Marché intérieur des services postaux

2006/0196(COD)

Le présent rapport de la Commission précise comment la troisième directive sur les services postaux (directive 97/67/CE, telle que modifiée par les directives 2002/39/CE et 2008/6/CE) a été mise en œuvre et comment le marché postal a évolué.

Pour rappel, la troisième directive sur les services postaux a instauré la base juridique pour l’achèvement du marché intérieur des services postaux et constitue la dernière étape législative du processus d’ouverture progressive du marché. Des dates limites ont été fixées par cette directive pour l’ouverture totale du marché, à savoir:

  • le 31 décembre 2010 dans le cas de 16 États membres (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Slovénie, Suède) et
  • le 31 décembre 2012 pour les 11 États membres restants (Chypre, Grèce, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pologne, République tchèque, Roumanie et Slovaquie).

Les principales constatations du rapport sont les suivantes :

1) Des services de livraison de colis fiables et à des prix abordables restent essentiels pour pouvoir exploiter le potentiel du marché unique numérique.

  • Les services postaux continuent de jouer un rôle vital dans l’Union européenne, même si la nature de ce rôle est en train d’évoluer en raison des nouvelles technologies qui sont à l’origine du remplacement par le courrier électronique et d’une augmentation du volume des achats en ligne.
  • La possibilité d’envoyer des lettres et des colis vers toutes les régions de l’Union européenne avec un délai de livraison spécifique et à un prix bien défini reste un facteur essentiel de cohésion sociale, économique et territoriale, et de développement du marché unique.

2) La surveillance des services de colis doit être améliorée.

  • Les autorités réglementaires nationales continuent d’exercer un rôle fondamental en soutenant et en surveillant l’application de la directive sur les services postaux et en garantissant le respect de cette dernière dans les États membres. Le groupe «ERGP», créé en 2010, a amélioré la consultation, la coordination et la coopération des autorités réglementaires nationales à l’échelle européenne.
  • Compte tenu de la baisse du volume des lettres et du nombre croissant de colis dû aux ventes par voie électronique, un renforcement de la surveillance réglementaire du marché des colis et des données plus complètes y afférentes sont nécessaires pour obtenir un aperçu complet et précis des marchés postaux et de colis.

3) Un service universel fiable et abordable est en place en ce qui concerne la poste aux lettres.

  • Tous les États membres, à l’exception de l’Allemagne, ont officiellement désigné l’opérateur postal national en titre comme «prestataire du service universel». En Allemagne, l’opérateur postal national historique agit en tant que prestataire du service universel.
  • La grande majorité des lettres adressées à un destinataire situé sur le territoire national sont livrées le jour ouvrable suivant (à condition qu’elles soient envoyées dans le cadre d’un «service pour le lendemain», et non pas suivant un acheminement délibérément plus lent et moins cher), et la distribution du courrier à l’intérieur de l’Union continue de dépasser les normes de qualité prévues par la directive.
  • Entre 2012 et 2013, les prix d’une lettre de 20 g ont augmenté en moyenne d’environ 5,6%, ce qui n’a toutefois pas eu d’incidence notable sur l’accessibilité économique de ce service aux citoyens de l’UE. De plus l’ensemble des États membres veillent à ce que tous les prestataires de services postaux aient une procédure transparente, simple et peu coûteuse pour traiter les réclamations des utilisateurs, et la plupart des prestataires du service universel ont un système de compensation.

4) Nécessité d’informations exactes et comparables sur les coûts nets du service universel.

  • Dans le cas où la prestation du service universel au sein d’un État membre engendre un coût net créant une charge financière inéquitable pour le prestataire du service universel, la directive sur les services postaux prévoit des moyens permettant de compenser le coût net lié à l’obligation de service universel qui constitue une charge financière inéquitable pour le ou les prestataires du service universel désignés. Toutefois, afin d’accorder un financement et de s’assurer que ce dernier est compatible avec les règles sur les aides d’État, les coûts doivent être calculés d’une manière comparable.

5) Développent lent de la concurrence en ce qui concerne la poste aux lettres et comportements anticoncurrentiels.

