Surveillance des frontières maritimes extérieures dans le cadre de la coopération opérationnelle coordonnée par l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres

2013/0106(COD)

Le Parlement européen a adopté par 528 voix pour, 46 voix contre et 88 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant les règles pour la surveillance des frontières maritimes extérieures dans le cadre de la coopération opérationnelle coordonnée par l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres.

Le Parlement a arrêté sa position en première lecture suivant la procédure législative ordinaire. Les amendements adoptés en plénière sont le résultat d’un accord négocié entre le Parlement européen et le Conseil. Ils modifient la proposition comme suit :

Sécurité en mer : il est spécifié que les mesures prises aux fins d'une opération en mer soient exécutées de façon à garantir la sécurité des personnes interceptées ou secourues, de même que celle des unités participantes ou celle de tiers. Il est en outre rappelé que la politique de l'Union relative à ses frontières extérieures doit viser à assurer un contrôle efficace du franchissement de ces dernières, y compris par la surveillance des frontières, tout en contribuant à protéger et à sauver des vies. Dans ce contexte précis, un considérant précise que le capitaine et l'équipage d’un navire ne devraient pas encourir de sanctions pénales au seul motif qu'ils ont porté secours à des personnes en détresse en mer et qu'ils les ont conduites en lieu sûr.

Respect du principe de non-refoulement : le règlement devrait être appliqué dans le plein respect du principe de non-refoulement tel qu'il est défini dans la charte et interprété par la jurisprudence de la Cour et de la Cour européenne des droits de l'homme. Conformément à ce principe, nul ne devrait être débarqué, forcé à entrer, conduit dans un pays ou autrement remis aux autorités d'un pays où il existe, entre autres, un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture, à la persécution ou à d'autres traitements ou peines inhumains ou dégradants, ou dans lequel sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son orientation sexuelle, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, ou encore dans lequel il existe un risque sérieux d'expulsion, d'éloignement ou d'extradition vers un autre pays, en violation du principe de non-refoulement.

Prise en compte de la situation du pays tiers dans lequel les personnes interceptées seraient débarquées: en cas de débarquement dans un pays tiers, dans le cadre de la planification d'une opération en mer, l'État membre d'accueil et FRONTEX devraient tenir compte de la situation générale dans ce pays tiers et les personnes interceptées ou secourues ne devraient pas être débarquées, forcées à entrer, conduites dans un pays tiers dangereux pour elles.

L’État d’accueil devrait évaluer cette situation en se fondant sur des informations provenant d'un large éventail de sources et éventuellement tenir compte de l'existence d'accords et de projets en matière de migration et d'asile mis en œuvre conformément au droit de l'Union.

Autres principes devant être observés en cas d’interception de personnes en mer :

  • information des personnes interceptées : pendant une opération en mer, et avant que les personnes interceptées ou secourues ne soient débarquées dans un pays tiers, les unités participantes devraient informer par tous les moyens, les personnes de leur destination et leur laisser la possibilité d'expliquer les raisons pour lesquelles un débarquement dans ce lieu est contraire au principe de non-refoulement ;
  • disponibilité de personnel formé : il est prévu d’envisager la disponibilité à terre de personnel médical, d'interprètes, de conseillers juridiques etc. suite à une interception. Chaque unité participante devrait au minimum compter une personne ayant une formation de base aux premiers secours ;
  • besoins des personnes vulnérables : pendant toute la durée d'une opération en mer, les unités participantes devraient tenir compte des besoins des personnes vulnérables (enfants, mineurs non accompagnés, victimes de traite des êtres humains, personnes handicapées, etc.) ;
  • protection des données : l'échange de données à caractère personnel avec des pays tiers concernant des personnes interceptées ou secourues, obtenues pendant une opération en mer, serait interdit lorsqu'il existe un risque sérieux de violation du principe de non-refoulement ;
  • dignité humaine : les unités participantes devraient respecter pleinement la dignité humaine dans l'exercice de leurs fonctions en cas d’intervention.

Plan opérationnel de l’Agence FRONTEX : en vertu du règlement (CE) n° 2007/2004 instituant l’Agence FRONTEX, les opérations de surveillance des frontières coordonnées par l'Agence devraient être menées conformément à un plan opérationnel. Ce dernier devrait contenir des informations sur l'application de la juridiction et de la législation concernées dans la zone géographique dans laquelle l'opération conjointe, le projet pilote ou l'intervention rapide a lieu, y compris le droit (européen ou international) applicable en matière d'interception, de sauvetage en mer et de débarquement.

Le pan opérationnel devrait également régir :

  • l'interception,
  • le sauvetage en mer, et
  • le débarquement dans le cadre des opérations de surveillance des frontières en mer coordonnées par l'Agence.

Il devrait en outre prévoir des procédures garantissant que les personnes ayant besoin d'une protection internationale, les victimes de la traite des êtres humains, les mineurs non accompagnés et les autres personnes vulnérables soient identifiés et qu'une assistance appropriée leur soit offerte.

