Instruction européenne en matière pénale. Initiative Belgique, Bulgarie, Estonie, Espagne, Autriche, Slovénie et Suède

2010/0817(COD)

Le Parlement européen a adopté par 467 voix pour, 22 contre et 10 abstentions, une résolution législative sur le projet de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la décision européenne d’enquête en matière pénale.

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire. Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un accord négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition comme suit :

Décision d'enquête européenne : une décision d'enquête européenne est une décision judiciaire émise ou validée par une autorité judiciaire d'un État membre afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d'enquête spécifiques dans un autre État membre en vue d'obtenir des preuves conformément à la proposition de directive. La décision d'enquête européenne pourrait également être émise pour l'obtention de preuves qui sont déjà en possession des autorités compétentes de l'État d'exécution.

Une décision d'enquête européenne pourrait également être demandée par un suspect ou une personne poursuivie, ou par un avocat agissant au nom d'un suspect ou d'une personne poursuivie.

Champ d’application de la décision d’enquête européenne : les décisions d’enquêtes européennes devraient avoir une portée horizontale et s'appliquer à toutes les mesures d'enquête visant à recueillir des preuves. Néanmoins, la création d'une équipe commune d'enquête et l'obtention de preuves dans le cadre d'une telle équipe nécessite des règles spécifiques qu'il est préférable de traiter séparément. En conséquence, il est souligné que les instruments existants devraient continuer à s'appliquer à ce type de mesures.

Contenu et forme de la décision d'enquête européenne : la décision d'enquête européenne (telle que formalisée au formulaire figurant à l'annexe A de la proposition de directive) devrait être remplie, signée, et son contenu certifié exact et correct, par l'autorité d'émission. Á cet effet, un certain nombre de prescriptions sont exigées qui sont détaillées dans la proposition dont des dispositions linguistiques.

Conditions d'émission et de transmission d'une décision d'enquête européenne : l'autorité d'émission ne pourrait émettre une décision d'enquête européenne que si les conditions suivantes sont réunies: i) l'émission de la décision d'enquête européenne est nécessaire et proportionnée aux finalités des procédures visées à l'article 4, compte tenu des droits du suspect ou de la personne poursuivie; et ii) la ou les mesures d'enquête indiquées dans la décision d'enquête européenne auraient pu être ordonnées dans les mêmes conditions dans le cadre d'une procédure nationale similaire.

Exécution : les autorités de l'État d'émission présentes dans l'État d'exécution devraient être liées par le droit de l'État d'exécution pendant l'exécution de la décision d'enquête européenne. Elles ne devraient avoir aucun pouvoir répressif sur le territoire de l'État d'exécution, sauf si l'exercice de tels pouvoirs sur le territoire de l'État d'exécution est conforme au droit de l'État d'exécution et dans la mesure convenue entre l'autorité d'émission et l'autorité d'exécution.

Recours à un type différent de mesure d'enquête : l'autorité d'exécution pourrait recourir à une mesure d'enquête autre que celle indiquée dans la décision d'enquête européenne si la mesure d'enquête choisie par l'autorité d'exécution permet d'obtenir le même résultat que la mesure indiquée dans la décision d'enquête européenne notamment par des moyens moins intrusifs.

Motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution : la reconnaissance ou l'exécution d'une décision d'enquête européenne pourrait être refusée dans l'État d'exécution lorsque (entre autres) :

  • il existe des règles relatives à l'établissement et à la limitation de la responsabilité pénale concernant la liberté de la presse ou la liberté d'expression dans d'autres médias qui rendent impossible l'exécution de la décision d'enquête européenne ;
  • l'exécution de la décision d'enquête européenne serait contraire au principe non bis in idem (l'autorité d'émission devrait donner l'assurance que les éléments de preuve transférés à la suite de l'exécution de la décision d'enquête européenne ne seraient pas utilisés pour poursuivre ou sanctionner une personne qui a été définitivement jugée dans un autre État membre sur la base des mêmes faits) ;
  • la décision d'enquête européenne concerne une infraction pénale qui est présumée avoir été commise hors du territoire de l'État d'émission et en totalité ou en partie sur le territoire de l'État d'exécution, et les faits pour lesquels elle a été émise ne constituent pas une infraction dans l'État d'exécution ;
  • les faits pour lesquels la décision d'enquête européenne a été émise ne constituent pas une infraction au titre du droit de l'État d'exécution, à moins qu'ils ne concernent une infraction figurant dans les catégories d'infractions figurant à l'annexe D de la proposition (actes de terrorisme, trafic d’êtres humains,…), conformément à ce qui a été indiqué par l'autorité d'émission dans la décision d'enquête européenne, si ces faits sont passibles dans l'État d'émission d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'un maximum d'au moins 3 ans.

En outre, lorsque la décision d'enquête européenne concerne une infraction en matière de taxes ou d'impôts, de douane et de change, l'autorité d'exécution ne pourrait refuser la reconnaissance ou l'exécution au motif que le droit de l'État d'exécution n'impose pas le même type de taxe ou de droits ou ne contient pas le même type de réglementation en matière de taxes, d'impôts, de douane ou de change que le droit de l'État d'émission.

