Lutte contre le terrorisme: incrimination des infractions liées aux activités terroristes. Décision-cadre

2007/0236(CNS)

La Commission a présenté un rapport sur la mise en œuvre de la décision-cadre 2008/919/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 modifiant la décision-cadre 2002/475/JAI relative à la lutte contre le terrorisme.

En réaction aux menaces croissantes de radicalisation, de recrutement et de terrorisme, trois nouvelles infractions concernant la «provocation publique à commettre une infraction terroriste», le «recrutement pour le terrorisme» et l’«entraînement pour le terrorisme» ont été introduites par la décision-cadre 2008/919/JAI («décision-cadre de 2008»).

Le présent rapport concerne principalement les mesures que les États membres ont prises à ce jour afin de mettre en œuvre les dispositions relatives aux nouvelles infractions, notamment les infractions auxiliaires connexes et les sanctions correspondantes. Les États membres étaient tenus d’adopter et de notifier des mesures d’exécution avant le 9 décembre 2010. Le Conseil devait avoir vérifié, avant le 9 décembre 2011, si les États membres avaient pris les mesures nécessaires pour se conformer à la décision-cadre de 2008. À partir du 1er décembre 2014, la Commission sera habilitée à apprécier le respect de ses dispositions par les États membres et à ouvrir des procédures d’infraction le cas échéant.

Les principales constatations du rapport sont les suivantes :

Transposition : la plupart des États membres ont arrêté des mesures destinées à ériger en infraction la provocation publique, le recrutement et l’entraînement pour le terrorisme, même si dans certains cas, la portée des dispositions est plus limitée que prévu par la décision-cadre de 2008. La plupart des États membres ont dû arrêter des dispositions spécifiques puisque le comportement préparatoire ou virtuel n’avait pas été explicitement incriminé.  La Commission observe que deux États membres (IE et EL) n’ont pas encore transposé la décision-cadre de 2008 et les invite à adopter sans délai les mesures législatives nécessaires.

La plupart des États membres respectent largement la décision-cadre de 2008, mais plusieurs problèmes pourraient survenir, notamment concernant l’incrimination au titre des dispositions nationales relatives à la «provocation indirecte» et au recrutement d’«acteurs isolés». Les États membres sont invités à fournir à la Commission des explications et des informations supplémentaires afin de lui permettre d’achever son évaluation.

Le niveau des peines varie fortement parmi les États membres. La peine d’emprisonnement minimale s’étend de moins d’un an à 20 ans de réclusion. De même, la peine maximale varie entre deux ans et 25 ans ou l’emprisonnement à perpétuité. Les amendes peuvent être utilisées comme solution subsidiaire (DK, DE, IE, LU, NL, UK) ou venir s’ajouter à la peine d’emprisonnement (BE, IE, FR, LU, UK).

Plus de la moitié des États membres infligent la même peine pour les trois nouvelles infractions (BE, BG, CZ, EE, IE, HR, LU, HU, MT, PL, SI, SK, SE). Dans les États membres prévoyant des peines différentes pour les trois nouvelles infractions, les peines pour la provocation publique sont en général plus clémentes que pour les deux autres infractions (DK, DE, ES, IT, CY, LV, LT, PT, RO, FI, UK).

Droits fondamentaux : les débats concernant l’incidence de la législation antiterroriste sur les droits fondamentaux ont principalement porté sur l’adoption de mesures mettant en œuvre la décision-cadre de 2002 et, dans une moindre mesure, sur les nouvelles infractions. Les débats portaient notamment sur la sécurité juridique, le respect du principe de proportionnalité des sanctions pour des infractions de nature préparatoire et le conflit éventuel entre la liberté d'expression et l'infraction de provocation publique.

Si les inquiétudes liées aux droits fondamentaux peuvent jouer un rôle dans l’interprétation et l’application des dispositions nationales établissant les trois nouvelles infractions, elles ne semblent pas avoir rendu nécessaire la restriction de la portée des dispositions juridiques pertinentes en droit interne. Dans leurs notifications adressées à la Commission, les États membres n'ont pas invoqué l'article 2 ou l'article 3 de la décision-cadre de 2008 pour limiter la portée des nouvelles infractions terroristes ni confirmé les inquiétudes concernant les droits fondamentaux pour justifier l'absence de mise en œuvre des nouvelles infractions.

La Commission prend acte du fait que les parties prenantes plaident en faveur d’échanges accrus d’expériences et de pratiques entre les procureurs et les juges, et qu’elles constatent la nécessité d’intégrer les efforts en matière de répression dans une approche plus globale qui devrait inclure la prévention précoce de la radicalisation et du recrutement pour le terrorisme.

La Commission encourage les États membres à assurer un suivi et une évaluation de l’application des dispositions de droit pénal relatives au terrorisme dans la pratique. Elle souligne la nécessité de prendre en compte la protection des droits fondamentaux et d’envisager une approche politique plus large pour s’attaquer à la radicalisation et au recrutement pour le terrorisme.