Décharge 2012: huitième, neuvième et dixième Fonds européens de développement

2013/2206(DEC)

La commission du contrôle budgétaire a adopté le rapport de Jan MULDER (ADLE, NL) recommandant au Parlement de donner la décharge à la Commission sur l'exécution du budget des 8ème, 9ème et 10ème Fonds européens de développement (FED) pour l'exercice 2012. Dans la foulée, la commission parlementaire appelle le Parlement à approuver la clôture des comptes sur l'exécution de ces FED pour 2012. Ils font un certain nombre d’observations dont il faut tenir compte au moment de l’octroi de la décharge.

Les députés rappellent que les engagements mondiaux, les engagements individuels et les paiements ont atteint respectivement 3,745 milliards EUR, 3,817 milliards EUR et 3,292 milliards EUR pour l'exercice 2012 en ce qui concerne les FED.

Déclaration d'assurance : les députés se réjouissent de la déclaration globalement positive de la Cour des comptes sur les comptes annuels définitifs des FED ainsi que les résultats des opérations et les flux de trésorerie pour l'exercice 2012. Ils relèvent toutefois que, dans les domaines de l'appui budgétaire et des contributions de l'Union aux projets multidonateurs mis en œuvre par des organisations internationales, la nature des instruments et les conditions de paiement limitent le risque que les opérations soient entachées d'erreurs.

Ils constatent par ailleurs que dans le domaine d'EuropeAid, 1.153 ONG (57% de l'ensemble des ONG) et, dans le domaine de l'aide humanitaire ECHO, 152 ONG (8%), agissent et reçoivent respectivement 1,52 milliards EUR et 960 millions EUR de fonds de l'Union. Ils constatent également que le montant des fonds de l'Union attribués à des ONG a doublé en 10 ans. Ils demandent dès lors à la Commission un récapitulatif des 30 plus gros et des 30 plus petits projets que les ONG mènent à l'aide de fonds du FED.

Ils s'inquiètent en outre de certaines irrégularités en matière d’intérêts générés par certains préfinancements.

Parallèlement, les députés regrettent que les paiements soient affectés d'un taux d'erreur significatif en raison de lacunes dans les systèmes de contrôle et de surveillance mis en place (sur les 167 opérations de dépenses intermédiaires et finales analysées par la Cour, 44 étaient entachées d'erreurs).

Efficacité des systèmes : les députés déplorent, comme par le passé, que les contrôles qu'EuropeAid effectue préalablement aux décaissements restent imparfaits. Constatant que les systèmes de contrôle n’étaient que partiellement efficaces, les députés appellent EuropeAid et les délégations de l'Union à se concentrer davantage sur le suivi des audits externes et des rapports de vérification des dépenses. Pour sa part, la Commission est appelée à :

  • poursuivre ses efforts pour renforcer ses systèmes de contrôle et faire rapport chaque année au Parlement sur les mesures correctives qu'elle a appliquées ;
  • sensibiliser les agents et améliorer leurs connaissances en matière de contrôle.

EuropeAid est en outre appelée à :

  • poursuivre le déploiement d'outils et de mesures destinés à améliorer l'efficacité générale de la pyramide de contrôle dans les services centraux d'EuropeAid et dans les délégations de l'Union ;
  • renforcer la supervision des chefs de délégation lorsqu'ils agissent en qualité d'ordonnateurs subdélégués de la Commission, afin de mieux les responsabiliser.

Les députés regrettent en particulier que, malgré sa recommandation de l'an dernier, aucune amélioration significative du fonctionnement de la structure d'audit interne n'ait été constatée, alors que celle-ci joue un rôle important dans l'amélioration du système de contrôle interne ou dans l'analyse coût-efficacité des mécanismes de contrôle.

