Égalité des genres et émancipation des femmes à l'ère du numérique

2015/2007(INI)

Le Parlement européen a adopté par 371 voix pour, 92 contre et 80 abstentions, une résolution sur l'égalité des genres et l'émancipation des femmes à l'ère du numérique.

Les députés ont invité la Commission et le Conseil à tirer pleinement parti du potentiel que recèlent la société de l'information, les technologies de l’information et de la communication (TIC) et l'internet pour promouvoir l'émancipation des femmes, leurs droits et leurs libertés, ainsi que l'égalité entre les hommes et les femmes. Ils ont invité les institutions et les États membres de l'Union à intégrer la perspective de l'égalité hommes-femmes dans toutes les initiatives numériques.

La Commission a été appelée à : i) tirer parti de la stratégie pour le marché unique numérique en vue de faire face aux graves disparités entre les hommes et les femmes dans le secteur des TIC ; ii) prévoir, dans la prochaine stratégie pour l'égalité entre les hommes et les femmes pour la période 2016-2020, des mesures spécifiques destinées à soutenir l'intégration et la participation des femmes dans la société de l'information et à promouvoir activement les réseaux de femmes en ligne.

Les États membres devraient pour leur part établir des plans d'action pluriannuels destinés à :

  • renforcer l'accès des femmes à la société de l'information, à améliorer l'utilisation des TIC par les femmes, et à renforcer le rôle des femmes dans les secteurs des TIC,
  • stimuler les connaissances en matière de TIC chez les femmes grâce à l'enseignement et à la formation,
  • promouvoir l'emploi et l'esprit d'entreprise des femmes par l'utilisation régulière des services numériques,
  • mettre au point des contenus en ligne qui soutiennent l'égalité entre les hommes et les femmes,
  • promouvoir l'accès et l'utilisation des TIC comme outils de lutte contre la discrimination fondée sur le sexe et notamment contre la violence sexiste, et
  • promouvoir la coopération internationale, la conciliation de la vie privée et professionnelle et la conception, la mise en œuvre et la diffusion des politiques et des programmes d'égalité.

Participation : le Parlement a demandé à la Commission et aux États membres de :

  • mieux tirer parti du potentiel qu'offre la numérisation à tous les niveaux de la participation politique et de promouvoir l'intégration des femmes dans le processus décisionnel ;
  • promouvoir la numérisation en politique afin de favoriser la démocratie directe et de briser les obstacles qui empêchent les femmes et les catégories sous-représentées de s'affirmer dans les milieux électoraux et institutionnels ;
  • tirer parti du programme «L'Europe pour les citoyens» en privilégiant plus particulièrement la société civile et les organisations de femmes actives dans les domaines de la numérisation et des TIC ;
  • promouvoir la participation des femmes aux médias, notamment dans leur direction, ainsi que dans les organismes de régulation et de surveillance, afin d'amener les médias à mieux respecter l'égalité entre les hommes et les femmes et de lutter contre les stéréotypes sexistes ; à cet égard, la Commission devrait encourager la création de réseaux au sein des organisations de la société civile et des organisations de médias professionnels.

Marché du travail : selon les députés, l'arrivée d'un plus grand nombre de femmes dans le secteur des TIC serait de nature à stimuler ce marché, où des pénuries de main-d'œuvre sont prévues et où la participation égale des femmes entraînerait un accroissement annuel du PIB de l'Union d'environ 9 milliards EUR.

La Commission, les États membres et les partenaires sociaux devraient promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes dans les entreprises du domaine des TIC, les organes représentatifs et les établissements de formation, y compris pour les postes à responsabilité, suivre les progrès accomplis et partager les bonnes pratiques dans ce domaine.

La Commission et les États membres devraient, entre autres :

  • remédier à la forte sous-représentation des femmes dans le secteur des TIC, notamment aux plus hautes fonctions et au sein des conseils d'administration ; les députés ont demandé à cet égard le déblocage au Conseil de la directive sur la représentation équitable des femmes au sein des conseils d'administration ;
  • assurer la protection sociale des salariés et lutter contre les conditions de travail précaires; la Commission devrait proposer de nouveaux mécanismes de protection adaptés aux formes de travail et de carrière façonnées par le passage au numérique, en accordant une attention particulière à la situation des femmes ;
  • reconnaître tout le potentiel de flexibilité qu'offre la numérisation en ce qui concerne l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée ;
  • soutenir l'apprentissage tout au long de la vie en accordant une attention particulière aux femmes de 55 ans et plus, afin de les protéger contre l'exclusion du marché de l'emploi;
  • mettre en œuvre la recommandation de la Commission relative au renforcement du principe de l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes grâce à la transparence et à une discrimination positive permanente, de préférence par la voie législative.

