Examen à mi-parcours du programme de Stockholm

2013/2024(INI)

Le Parlement européen a adopté par 367 voix pour, 85 voix contre et 29 abstentions, une résolution sur l'examen à mi-parcours du programme de Stockholm.

I. Le programme de Stockholm et le traité de Lisbonne : rappelant que le traité de Lisbonne et la reconnaissance du caractère juridiquement contraignant de la charte des droits fondamentaux de l'UE avaient permis de renforcer la base constitutionnelle des institutions européennes, le Parlement estime qu’il conviendrait que les dérogations et les régimes spéciaux disparaissent. Il demande que la Commission et la présidence du Conseil respectent mieux l'obligation qui leur incombe d'informer directement et pleinement le Parlement européen à toutes les étapes de la procédure conduisant à la conclusion d'accords internationaux. Sachant que le recours plus large à la procédure législative ordinaire a contribué à renforcer le caractère légitime de la législation et à la rendre plus proche du citoyen, le Parlement demande que la future révision du traité supprime les dérogations existantes à la procédure législative ordinaire.

En ce qui concerne les élections, le Parlement remarque que, même en l'absence d'accord sur une procédure électorale uniforme pour les élections européennes, une convergence progressive des systèmes électoraux s'est manifestée, notamment au travers de la création de partis et de fondations politiques à l'échelle de l'Union européenne. Il encourage dès lors l'introduction de procédures plus transparentes pour la nomination de candidats, garantissant l'indépendance de ces derniers. Il réclame, par conséquent, une réforme de la procédure électorale afin d'améliorer la légitimité et l’efficacité du Parlement, conformément aux principes définis dans les traités.

II. Évaluation du programme de Stockholm et de sa mise en œuvre

Sur la question des droits fondamentaux, le Parlement rappelle les positions adoptées par le Parlement sur l'établissement d'un nouveau cadre de l'État de droit de l'Union pour renforcer la capacité de l'Union à aborder le «dilemme de Copenhague» -  qui se veut l'expression d'une situation dans laquelle l'Union demande aux pays candidats de respecter des critères élevés, mais ne dispose pas d'outils fonctionnels pour les États membres actuels - dont l'objectif doit être de veiller au respect par tous les États membres des valeurs communes inscrites à l'article 2 du traité UE aux fins de la continuité des «critères de Copenhague», et comme le Parlement l'a demandé à plusieurs reprises. Dans un amendement adopté en Plénière, le Parlement se félicite de la communication de la Commission intitulée «Un nouveau cadre de l'Union pour renforcer l'état de droit» et souhaite coopérer avec la Commission en vue de la mise en œuvre efficace de ce cadre. Il souligne néanmoins qu'il demeure nécessaire de procéder à une évaluation régulière du respect, par les États membres, des valeurs fondamentales de l'UE et rappelle que l'Agence des droits fondamentaux, les réseaux judiciaires et d'autres organismes experts indépendants devraient également contribuer à évaluer les menaces pesant sur l'état de droit au sein de l’UE.

Plusieurs autres thématiques ont été évoquées telles que : i) le manque de progrès dans la mise en œuvre des stratégies nationales d'intégration des Roms, ii) la nécessité d’adopter rapidement la proposition de directive antidiscrimination, iii) la transposition dans les temps de la directive 2011/99/UE relative à la décision de protection européenne et de la directive 2011/36/UE concernant la prévention de la traite des êtres humains, iv) le renforcement de l’équilibre entre sécurité et protection des données personnelles, en réclamant des mesures face à une opération de surveillance menaçant la sécurité intérieure de l'Union, v) la mise en place d’un processus de responsabilisation destiné à renforcer la capacité de l'Union et des États membres à prévenir les violations des droits de l'homme commises à l'échelle européenne, notamment dans le cadre des allégations de transport et de détention illégale de prisonniers par la CIA dans des pays européens, vi) l'adhésion de l'Union à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH).

En matière de coopération judiciaire en matières civile et pénale, le Parlement constate que seuls trois actes législatifs prévus dans le cadre du programme de Stockholm ont été adoptés jusqu'à présent (refonte du règlement "Bruxelles I", règlement relatif aux successions et le règlement Rome III, dont seul le tiers des dispositions est applicable aujourd'hui). Pour le Parlement, la reconnaissance mutuelle requiert la confiance mutuelle des citoyens et des professionnels du droit dans leurs institutions juridiques respectives. Il souligne la nécessité de normes communes et une bonne compréhension des autres systèmes juridiques des États membres pour renforcer la reconnaissance et la confiance mutuelles, sans pour autant mettre à mal la valeur des traditions juridiques nationales. Il appelle la Commission, suite aux demandes répétées du Parlement, à présenter une proposition de règlement sur la reconnaissance mutuelle des effets des actes d'état civil dans l'Union européenne – fondée sur une approche globale –, afin de supprimer les obstacles juridiques et administratifs discriminatoires pour les citoyens et leurs familles qui souhaitent exercer leur droit à la liberté de circulation. Il réitère en outre son appel en faveur de l'adoption d'un code européen de droit privé international.