Appui budgétaire : les députés constatent qu'en 2012, l'appui budgétaire a représenté un montant de 891 millions EUR, soit 29% du total des décaissements du FED. Si globalement, les députés se disent satisfaits de l’amélioration de la transparence et de la gestion renforcée des risques dans la gestion des opérations d'appui budgétaire depuis la mise en place de la nouvelle stratégie décrite dans la communication de la Commission du 13 octobre 2011, intitulée "La future approche de l'appui budgétaire de l'Union en faveur des pays tiers", ils regrettent le manque de contrôle démocratique sur le contrôle exercé par le Parlement sur l'instrument de coopération au développement (ICD).

Les députés se disent favorables à la divulgation publique des informations relatives aux programmes d'appui budgétaire afin d'améliorer la responsabilité domestique et réciproque, y compris vis-à-vis des citoyens et appellent la Commission retarder, réduire ou annuler les décaissements lorsque le pays partenaire n'a pas respecté ses objectifs et ses engagements initiaux et lorsque les intérêts politiques et financiers de l'Union sont en jeu.

Les députés saluent l'accent accru mis par la Commission sur la lutte contre la fraude et la corruption, en particulier lors de l'évaluation du critère d'éligibilité de la gestion des finances publiques en termes d'appui budgétaire. Ils relèvent à cet égard que la corruption et la fraude constituent l'une des cinq catégories de risque identifiées par la Commission dans son cadre de gestion des risques élaboré pour les programmes d'appui budgétaire.

Les députés rappellent que le risque de détournement de l'aide subsiste. Ils réaffirment donc que les services centraux d'EuropeAid et les chefs de délégation de l'Union doivent être davantage attentifs à ces risques dans le cadre du dialogue politique et stratégique, en particulier pour mesurer la réactivité du gouvernement concerné et sa capacité à appliquer des réformes.

Aides spécifiques : les députés reviennent par ailleurs sur les aides accordées à deux pays tiers spécifiques à savoir :

1) la République démocratique du Congo (RDC) : les députés invitent la Commission et le SEAE à être davantage attentifs à équilibrer les aides entre toutes les provinces de la RDC, en particulier les plus pauvres. Ils demandent de combiner le soutien au niveau central avec les programmes au niveau provincial qui font le lien entre la décentralisation politique et territoriale, d'une part, et l'amélioration des stratégies de gestion des ressources naturelles ainsi que la réhabilitation et le développement des infrastructures, d'autre part.

Les députés demandent à la Commission et au SEAE d'insister davantage avec le gouvernement de la RDC pour :

  • la tenue d'élections démocratiques dans ce pays ;
  • renforcer la capacité des institutions nationales de contrôle ;
  • évaluer la pertinence et la crédibilité des politiques et des plans d’action du pays en matière d’amélioration de la gouvernance au regard des ressources institutionnelles et financières disponibles ;
  • centrer les objectifs sur un nombre limité de priorités ;
  • assurer un financement du FED en vue de la restructuration à long terme des organes judiciaires en RDC pour garantir l'instauration durable de l'état de droit dans ce pays ;
  • renforcer le recours à la conditionnalité et au dialogue stratégique en fixant des conditions précises, appropriées, réalistes et datées et en évaluant périodiquement leur respect.

Les députés demandent notamment à la Commission de se poser plus résolument en chef de file des États membres afin d'encourager la coordination du dialogue stratégique et de donner plus de poids à l'Union face au gouvernement de la RDC.

2) Haïti : les députés regrettent qu’en dépit des résolutions du Parlement relatives aux procédures de décharge de 2010 et de 2011, la Commission n'ait pas encore élaboré les indicateurs de résultats sur lesquels repose l'appui budgétaire en Haïti ni les évaluations des résultats obtenus par le gouvernement haïtien et sur lesquels repose la décision d'octroi de cet appui.

