Résolution sur la situation en Libye

2014/2844(RSP)

Le Parlement européen a adopté une résolution sur la situation en Libye.

Le texte adopté en plénière avait été déposé en tant que résolution commune par les groupes PPE, S&D, ECR, ALDE, Verts/ALE, Fabio Massimo CASTALDO (EFD, IT) et Ignazio CORRAO (EFD, IT).

Constatant la grave détérioration de la sécurité et de la stabilité politique, ainsi que de la situation humanitaire et des droits de l'homme en Libye ces dernières semaines, le Parlement européen condamne la montée de la violence, notamment contre la population et les institutions civiles. Il note en particulier les combats entre milices rivales, en particulier entre milices de Misrata et de Zintan, qui se sont intensifiés au cours des derniers mois, et que les batailles pour le contrôle de Tripoli et de Benghazi ont déstabilisé le pays et sa transition démocratique, avec pour conséquence une augmentation des victimes civiles, des personnes déplacées à l'intérieur du pays et des réfugiés. Au moins 100.000 Libyens auraient ainsi été déplacés à l'intérieur du pays en raison de la dernière série de combats, et 150.000 autres personnes, dont de nombreux travailleurs migrants, auraient quitté le pays.

Dans ce contexte, le Parlement invite toutes les parties au conflit armé à cesser immédiatement toute violence et à adopter un cessez-le-feu afin de mettre fin à l'escalade des souffrances vécues par la population, et à entamer un dialogue politique national, sans exclusive, pour construire un État fondé sur le respect des droits de l'homme, de la démocratie et de l'état de droit.

Le Parlement rappelle par ailleurs les attaques dirigées intentionnellement contre le personnel participant à l'aide humanitaire ou à une mission de maintien de la paix menée conformément à la charte des Nations unies et visant à protéger les civils ou les biens civils au titre du droit international des conflits armés, constituent un crime de guerre en vertu du statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI).

Sanctions : tout en rappelant la résolution 2174 du Conseil de sécurité des Nations unies, de 2014, qui étend les sanctions internationales existantes à l'encontre de la Libye, le Parlement invite la haute représentante, l'Union européenne, ses États membres et la communauté internationale en général à étudier la possibilité d'appliquer ces mesures à des individus spécifiques qui compromettent les perspectives de paix et de transition démocratique en Libye et à inscrire ensuite ces mêmes individus sur une liste, comme la communauté internationale l'avait fait pour Mouammar Kadhafi et son proche entourage.

Reconstruction du pays : les députés expriment leur soutien à la Chambre des représentants en tant qu'organe légitime émanant des élections de juin 2014. Ils invitent le gouvernement provisoire libyen, l'Assemblée élue des représentants et l'Assemblée constituante à soutenir et à entamer un dialogue politique inclusif permettant de rétablir la stabilité et de s'accorder sur les évolutions futures. Les membres de la Chambre des représentants sont également appelés à venir visiter le Parlement européen et à rencontrer ses députés nouvellement élus, afin d'établir avec eux des relations parlementaires.

Le Parlement prie également la Commission et le Service européen pour l'action extérieure (SEAE) de coordonner les actions entreprises par les États membres en Libye et de concentrer leur soutien sur le renforcement de l'État et des institutions et, en coopération avec les États membres, les Nations unies, l'OTAN et les partenaires régionaux, d'aider à la création de forces de sécurité (forces armées et forces de police) efficaces, dont le commandement et le contrôle seraient assurés au niveau national et en mesure de garantir le maintien de la paix et de l'ordre dans le pays, ainsi que de soutenir l'instauration d'un cessez-le-feu.

L’Union devrait également se fixer pour priorité d'aider à réformer le système judiciaire libyen, ainsi que d'autres domaines cruciaux pour la gouvernance démocratique.

EUBAM: le Parlement souligne que l'Union européenne a lancé une mission d'assistance aux frontières (EUBAM) en Libye qui n'a, jusqu'à présent, pas été en mesure de remplir ses objectifs d'amélioration de la sécurité des frontières du pays. Il constate que cette mission s’est révélée insuffisante et n’a pas répondu ni aux besoins du pays, ni aux problèmes de sécurité régionale, y compris celle de l'Union. Le Parlement invite, dès lors, la haute représentante à revoir le mandat de l'EUBAM de sorte à l'investir d'une nouvelle mission dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, qui tienne compte de l'évolution de la situation en Libye, notamment concernant le besoin urgent de renforcer l'État, de consolider les institutions et de réformer le secteur de la sécurité.

Pétrole: le Parlement souligne que le gouvernement central doit gérer l'exploitation et la vente de pétrole, et invite la communauté internationale à ne pas conclure de transactions avec d'autres acteurs. Il demande aux entreprises européennes ayant des activités en Libye de révéler leurs transactions financières dans le secteur de l'énergie

Acteurs régionaux: le Parlement se dit fortement préoccupé par les informations faisant état de la participation d'acteurs régionaux aux actes de violence en Libye et demande aux pays voisins et aux acteurs régionaux de : i) ne prendre aucune mesure qui risquerait d'exacerber les clivages actuels et de compromettre la transition démocratique en Libye ; ii) renforcer les contrôles à leurs frontières, notamment aux ports maritimes et aux aéroports ; iii) maintenir des inspections minutieuses de tout le fret en provenance ou à destination de la Libye.

Le Parlement demeure également préoccupé par la prolifération des armes, munitions et explosifs en Libye, qui risque de compromettre la stabilité dans le pays et de mettre en danger sa population. Il salue au passage l'hospitalité dont la Tunisie fait preuve à l'égard des centaines de milliers de citoyens libyens qui se réfugient actuellement en Tunisie pour fuir les violences.

Migration: tout en évoquant sa préoccupation face au nombre sans précédent de demandeurs d'asile et d'immigrés en situation irrégulière qui arrivent sur les côtes italiennes et maltaises en provenance, pour la plupart, du territoire libyen, le Parlement demande à l'Union européenne de donner suite aux priorités définies par le groupe de travail pour la Méditerranée et d'engager un dialogue politique sur les questions d'immigration avec le gouvernement libyen, dès que les conditions le permettront. Il regrette vivement la disparition de 500 migrants lorsque leur embarcation aurait été éperonnée par un autre navire près de Malte.

Le Parlement invite enfin l'Union européenne et ses États membres à venir réellement en aide à l'Italie et à la soutenir dans ses efforts louables visant à sauver des vies et à faire face à la spirale des flux migratoires en provenance d'Afrique du Nord, et notamment de Libye.