Assemblée générale des Nations unies, qui demande que le cadre juridique applicable à l'utilisation de drones armés soit précisé.

Les bruits selon lesquels le Pakistan envisagerait d'exporter des armes nucléaires vers des pays tiers suscitent de vives préoccupations. Les députés invitent le Pakistan, pays disposant de l'arme nucléaire, à interdire par la loi l'exportation de tout matériel ou savoir-faire lié aux armes nucléaires et de concourir activement aux initiatives internationales de non-prolifération.

Le rapport indique que les relations entre l'Union européenne et le Pakistan ont besoin d'être approfondies et étendues grâce au développement du dialogue politique, permettant ainsi d'entretenir des rapports d'intérêt commun entre partenaires égaux. Les députés estiment que la transition démocratique du Pakistan a donné la possibilité à l'Union européenne d'adopter une approche politique plus affirmée dans les relations bilatérales et la fourniture d'aide.

Le service européen pour l'action extérieure (SEAE) et la Commission sont invités à mettre en œuvre une politique nuancée et multidimensionnelle à l'égard du Pakistan, qui garantisse la synergie de tous les instruments utiles à la disposition de l'Union, tels que le dialogue politique, la coopération en matière de sécurité, le commerce et l'aide, conformément à l'approche globale de l'Union concernant l'action extérieure et en vue de la préparation du prochain sommet UE-Pakistan. Ils devraient également veiller à ce que la politique de l'Union à l'égard du Pakistan soit contextualisée et s'insère dans une stratégie plus large pour la région, renforçant ainsi les intérêts de l'Union européenne en Asie centrale et méridionale.

Les députés expriment leur préoccupation quant à la qualité de l'éducation et, dans le même contexte, à la situation alarmante des femmes dans de nombreuses régions du Pakistan. Ils demandent des mesures concrètes et visibles pour assurer le respect des droits fondamentaux des femmes au sein de la société, notamment la promulgation de lois contre la violence domestique, l'adoption de mesures pour améliorer les enquêtes et les poursuites dans les affaires de crimes d'honneur et de vitriolages et une révision des lois qui favorisent l'impunité. Ils soulignent qu'il est nécessaire d'améliorer l'accès à l'éducation, l'intégration des femmes sur le marché du travail et les soins de santé à destination des mères.

Enfin, les députés se déclarent une fois de plus profondément préoccupés par les lois pakistanaises sur le blasphème. Celles-ci peuvent entraîner des condamnations à mort et servent souvent à justifier la censure, les incriminations, les persécutions et, dans certains cas, les assassinats dont sont victimes des membres de minorités politiques et religieuses. Elles ouvrent ainsi la voie à des abus qui touchent les personnes de toutes confessions. Les autorités pakistanaises devraient mettre en œuvre un moratoire sur l'application de ces lois et le Pakistan devrait intensifier ses efforts pour préserver la liberté de religion et de conviction, notamment en s'acheminant vers l'abolition de la peine de mort.