Règles particulières : une série de dispositions nouvelles ont été introduites concernant :

  • la détection : les unités participantes devraient recueillir et immédiatement communiquer au centre de coordination international les informations relatives au navire intercepté, y compris, si possible, des informations sur la situation des personnes se trouvant à bord, en particulier l'existence éventuelle d'un risque imminent pour leur vie ou la présence de personnes ayant un besoin urgent d'assistance médicale ;
  • l’interception en mer territoriale : si l’interception a lieu dans la mer territoriale de l'État membre d'accueil ou d'un État membre participant voisin, il est prévu que cet État autorise les unités participantes à prendre un certain nombre de mesures s’il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'un navire transporte des personnes ayant l'intention de se soustraire aux vérifications à des points de passage frontaliers. Si ces soupçons se confirment, l’État en question pourrait autoriser les unités participantes à : i) saisir le navire et appréhender les personnes qui se trouvent à bord; ii) ordonner au navire de se dérouter afin de quitter la mer territoriale ou la zone contiguë ou de s'en éloigner ; iii) conduire le navire ou les personnes se trouvant à bord vers un État membre côtier ;
  • interception en haute mer : si ces mêmes soupçons concernent un navire se trouvant en haute mer, et sous réserve d'y être autorisées par l'État du pavillon, les unités participantes pourraient également : i) saisir le navire et appréhender les personnes qui se trouvent à bord; ii) avertir le navire et lui ordonner de ne pas pénétrer dans la mer territoriale ou la zone contiguë et, si nécessaire, demander au navire de se dérouter afin de s'en éloigner ; iii) conduire le navire ou les personnes se trouvant à bord vers un pays tiers ; iv) conduire le navire ou les personnes se trouvant à bord vers l'État membre d'accueil ou vers un État membre voisin participant ;
  • interception en zone contigüe : si l’interception survient dans la zone contiguë de l'État membre d'accueil ou d'un État membre participant voisin, les mesures prévues s’appliqueraient également à condition qu’elles soient proportionnées. Toute autorisation d’interception du navire ne pourrait être accordée qu'en vue d’empêcher la violation de lois et règlements pertinents sur le territoire ou dans la mer territoriale de cet État membre ;
  • sauvetage : les États membres devraient s'acquitter de leur obligation de prêter assistance à tout navire ou à toute personne en détresse en mer et veiller à ce que leurs unités participantes satisfassent à cette obligation conformément au droit international et dans le respect des droits fondamentaux. Cette assistance serait prêtée indépendamment de la nationalité ou du statut d'une telle personne ou des circonstances dans lesquelles cette personne est trouvée ;
  • débarquement : dans les situations de recherche et de sauvetage, l'État membre d'accueil et les États membres participants devraient coopérer avec le centre de coordination du sauvetage compétent pour trouver un lieu sûr et veiller à ce que le débarquement des personnes secourues intervienne rapidement et efficacement.

Mécanismes de solidarité : rappelant le fait que les politiques de l'Union en matière de gestion des frontières, d'asile et d'immigration et leur mise en œuvre devraient être régies par le principe de solidarité et de partage équitable de responsabilités entre États membres, il est prévu de favoriser une répartition des charges, y compris par le transfert, sur une base volontaire, des bénéficiaires d'une protection internationale. Dans ce contexte, le futur règlement prévoit un mécanisme de solidarité tel qu’un État membre confronté à une situation de pression urgente et exceptionnelle à ses frontières extérieures puisse demander:

  • le déploiement d'équipes européennes de gardes-frontières dans le cadre de FRONTEX permettant de fournir une assistance opérationnelle rapide à cet État membre;
  • à l'Agence une assistance technique et opérationnelle en vue de bénéficier d'une assistance sur les questions de coordination entre États membres et/ou le déploiement d'experts pour appuyer les autorités nationales compétentes;
  • une aide d'urgence pour faire face à des besoins urgents.

Si un État membre subit une forte pression migratoire qui sollicite de manière urgente ses installations d'accueil et son régime d'asile, ce dernier pourrait demander:

  • au Bureau européen d'asile, le déploiement d'une équipe d'appui "asile" en vue de bénéficier d'une expertise (interprétation, information sur les pays d'origine et connaissance du traitement et de la gestion des cas d'asile);
  • une aide d'urgence.

Rapport : enfin, il est prévu que FRONTEX soumette au Parlement européen, au Conseil et à la Commission un rapport annuel concernant l'application concrète du règlement. Le rapport devrait comprendre une description des procédures mises en place par l’Agence lors d'opérations en mer ainsi que des informations sur l'application concrète du règlement, y compris des informations détaillées relatives au respect des droits fondamentaux et à l'impact sur ces droits, ainsi que sur tout incident qui pourrait s'être produit.