Ils demandent à la Commission de lui expliquer les objectifs qu'elle a fixés au gouvernement haïtien en contrepartie de l'appui budgétaire et les modalités d'évaluation de la réalisation de ces objectifs, en particulier à la lumière des récentes alertes sur la détérioration de l'état de droit à Haïti et des piètres résultats du pays par rapport aux indices internationaux de mesure de la corruption. Ils attendent de la Commission qu’elle procède à la réalisation d’une étude d'incidence générale de l'aide de l'Union à Haïti comme le Parlement le lui a déjà demandé. Les députés déplorent au passage le manque de progrès en matière d'évaluation des projets et des programmes financés par l'Union.

Coopération avec les organisations internationales : les députés rappellent la nécessité de renforcer la coopération et les contacts avec les organisations internationales sur les erreurs constatées dans les opérations qu'elles mettent en œuvre et de discuter des mesures à prendre avec elles pour éviter de telles erreurs à l'avenir. Ils encouragent toutes les mesures susceptibles non seulement pour améliorer la compréhension des méthodes de l'Union et de la Banque mondiale mais aussi pour rehausser la qualité et la fiabilité générales de la gestion du contrôle de l'utilisation des fonds fiduciaires. Á cette fin, la méthode d'évaluation à sept piliers de la Commission semble être utile pour garantir un taux d'assurance suffisant.

Les députés demandent également à la Commission, lorsqu'elle finance des projets portés par des ONG, de vérifier la part du financement qui émane des fonds propres de l'organisation et celle qui émane des fonds publics nationaux et européens. Ils l'invitent notamment à rendre compte de ses conclusions dans un rapport annuel.

Facilité d'investissement : les députés rappellent que les fonds alloués à la facilité d'investissement dans le cadre du 9ème et du 10ème FED s'élevaient à 3,137 milliards EUR. Ils déplorent le fait que la facilité d'investissement ne soit toujours pas couverte par la déclaration d'assurance de la Cour des comptes ni par la procédure de décharge du Parlement. Ils demandent donc à la Cour des comptes de publier un rapport spécial sur l'efficacité des prêts extérieurs de la BEI et sur leur cohérence avec les politiques et les objectifs de l'Union en matière de développement. Ils lui demandent en outre de dissocier, dans son analyse, les garanties octroyées par le budget général de l'Union, la facilité d'investissement dotée par le FED, les diverses formes de financement mixte utilisées dans le fonds fiduciaire UE-Afrique pour les infrastructures, le fonds d'investissement de la Caraïbe et la facilité d'investissement pour le Pacifique, et l'utilisation des remboursements de ces investissements.

Visibilité de l’aide européenne : les députés estiment qu'il est impératif d'améliorer la visibilité de l'Union en projetant ses valeurs dans divers domaines d'intervention, comme la promotion des droits de l'homme et de l'état de droit, le respect des normes environnementales et sociales et le soutien du développement durable et de la croissance économique pour tous. Ils soutiennent, dans le cadre des politiques extérieures de l'Union, l'élaboration progressive de nouveaux produits financiers avec la Commission et les États membres.

Budgétisation du FED : une fois de plus, les députés déplorent que le FED n'ait pas été inclus dans le budget général dans le cadre des nouvelles règles financières applicables au budget général de l'Union européenne (règlement (UE, Euratom) n° 966/2012). Ils rappellent que le Parlement, le Conseil et la Commission ont convenu que ces règles financières seraient révisées en vue d'y inclure les modifications rendues nécessaires par le résultat des négociations sur le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, notamment concernant la question de l'inclusion éventuelle du FED dans le budget de l'Union. Ils demandent une nouvelle fois au Conseil et aux États membres d'approuver la pleine intégration du FED au budget de l'Union.

Ils soulignent au passage que la budgétisation du FED réduirait les coûts de transaction et simplifierait les exigences en matière de rapport et de comptabilité en ayant un seul ensemble de règles administratives et de structures décisionnelles au lieu de deux.

Tout en prenant note de l'engagement pris par la Commission d'inclure le FED dans le budget général au plus tard à l'expiration de l'accord de Cotonou en 2020, les députés soulignent que cette inclusion devrait avoir lieu dès que possible.