Le Parlement a adopté par 386 voix pour, 175 contre et 84 abstentions, une résolution sur l'incidence des évolutions des marchés européens de la défense sur les capacités de sécurité et de défense en Europe.
Préoccupé par les réductions importantes et le plus souvent non concertées des budgets de défense dans la plupart des États membres, le Parlement a souligné que la diminution des budgets de défense avait pour effet d'affaiblir le potentiel de défense des États membres et de l'Union européenne et remettait en question leur capacité d'assurer la sécurité nationale et européenne.
Ces réductions non concertées, associées aux problèmes structurels et à des pratiques déloyales et opaques, mettent l'Union européenne en péril car elles impliquent de renoncer à des atouts et à des capacités stratégiques et de se priver des possibilités que pourraient offrir la coordination des politiques de défense ainsi que la mise en commun et le partage des atouts de défense pour concrétiser la prospérité et la paix dans l'Union.
Selon la résolution, les menaces actuelles pour la sécurité concernent l'Union européenne dans son ensemble et devraient être traitées de manière unie et coordonnée, par la mise en commun et le partage des ressources civiles et militaires. Doù la nécessité de progresser vers la création d'un marché européen des équipements de défense et le développement d'une base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) compétitive, capable de créer des synergies et de fournir les capacités nécessaires à la politique de sécurité et de défense commune.
Mettant en garde contre les risques de dépendance du secteur européen de la défense vis-à-vis de l'extérieur, le Parlement a demandé qu'une attention particulière soit accordée à l'incidence de certains projets sur l'autonomie et l'indépendance de l'Union européenne, comme la coopération avec la Russie dans des domaines sensibles tels que le lancement de satellites, les fusées Soyouz ou le transport aérien stratégique.
Le Conseil européen a été invité à : i) adopter des mesures concrètes visant à supprimer le morcellement du marché européen de la défense; ii) définir des lignes directrices spécifiques pour les politiques de défense et le marché européen de la défense en vue d'améliorer sa transparence et sa compétitivité.
Nécessité d'une coopération renforcée : soulignant qu'une dépense annuelle cumulée de 190 milliards EUR dans le domaine de la défense représentait une énorme somme d'argent, les députés ont estimé que les contraintes budgétaires actuelles dans les États membres de l'Union européenne devraient être l'occasion d'intensifier et d'améliorer la coopération dans le domaine de l'achat d'équipements de défense afin de mieux utiliser l'argent des contribuables et de disposer de capacités militaires suffisantes au sein l'Union européenne ainsi que d'un système viable de sécurité de l'approvisionnement.
La résolution a insisté sur la nécessité d'une convergence accrue entre les processus nationaux de planification dans le domaine de la défense. Elle a salué, dans ce contexte, l'adoption par le Conseil du cadre d'action pour une coopération systématique et s'inscrivant dans le long terme dans le domaine de la défense. Elle a toutefois regretté sa nature non contraignante et le fait qu'il n'ait introduit aucun processus clair et structuré.
Les députés ont demandé que la priorité soit accordée à la coopération ainsi qu'au partage et à la mise en commun des initiatives et que des mesures incitatives soient mises en place à cette fin. La Commission est invitée à présenter une proposition qui précise comment des incitations fiscales n'induisant pas de distorsions du marché pourraient servir ces objectifs. Lexonération de TVA devrait être généralisée à toutes les actions de coopération de l'Agence européenne de défense.
En outre, la Commission et les États membres devraient aider les entreprises, en particulier les PME, à profiter des possibilités de financements européens pour les projets en lien avec la défense, notamment dans le cadre d'Horizon 2020, du programme COSME et des Fonds structurels et d'investissement européens.
Stratégie commune pour réduire la dépendance vis-à-vis de l'extérieur : les entreprises européennes du secteur de la défense compensent de plus en plus la réduction de leur chiffre d'affaires en Europe par des exportations hors de l'Union européenne. Le Parlement s' est inquiété des effets négatifs potentiels que cela pourrait induire, comme le transfert de technologies sensibles et des droits de propriété intellectuelle à leurs futurs concurrents ou le déplacement de la production hors de l'Union européenne, compromettant ainsi la sécurité d'approvisionnement de l'Europe.
Exposer l'Union européenne au risque que la base industrielle et technologique de défense européenne dépende de clients issus de puissances tierces aux intérêts stratégiques divergents constituerait une grave erreur stratégique selon les députés. Cest pourquoi ils ont demandé aux États membres de se conformer aux principes de la position commune et l'Union sur les exportations d'armes qui définit une approche commune du contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires permettant la coordination des systèmes nationaux de contrôle des exportations.
Exploiter les règles du marché intérieur : le Parlement a insisté sur le fait que la réalisation d'un marché unique de la défense garantirait une transparence totale et éviterait les doubles emplois, à l'origine de distorsions sur le marché. Par ailleurs, les progrès effectués en matière de recherche à double usage sont indispensables pour garantir lindépendance et la sécurité de l'approvisionnement, de lUE notamment de biens critiques.
En conséquence, les règles du marché intérieur devraient être pleinement exploitées, par le biais d'une coopération transfrontalière renforcée, pour contrer le morcellement persistant du secteur européen de la défense et de la sécurité, qui provoque une duplication des programmes d'équipements de défense et un manque de transparence dans les relations entre les administrations nationales de défense et les entreprises du secteur de la défense.
Les États membres ont été invités à supprimer les dispositions nationales qui ne respectent pas les directives 2009/43/CE et 2009/81/CE et qui font obstacle à l'existence d'un marché intérieur pour les marchés publics de la défense, et à mettre correctement en uvre la directive 2009/81/CE relative aux procédures de passation de certains marchés dans les domaines de la défense et de la sécurité et la directive 2009/43/CE relative aux transferts de produits liés à la défense.
La Commission devrait examiner, dans les rapports de mise en uvre des directives 2009/81/CE et 2009/43/CE qu'elle adressera au Parlement et au Conseil en 2016, si et dans quelle mesure leurs dispositions ont été correctement appliquées et si leurs objectifs ont été atteints, et à présenter, le cas échéant, des propositions législatives si les conclusions du rapport vont dans ce sens.