La résolution a souligné l'importance de la négociation collective à tous les niveaux, en particulier dans les secteurs fortement touchés par la numérisation, afin de garantir le principe de l'égalité de rémunération pour un même emploi.

Éducation et formation : les députés ont noté que les femmes demeuraient fortement sous-représentées dans les cursus universitaires en matière de TIC, dans lesquels elles ne représentent qu'environ 20% des diplômés. De plus, la prédominance masculine de ce milieu, où la main-d'œuvre n'est constituée qu'à 30% de femmes, tend à inciter les femmes à quitter le secteur des TIC quelques années après avoir obtenu leur diplôme universitaire.

La résolution a souligné l'importance d’intégrer la dimension d'égalité entre les hommes et les femmes dans le secteur de l'éducation en promouvant la culture numérique ainsi que l'éducation et la formation des femmes et des filles dans le domaine des TIC grâce à l'intégration du codage, des nouveaux médias et des nouvelles technologies dans les programmes d'enseignement à tous les niveaux, ainsi que dans les activités périscolaires.

La Commission a été invitée accroître la visibilité des femmes en développant un projet pilote d'université européenne en ligne axée en particulier sur les TIC et le génie technique, et en lançant un programme de bourses d'études adapté aux femmes dans le domaine des TIC et des nouveaux médias.

Investissement et financement de l'entrepreneuriat : les députés ont rappelé qu’en Europe, seuls neuf développeurs sur cent sont des femmes, que 19% seulement des directeurs dans le secteur des TIC sont des femmes (contre 45% dans d'autres secteurs de services) et que les femmes représentent à peine 19% des entrepreneurs (contre 54% dans d'autres secteurs de services).

Le Parlement a demandé aux États membres et à la Commission de dégager des crédits, d'améliorer l'accès aux moyens existants et si nécessaire de mettre des fonds à la disposition des femmes entrepreneurs pour leur permettre de créer des entreprises dans le domaine des TIC et des jeunes pousses dans le secteur numérique.

La Commission devrait notamment:

  • surveiller dans le cadre de la stratégie numérique, l'intégration des questions d'égalité entre hommes et femmes et la prise en compte de ces questions sur le plan budgétaire dans le cadre des fonds de l'Union ;
  • mettre en place, en coopération avec la Banque européenne d'investissement, des programmes de soutien en faveur de l'investissement dans les TIC par l'intermédiaire des Fonds structurels et d'investissement européens, et prévoir des conditions de crédit favorables pour les entreprises du secteur des TIC, qui comptent au moins 40% de main-d'œuvre féminine.

Lutte contre la violence à l'encontre des femmes dans un monde numérique : le Parlement a invité les décideurs à répondre aux questions que pose l'utilisation des TIC et de l'internet en vue de commettre des délits, de proférer des menaces ou de perpétrer des actes de harcèlement ou de violence à l'encontre des femmes par misogynie, homophobie ou transphobie ou toute autre forme de discriminations.

Les députés ont invité les États membres à allouer les ressources nécessaires à la répression, c'est-à-dire à l'exécution des lois existantes, contre la cyberviolence, la cyberintimidation et le cyberharcèlement. Ils ont également demandé à la Commission :

  • de lutter contre le sexisme et les stéréotypes sexistes dans l'enseignement et les médias, dans le cadre de la directive refondue sur l'égalité de traitement ;
  • de présenter une stratégie européenne contre la violence fondée sur le genre, assortie d'un instrument législatif et traitant des nouvelles formes de violence contre les femmes et les filles, telles que l'intimidation en ligne, l'utilisation en ligne d'images dégradantes, la diffusion de photos et de vidéos sur des réseaux sociaux sans le consentement des personnes concernées etc.