Accord-cadre global de partenariat et de coopération UE/Viêt Nam

2015/2096(INI)

Le Parlement européen a adopté par 475 voix pour, 64 voix contre et 95 abstentions, une résolution contenant une proposition de résolution non législative sur le projet de décision du Conseil relative à la conclusion, au nom de l'Union européenne, de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et le Viêt Nam, d'autre part.

Le Parlement rappelle que cet accord vise à établir un partenariat moderne, diversifié et intéressant pour les deux parties, fondé sur les intérêts et principes communs que sont l'égalité, le respect mutuel, l'état de droit et les droits de l'homme. Il précise que l'Union européenne est le plus grand marché d'exportation du Viêt Nam et son plus grand pourvoyeur d'aide au développement (le budget européen augmentera à cette fin de 30% pour atteindre 400 millions EUR d’ici 2020).

Un accord favorable : le Parlement se félicite de la conclusion de cet accord et souligne l'importance stratégique majeure du Viêt Nam pour l’UE. Le futur accord aura ainsi un impact important pour le commerce et les investissements dans un pays qui a quasiment doublé son PIB par habitant depuis 2010.

Droits de l’homme : si l’essor économique du Viêt Nam ne fait aucun doute avec la mise en œuvre de l’accord, le Parlement espère qu’il aura aussi un impact favorable sur le respect des principes démocratiques et des droits de l'homme. Il accueille avec satisfaction la décision des autorités vietnamiennes de lever le régime de visas pour les citoyens de 5 pays européens et estime que cette décision dynamisera la coopération dans le secteur du tourisme.

Il se réjouit de la mise en place du plan directeur annoncé par le premier ministre concernant la mise en œuvre des recommandations de l'examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l'homme (CDH) des Nations unies, ainsi que de la stratégie sur les réformes judiciaires qui devrait être achevée d'ici à 2020.

Il encourage l'Union à poursuivre son soutien au renforcement de la capacité du Viêt Nam à promouvoir le respect d'une bonne gouvernance et l'État de droit et à lutter contre la corruption. Il demande à la Commission d'analyser en étroite collaboration avec le Parlement, les éventuelles violations des droits de l'homme afin de garantir le bon contrôle de l'application de l'accord global de partenariat et de coopération. Toutefois, contrairement à la position de sa commission au fond, la Plénière ne demande pas la création d'un instrument de surveillance des évolutions relatives aux droits de l'homme dans le cadre des négociations sur l'accord de libre-échange. Il escompte toutefois que cet accord contribuera au renforcement des droits de l'homme au Viêt Nam. Le Parlement prie également la vice-présidente/haute représentante de s'assurer que les politiques poursuivies par l'UE et ses États membres dans le cadre de la mise en œuvre de l'accord contribueront à faire progresser le respect des droits de l'homme et permettra d'améliorer le règlement des plaintes déposées par les individus et les communautés. Il invite notamment le gouvernement vietnamien à renforcer le rôle de la société civile grâce à la participation des associations et des ONG au développement politique, économique et social du pays.

Parallèlement, le Parlement déplore que le nombre de prisonniers dans le couloir de la mort soit estimé à plus de 500 personnes et exhorte le gouvernement vietnamien à imposer un moratoire immédiat sur les exécutions. Il demande en outre la ratification du Statut de Rome sur la Cour pénale internationale par le Viêt Nam.

Prostitution enfantine : le Parlement relève, avec inquiétude, que le Viêt Nam est l'un des pays d'où proviennent la plupart des victimes de la traite des êtres humains (notamment, de très nombreux enfants, tout particulièrement des garçons, qui ne sont pas protégés par la loi contre les abus sexuels). Il appelle dès lors le Viêt Nam à élaborer des lois solides et efficaces en matière de protection des enfants, quel que soit leur sexe. Il demande à la Commission d'aider le pays à renforcer ses capacités dans le domaine des politiques migratoires et de la lutte contre la traite des êtres humains et le crime organisé et à veiller à l'application pleine et entière des principales dispositions de protection prévues dans la stratégie de l'Union en vue de l'éradication de la traite des êtres humains.

