Avenir du secteur laitier européen - Bilan de la mise en œuvre du "paquet lait"
La commission de l'agriculture et du développement rural a adopté un rapport dinitiative de James NICHOLSON (ECR, UK) sur l'avenir du secteur laitier européen: bilan de la mise en uvre du «paquet lait». Le «paquet lait» est entré en vigueur le 3 octobre 2012 et s'applique jusqu'au 30 juin 2020. Les quotas laitiers expireront le 31 mars 2015.
Rappelant le rôle important de l'élevage laitier en termes d'aménagement du territoire, d'emplois en zone rurale et de développement économique, environnemental et social de nombreuses régions agricoles européennes, le rapport souligne que les questions soulevées dans le «paquet lait» demeurent des obstacles à un marché du lait durable, compétitif et équitable et à des revenus justes pour les exploitants producteurs laitiers.
Les petits agriculteurs sont particulièrement vulnérables à la fragilité de la production, à la volatilité des prix des produits laitiers de base, ainsi qu'aux coûts des intrants et de l'énergie. Les producteurs européens sont confrontés aux coûts élevés des facteurs de production, tels que les aliments pour animaux, et leur compétitivité par rapport aux producteurs de pays tiers diminue.
Impact de l'embargo russe et la crise actuelle dans le secteur laitier : l'embargo russe sur les produits laitiers européens depuis août 2014 a eu un effet négatif sur le marché intérieur de l'Union, montrant la nécessité d'être préparés à appliquer des mesures de marché en situation de crise.
Les députés demandent à la Commission d'intervenir, en introduisant des mesures de marché ciblées supplémentaires, face à la crise qui touche actuellement les marchés laitiers nationaux, du fait de la pression à la baisse imposée sur les prix qui résulte de l'absence d'instruments adéquats de prévention de la crise, d'une baisse de la demande mondiale, de la volatilité des prix au niveau mondial et de l'embargo russe.
Défis et perspectives pour le secteur laitier : les perspectives à moyen et long terme pour le secteur laitier sur les marchés nationaux et sur le marché mondial restent floues. Dans ce contexte, les députés insistent sur l'importance d'encourager la recherche et l'innovation pour permettre à tous les producteurs et entreprises de la filière d'adapter leurs outils et leurs techniques de production pour répondre aux attentes économiques, environnementales et sociales.
La Commission est invitée à :
- prévoir de nouveaux types de financements pour les États membres, y compris en utilisant les aides de la Banque européenne d'investissement (BEI), pour réformer le secteur laitier;
- envisager des mesures destinées à atténuer les risques liés à une plus forte exposition au marché mondial, renforcer sa surveillance du bon fonctionnement du marché unique du lait et des produits laitiers et établir un plan d'action montrant comment elle compte atténuer ces risques.
Régions défavorisées, montagneuses, insulaires et ultrapériphériques : le rapport souligne l'importance de créer dans les régions ultrapériphériques (RUP) un mécanisme de transition entre la fin des quotas et la libéralisation des marchés, afin de protéger les producteurs et le secteur dans ces régions. Il demande en outre que des filets de sécurité puissent être activés en fonction d'indicateurs spécifiques aux exploitations et entreprises laitières de montagne.
Dans ces régions, l'utilisation de chaînes courtes d'approvisionnement, privilégiant la production locale devrait être encouragée afin de garantir la continuité de la production dans ces régions et d'éviter l'abandon du secteur. Les députés proposent d'octroyer des ressources supplémentaires au programme POSEI de façon à aider les producteurs laitiers à s'adapter aux effets produits par la déréglementation des marchés et à leur permettre de maintenir une production laitière viable et compétitive par rapport au reste de l'espace européen.
Volatilité des prix et fin des quotas laitiers : les députés recommandent le maintien des décisions précédentes concernant les quotas laitiers afin d'éviter une instabilité accrue du marché. Ils demandent à la Commission de présenter un ou plusieurs outils de régulation permettant de prévenir et gérer efficacement de nouvelles crises dans le secteur laitier, en facilitant notamment l'organisation de la production laitière en termes de gestion de l'offre.
Mise en uvre du «paquet lait» : les députés invitent la Commission à analyser les obstacles à la mise en uvre du paquet lait et les mesures qui permettraient d'assurer une utilisation optimale des outils mis à la disposition des États-membres. Déplorant les faibles niveaux de mise en uvre des contrats obligatoires, ils demandent par conséquent de les étendre à tous les États membres. Ils recommandent également l'adoption par la Commission d'objectifs clairs en ce qui concerne les organisations de producteurs, les contrats et les négociations collectives.
Rôle des organisations de producteurs : regrettant le peu de progrès accomplis au niveau de la création d'organisations de producteurs, notamment dans les nouveaux États membres, les députés estiment que les normes de reconnaissance des organisations de producteurs devraient être renforcées pour augmenter plus efficacement l'influence des producteurs dans la négociation des contrats. Ils appellent à développer, au niveau de l'Union et des États membres, d'autres mesures incitatives afin que les organisations de producteurs puissent bénéficier d'une aide financière au titre du deuxième pilier de la PAC (développement rural).
Autres recommandations : le rapport insiste, entre autres, sur les points suivants :
- le renforcement de l'observatoire du marché du lait : les informations fournies par l'OML devraient comprendre des points actualisés sur les tendances du marché et les prix, des données sur les coûts de production et les interactions entre la production de viande bovine et de lait, la consommation, l'état des stocks, les prix et les échanges du lait importé et exporté au niveau européen;
- il conviendrait détudier le développement d'autres outils d'assurance lorsque le marché est porteur afin de lutter contre la volatilité du prix du lait et d'éviter aux entreprises laitières européennes de perdre de l'argent;
- la Commission devrait s'engager davantage en faveur de la création de nouveaux débouchés dans les pays tiers tout en tenant compte des systèmes d'appellation d'origine protégée (AOP), d'indication géographique protégée (IGP) et de spécialité traditionnelle garantie (STG) au cours des négociations commerciales;
- le secteur des produits laitiers pourrait tirer parti du développement d'initiatives de promotion sur les marchés nationaux de l'Union dans le cadre des nouvelles actions de promotion;
- le régime d'aide à la distribution de lait dans les écoles devrait être renforcé;
- la Commission devrait simplifier les règles applicables à la régulation de loffre de fromages bénéficiant d'une «AOP» ou d'une «IGP», en particulier au niveau des exigences minimales requises pour l'approbation de ces systèmes;
- la Commission devrait mettre en uvre des filets de sécurité plus efficaces et réalistes, et faire en sorte que le prix d'intervention reflète davantage les coûts réels de production et les prix réels du marché et soit mieux adapté aux variations du marché; les députés demandent donc lajustement immédiat des prix dintervention;
- de nouveaux instruments de stabilisation des revenus devraient également être envisagés, tels qu'une assurance-revenu ou la mise en uvre d'un programme de protection des marges laitières.
Enfin, les députés estiment que les pratiques commerciales déloyales limitent fortement la capacité du secteur à investir et à s'adapter, et qu'il est nécessaire de les combattre tant au niveau de l'Union européenne qu'au niveau des États membres.