  • Malgré l’ouverture totale du marché dans l’UE en 2013, la concurrence sur les marchés de la poste aux lettres a mis du temps à se développer dans la plupart des États membres et les prestataires du service universel ont conservé la majorité des parts de marché dans les États membres. Sur les quinze États membres qui ont complètement ouvert leur marché avant 2011, huit présentaient plus de 5% de concurrence sur le marché de la poste aux lettres en 2013 (données en volumes).
  • La concurrence développée sur le marché de la poste aux lettres concerne surtout les services de livraison de bout en bout proposés par des opérateurs ayant créé leur propre réseau de distribution leur permettant de livrer directement aux destinataires.
  • Dans plusieurs États membres, les autorités nationales de la concurrence ont condamné le prestataire du service universel en raison d’un comportement anticoncurrentiel sous la forme d’un abus de position dominante. Les affaires en question mettent en jeu notamment des remises illicites accordées à la clientèle commerciale, une compression des marges et des prix d’éviction.
  • L’entrée sur le marché et le développement de la concurrence peuvent également être découragés par certaines pratiques réglementaires, telles que l’imposition de conditions d’octroi de licence pour les nouveaux entrants.

6) La diminution du nombre de lettres envoyées et leur remplacement par le courrier électronique.

  • Le nombre de lettres envoyées par l’intermédiaire des prestataires du service universel dans l’UE a diminué, passant d’environ 107,6 milliards de lettres en 2008 à 85,5 milliards en 2013. Le recul a atteint jusqu’à 4,85% entre 2012 et 2013 (en volume) dans l’UE-28. Les États membres disposant de marchés de la poste aux lettres plus matures ont connu la plus forte baisse, et ce processus devrait se poursuivre.
  • Même si la diminution du volume de lettres dans les marchés postaux moins développés est plus faible en termes relatifs, elle est néanmoins susceptible d’entraîner des incidences notables, compte tenu des économies d’échelle de plus petite taille par rapport à celles des marchés plus matures.

7) Les colis sont un secteur en croissance, mais les consommateurs et les détaillants en ligne se plaignent de la qualité et du coût des livraisons transfrontières.

  • La taille du marché européen des colis a été estimée à une valeur de 60 milliards EUR pour les marchés européens combinés du courrier rapide, des colis et de l’express en 2010; 47 milliards EUR en 2011 (y compris les envois jusqu’à 2 500 kg) ; et 53,5 milliards EUR en 2014. Le nombre de colis par habitant diffère cependant considérablement selon les États membres.
  • La concurrence semble s’être développée plus largement sur le marché des colis que sur le marché de la poste aux lettres et es opérateurs de l’express tels que UPS, DHL, TNT et FedEx développent de façon croissante leurs services d’entreprise à consommateur.
  • Toutefois, des préoccupations subsistent en ce qui concerne le caractère abordable, l’accessibilité et la disponibilité des services de livraison transfrontière de colis: l’absence de certaines options de livraison (telles que les informations de suivi et de traçage), le manque de transparence relatif aux prix et les prix élevés font partie des plaintes les plus fréquemment formulées à la fois par les consommateurs et les détaillants en ligne.
  • La Commission a lancé une consultation publique visant à recenser des solutions permettant d’améliorer la livraison transfrontière de colis et déploiera une série de mesures au cours du premier semestre 2016 afin d’améliorer la transparence des prix et la surveillance réglementaire.

8) Diminution d’emploi chez les prestataires universels et conditions de travail plus variées.

  • Les chiffres de l’Union postale universelle font apparaître que l’effectif total des prestataires du service universel a diminué d’environ 250.000 personnes entre 2008 et 2013. L’emploi par les prestataires du service universel a reculé d’en moyenne 4,4% dans les 28 États membres entre 2012 et 2013.
  • Dans de nombreux cas, la modernisation a été gérée de manière socialement responsable, conjointement avec les syndicats, et un recours aux départs à la retraite anticipée et aux départs volontaires a permis de limiter le nombre de licenciements.
  • On constate cependant une augmentation importante du nombre de travailleurs à temps partiel dans certains États membres ainsi qu’une tendance générale à l’utilisation de contrats de travail plus flexibles.

En conclusion, la Commission estime que le marché postal continue d’évoluer rapidement et qu’un suivi permanent ainsi qu’une analyse approfondie de l’ensemble du marché postal et des effets du cadre réglementaire sont nécessaires. Elle publiera des statistiques une fois par an à partir de 2016 afin de rendre compte régulièrement de l’évolution des marchés de la poste aux lettres et des colis dans l’Union européenne.