Il salue au passage le rôle du Viêt Nam en matière de droits des LGBTI.

Sur la question des droits des travailleurs, le Parlement prend acte du fait que le secteur de l'habillement et du textile, qui emploie plus de deux millions de travailleurs, est celui qui exporte le plus au Viêt Nam. Or, ce secteur manque cruellement de mécanismes permettant aux travailleurs de défendre leurs droits. Il appelle dès lors ce pays à ratifier la convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection des droits syndicaux et de la convention n° 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective de l'OIT.

Le Parlement demande par ailleurs:

  • le respect du droit à la liberté d'expression, d'association et de réunion;
  • le respect de la liberté de culte (pour les bouddhistes, les adeptes des cultes Hoa Hao et Cao Dai, et les chrétiens);
  • la lutte contre l'accaparement des terres;
  • des mesures de lutte contre le VIH/SIDA.

Le Parlement exhorte en outre les autorités vietnamiennes à enquêter minutieusement sur les abus dont sont victimes les journalistes, les blogueurs et les lanceurs d'alerte et insiste sur la mise en place de stratégies de lutte contre la corruption.

Développement durable et respect de l’environnement : le Parlement se réjouit de l'intégration dans le futur accord de libre-échange d'un chapitre sur le commerce et le développement durable, qui contient des engagements concernant les normes fondamentales de droit du travail et les conventions de l'OIT et la gestion durable des ressources naturelles.

Il s’inquiète des atteintes à l'environnement au Viêt Nam, notamment en ce qui concerne la pollution, la déforestation et les activités minières non durables qui détruisent des régions entières. Il appelle le gouvernement vietnamien à introduire des mesures visant à garantir l'application effective de la législation afin de protéger l'environnement et la biodiversité et appelle la Commission à soutenir le renforcement des capacités à cet effet.

Le Parlement relève que le ministère des ressources naturelles et de l'environnement a adopté une stratégie d'adaptation au changement climatique. Il souligne l'engagement du pays dans le développement de la biomasse et de l'énergie solaire et se félicite que le programme d'aide de l'Union (2014-2020) mette fortement l'accent sur l'énergie durable.

Parallèlement, le Parlement invite la Commission et les États membres, au vu de l'héritage sanitaire et environnemental de la guerre du Viêt Nam, à envisager la création d'un fonds d'aide aux victimes et aux rescapés de la guerre, et à multiplier les actions, par l'envoi de missions spécialisées, visant à l'élimination des substances nocives, 40 ans après le conflit.

Il demande également au gouvernement de reconsidérer sa décision de construire et de mettre en service la première centrale nucléaire du Viêt Nam à Ninh.

Gestion des conflits : le Parlement demande à la Chine et aux pays voisins du Viêt Nam d'intensifier leurs efforts pour apaiser les tensions dans les zones contestées en mer de Chine méridionale. Il considère que la situation risque de compromettre d'importants intérêts de l'Union dans la région, pour ce qui est de la sécurité globale et de la liberté de navigation sur les grandes voies de transport maritime qui sont primordiales pour le commerce de l'Union. Il demande à la Commission ainsi qu'à la vice-présidente/haute représentante de suivre de près la situation et de défendre une solution du litige qui soit conforme au droit international.

Enfin, le Parlement souligne que, conformément à l'article 218, paragraphe 10, du TFUE, le Parlement doit être immédiatement et pleinement informé à toutes les étapes de la procédure relative à l'accord global de partenariat et de coopération : cela devrait comprendre la fourniture d'informations écrites détaillées sur les objectifs poursuivis par les actions et les positions de l'Union, en particulier sur l'évolution de la situation des droits de l'homme, de la liberté d'expression et de l'état de droit dans le pays. Il souligne à cet égard le rôle fondamental joué par les personnes de contact de la délégation de l'UE dans la surveillance des droits de l'homme dans le pays.