Des améliorations sont encore réclamées dans le domaine des droits procéduraux des suspects et des accusés dans le cadre des procédures pénales, ainsi qu’une meilleure mise en œuvre du mandat d'arrêt européen. Au passage, le Parlement se félicite de la proposition de règlement du Conseil sur la création d'un Parquet européen et du renforcement d’Eurojust.

En matière de sécurité intérieure (SSI), le Parlement constate les progrès accomplis dans l'UE pour lutter contre la grande criminalité internationale organisée. Il souligne toutefois que des progrès supplémentaires s'imposent dans la lutte contre le terrorisme (radicalisation des groupes) et rappelle qu’il est désormais un acteur à part entière dans le domaine des politiques de sécurité. Il a donc le droit de participer activement à la définition des caractéristiques et des priorités de la SSI et doit jouer un rôle déterminant dans l'évaluation et la définition de ces politiques, et en assurer le contrôle.

Constatant que le "paysage" actuel des différents instruments, canaux et outils dédiés à l'échange d'informations en matière répressive est complexe et fragmenté et qu'il conduit à une utilisation inefficace des instruments disponibles, le Parlement invite à optimiser l'échange de données à des fins policières au sein de l'UE. Il rejette en même temps toute tentative de surveillance préventive en l'absence de soupçons initiaux. Il invite également la Commission à abroger la directive sur la conservation des données.

Sur la question des frontières et des visas, le Parlement rejette toute tentative, non conforme à l'acquis, visant à limiter la libre circulation des personnes. Il reconnaît que l'espace Schengen est unique en son genre et qu'une réflexion à long terme s’impose maintenant sur son évolution future. Il considère à cet égard que les frontières extérieures de l'espace Schengen devraient être contrôlées à l'avenir avec l'aide de garde-frontières européens ayant suivi une formation ad hoc. Le Parlement se félicite de la réforme du mandat de FRONTEX et de l'accord relatif à EUROSUR ainsi que des nouvelles règles de surveillance des frontières maritimes, par lesquelles la préservation de la vie des migrants et le principe de non-refoulement, sont également devenus des priorités. Il invite en outre la Commission à poursuivre l'amélioration des actuels accords de simplification des visas entre l'Union européenne et ses voisins de l'Est.

En matière d’asile et de migration, le Parlement appelle à plus de transparence, en obligeant chaque État membre à présenter chaque année un rapport sur les progrès réalisés pour chaque groupe minoritaire en ce qui concerne l'intégration sur le marché de l'emploi et les effets de la politique d'égalité. Il demande notamment un "rapport de tendance annuel", présentant la situation des nouveaux arrivants, des résidents de longue durée, des migrants naturalisés et des enfants des migrants, afin de mesurer les avancées réalisées dans les politiques d'inclusion sociale au fil du temps. Le Parlement regrette au passage la pratique persistante consistant à retenir les migrants dans des centres de rétention. Il estime que, dans le contexte du système de Dublin, la possibilité de suspendre les renvois vers les États membres en proie à des difficultés considérables doit être envisagée à l'avenir. Il s’inquiète également du sort des ressortissants de pays tiers et des apatrides réadmis dans le cadre des accords de réadmission de l'Union.

Sur la stratégie relative à la dimension externe de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (ELSJ), le Parlement rappelle que l'Union et les États membres devraient continuer à intégrer l'immigration dans la coopération au développement. Il se prononce pour une politique de retour volontaire. Il réclame par ailleurs une approche fondée sur les droits de l'homme à l'égard des politiques de l'Union en matière de migration et de gestion des frontières, et rappelle aux États membres l'application extraterritoriale de la Convention européenne des droits de l'homme.

Méthodes, outils et procédures : le Parlement propose de procéder à une évaluation ex post systématique, objective et indépendante de la législation et de sa mise en œuvre, qui permettrait d'évaluer s'il est encore nécessaire de légiférer dans ce domaine. Rappelant l’importance des évaluations d’impact dans ce contexte, le Parlement souligne l’importance du "tableau de bord de la justice dans l'UE". Il met en évidence la nécessité de renforcer la culture judiciaire européenne et insiste sur la formation pour toutes les professions juridiques dans ce domaine.

III. Prochaines étapes : le Parlement évoque enfin la nécessité d’orientations, de cohérence et de critères de référence pour l'ELSJ ainsi que sur la nécessité pour ces objectifs, d’être mis en œuvre via une programmation adéquate dans l'esprit du traité de Lisbonne, conjointement par le Parlement, le Conseil et la Commission.