Recours : les voies de recours permettant de contester une décision d'enquête européenne devraient être au moins équivalentes à celles qui sont déjà ouvertes dans la procédure nationale. Les motifs de fond qui seraient à l'origine de l'émission de la décision d'enquête européenne ne pourraient être contestés que par une action intentée dans l'État d'émission, sans préjudice des garanties des droits fondamentaux dans l'État d'exécution.

Un recours ne pourrait pas suspendre l'exécution de la mesure d'enquête, à moins que cela ne soit prévu dans le cadre de procédures nationales similaires.

Dépenses inhérentes à la tenue d’une enquête européenne : les dépenses supportées sur le territoire de l'État membre d'exécution pour la mise en place concrète d'une décision d'enquête européenne devraient être exclusivement supportées par cet État membre. Toutefois, l'exécution d'une décision d'enquête européenne pourrait entraîner des coûts exceptionnellement élevés pour l'État d'exécution (par exemple, en cas de vaste opération policière). Cette situation ne devrait pas faire obstacle à l'exécution de la décision d'enquête européenne et l'autorité d'émission ainsi que l'autorité d'exécution devraient chercher à établir quelles sont les dépenses qui devraient être considérées comme étant exceptionnellement élevées. La question des coûts pourrait faire l'objet de consultations entre les États membres. En dernier ressort, ces frais pourraient être supportés par l'État d'émission, sans que cette pratique ne soit utilisée de manière abusive.

Mandat d’arrêt européen : une décision d'enquête européenne pourrait être émise en vue du transfèrement temporaire de la personne à l'État d'émission. Cependant, lorsque la personne doit être transférée à un autre État membre aux fins de poursuites, y compris pour la faire comparaître devant une juridiction en vue d'un jugement, un mandat d'arrêt européen devrait être émis conformément à la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil. Toutefois et afin de garantir un usage proportionné du mandat d'arrêt européen, l'autorité d'émission devrait examiner si une décision d'enquête européenne serait un moyen efficace et proportionné de conduire une procédure pénale. L'autorité d'émission devrait en particulier examiner si l'émission d'une décision d'enquête européenne en vue de permettre l'audition par vidéoconférence d'un suspect ou d'une personne poursuivie pourrait constituer une alternative efficace.

Enquête européenne portant sur des preuves financières ou bancaires : une décision d'enquête européenne pourrait être émise en vue d'obtenir des preuves concernant les comptes, de quelque nature qu'ils soient, détenus dans une banque ou un établissement financier non bancaire par la personne qui fait l'objet d'une procédure pénale. Des dispositions ont été introduites afin de déterminer quel type de renseignement relatif à un compte bancaire devrait être récupéré.

Enquêtes discrètes : une décision d'enquête européenne pourrait être émise en vue de demander à l'État d'exécution d'aider l'État d'émission pour la réalisation d'enquêtes pénales menées par des agents intervenant en secret ou sous une identité fictive (enquête discrète). Toute enquête discrète devrait être dûment justifiée et menée conformément à la loi de l'État membre sur le territoire duquel elle se déroule.

Interceptions téléphoniques : il est précisé que les possibilités de coopérer dans le cadre des dispositions relatives à l'interception de télécommunications ne devraient pas être limitées au contenu des télécommunications, mais pourraient aussi concerner la collecte de données relatives au trafic et à la localisation liées à ces télécommunications, ce qui permettrait d'obtenir des données moins intrusives.

Assistance technique : des dispositions techniques ont été introduites pour clarifier la portée de l’assistance technique à offrir par un État membre en cas d'interception de télécommunications dans cet État. Dans toute décision d'enquête européenne comprenant une demande relative à l'interception de télécommunications, il conviendrait que l'autorité d'émission fournisse à l'autorité d'exécution des informations suffisantes, comme par exemple des informations détaillées concernant le comportement délictueux qui fait l'objet de l'enquête, afin de permettre à l'autorité d'exécution d'évaluer si cette mesure d'enquête serait autorisée dans le cadre d'une procédure nationale similaire.

Protection des données : les États membres devraient prévoir des mesures transparentes en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel et l'exercice du droit de recours par les personnes concernées en vue de la protection de leurs données à caractère personnel. Les données recueillies devraient être traitées si cela est nécessaire et proportionné à des fins compatibles avec la prévention et la détection des infractions pénales, les enquêtes et les poursuites en la matière, ou l'exécution de sanctions pénales et l'exercice du droit de la défense. Seules les personnes autorisées devraient avoir accès aux informations contenant des données à caractère personnel pouvant être obtenues au moyen de processus d'authentification.

Mesures provisoires : une décision d'enquête européenne pourrait être émise afin de prendre toute mesure visant à empêcher provisoirement toute opération de destruction, de transformation, de déplacement, de transfert ou d'aliénation d'éléments de preuve. L'autorité d'exécution devrait se prononcer sur la mesure provisoire dans les 24 heures suivant la réception de la décision d'enquête.

Rapport : au plus tard 5 ans après la date d'entrée en vigueur de la directive, la Commission devrait présenter un rapport sur son application, sur la base d'informations tant qualitatives que quantitatives comprenant, en particulier, l'évaluation de son incidence sur la coopération en matière pénale et sur la protection des personnes physiques, ainsi que l'exécution des dispositions relatives à l'interception des télécommunications.

Annexes : les annexes de la directive ont été revues afin de clarifier le contenu du formulaire de demande d’enquête et de lister les infractions susceptibles d’être à la source d’une décision d’enquête.