Protection internationale: mesures provisoires en faveur de l'Italie et de la Grèce

2015/0125(NLE)

OBJECTIF : instituer des mesures provisoires au profit de l’Italie et de la Grèce dans le domaine de la protection internationale, afin de permettre à ces pays de gérer efficacement les afflux actuels de ressortissants de pays tiers sur leur territoire, qui mettent leur régime d’asile sous pression.

ACTE PROPOSÉ : Décision du Conseil.

RÔLE DU PARLEMENT EUROPÉEN : le Conseil adopte l’acte après consultation du Parlement européen mais sans être tenu de suivre l'avis de celui-ci.

CONTEXTE : aux termes de l'article 78, paragraphe 3, du traité, au cas où un ou plusieurs États membres se trouvent dans une situation d'urgence caractérisée par un afflux soudain de ressortissants de pays tiers, le Conseil, sur proposition de la Commission, peut adopter des mesures provisoires au profit du ou des États membres concernés. Conformément à l’article 80 du traité, les politiques de l'Union relatives aux contrôles aux frontières, à l'asile et à l'immigration sont régies par le principe de solidarité et de partage équitable de responsabilités entre les États membres.

A la suite des récentes tragédies survenues en Méditerranée, l'agenda européen en matière de migration, la récente déclaration du Conseil européen du 23 avril 2015 et la résolution du Parlement européen du 29 avril 2015 ont reconnu le caractère exceptionnel des flux migratoires dans cette région et appelé à des mesures concrètes de solidarité à l'égard des États membres situés en première ligne.

La situation géographique de l’Italie et de la Grèce ainsi que les conflits en cours dans leur voisinage proche les rendent plus vulnérables que les autres États membres dans l'immédiat. En 2014, plus de 170.000 migrants sont entrés de manière irrégulière sur le seul territoire de l'Italie (soit une augmentation de 277% par rapport à 2013). Une augmentation constante a également été observée en Grèce où plus de 50.000 migrants sont arrivés de manière irrégulière (soit une hausse de 153 % en comparaison de 2013).

En 2014, les Syriens et les Érythréens, pour lesquels le taux de reconnaissance d'une protection internationale dans l’Union était supérieur à 75%, représentaient plus de 40% des migrants en situation irrégulière en Italie et plus de 50% en Grèce.

D'après Eurostat, 64.625 personnes ont demandé une protection internationale en Italie en 2014, contre 26.920 en 2013 (soit une progression de 143%). Une augmentation moins importante du nombre de demandes a été enregistrée en Grèce qui a recensé 9.430 demandeurs (soit une hausse de 15%).

Dans le cadre des mesures immédiates prises au titre de l’agenda européen global en matière de migration, la Commission annonçait que, pour la fin du mois de mai, elle proposerait de déclencher le mécanisme d'intervention d'urgence prévu à l'article 78, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Elle y annonçait, en outre, que cette proposition comprendrait un programme de répartition temporaire des personnes ayant manifestement besoin d'une protection internationale afin d'assurer une participation équitable et équilibrée de tous les États membres à cet effort commun.

CONTENU : la proposition fait suite à la crise touchant l'Italie et la Grèce dans le domaine de l'asile. Afin de prévenir toute détérioration supplémentaire de la situation de ces deux pays en matière d’asile et de leur apporter un soutien effectif, la Commission propose recourir, pour la première fois, au mécanisme d'intervention d'urgence prévu à l'article 78, paragraphe 3, du TFUE en vue de mettre en place un programme de relocalisation d'urgence destiné à soulager l'Italie et la Grèce.

Mesures provisoires de relocalisation : les mesures provisoires envisagées dans la proposition concernent d’abord et avant tout la relocalisation, au départ de l’Italie et de la Grèce vers les autres États membres, des demandeurs de protection internationale qui ont, à première vue, manifestement besoin d'une telle protection internationale (syriens et érythréens notamment). Les autres États membres, définis dans la proposition comme étant les «États membres de relocalisation», deviendraient responsables de l’examen de la demande de la personne à relocaliser.

Les mesures provisoires s’appliqueraient pendant une période de 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la décision.

Objectifs chiffrés : la proposition fixe des objectifs chiffrés pour les demandeurs à relocaliser au départ de l’Italie et de la Grèce, à savoir 24.000 et 16.000 respectivement, et présente dans ses annexes les deux clés de répartition qui définissent le nombre de demandeurs que ces deux États pourront respectivement relocaliser dans les autres États membres.

Le nombre total de demandeurs devant faire l'objet d'une relocalisation au départ de l’Italie et de la Grèce, soit 40.000, correspond à environ 40% du nombre total de demandeurs ayant un besoin manifeste de protection internationale qui sont entrés irrégulièrement dans ces deux pays en 2014.

Procédure de relocalisation : le champ d’application défini dans la proposition est limité à deux égards :

  1. la décision ne s’appliquerait qu’à l'égard des demandeurs qui ont, à première vue, manifestement besoin d'une protection internationale (ceux qui possèdent une nationalité pour laquelle le taux de reconnaissance moyen d'une protection internationale dans l’UE est supérieur à 75%);
  2. l'application de la décision serait restreinte aux seuls demandeurs pour lesquels l’Italie ou la Grèce devrait, en principe, être l’État membre responsable de l'examen de leur demande, conformément aux critères de prise en charge définis dans le règlement (UE) n° 604/2013.

La proposition prévoit une procédure de relocalisation simple, afin d’assurer un transfert rapide des personnes concernées vers leur État membre de relocalisation. La priorité devrait être accordée aux demandeurs vulnérables.

Autres mesures : outre la relocalisation, la proposition :

  • prévoit des mesures de soutien à l’Italie et à la Grèce à mettre en œuvre sur place dans ces pays. Plus précisément, elle envisage une intensification de l'assistance apportée par les autres États membres à l’Italie et à la Grèce, coordonnée par Bureau européen d’appui en matière d’asile (EASO) et d’autres agences compétentes;
  • impose à l’Italie et à la Grèce l’obligation de présenter à la Commission une feuille de route qui devra comporter des mesures adéquates en matière d’asile, de premier accueil et de retour, ainsi que des mesures visant à assurer une application correcte de la décision. La Commission aurait la possibilité de suspendre, dans certaines circonstances, l’application de la décision;
  • énonce des garanties et obligations spécifiques pour les demandeurs qui font l'objet d'une relocalisation dans un autre État membre (droit de recevoir des informations sur la procédure de relocalisation, droit de se voir notifier la décision de relocalisation, laquelle doit préciser l'État membre de relocalisation, droit de faire l'objet d'une relocalisation avec les membres de sa famille dans le même État membre). L'intérêt supérieur de l'enfant devrait être une considération primordiale lorsqu’il s'agit de désigner l’État membre de relocalisation.

Enfin, la proposition rappelle la possibilité pour le Conseil, sur la base d’une proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, d’adopter des mesures provisoires au profit d’un État membre autre que l’Italie et la Grèce, qui se trouverait dans une situation d’urgence semblable caractérisée par un afflux soudain de ressortissants de pays tiers.

INCIDENCE BUDGÉTAIRE : la proposition entraîne des dépenses supplémentaires à la charge du budget de l’Union, pour un montant total de 240.000.000 EUR.