Capacités spatiales pour la sécurité et la défense en Europe

2015/2276(INI)

Le Parlement européen a adopté par 446 voix pour, 156 contre et 71 abstentions, une résolution sur les capacités spatiales pour la sécurité et la défense en Europe.

Les députés ont rappelé que la politique spatiale était une dimension essentielle de l'autonomie stratégique dont l'UE devait se doter afin de préserver des capacités technologiques et industrielles sensibles ainsi que des capacités d'évaluation indépendantes. Ils ont souligné que le fait de disposer de capacités spatiales pour la sécurité et la défense en Europe était important, voire vital dans une multitude de situations allant d'un usage quotidien en temps de paix à la gestion des crises et à des problèmes de sécurité plus aigus, y compris la guerre à part entière. Or, la mise en place de telles capacités est une entreprise de longue haleine et le développement de capacités futures doit être programmé lors du déploiement de capacités actuelles.

Rôle des capacités et services spatiaux : les députés se sont dits convaincus de l’importance du rôle des capacités et services spatiaux pour la mise en œuvre de la politique de sécurité et de défense commune et d'autres politiques de l'Union européenne dans des domaines tels que l'action extérieure, la gestion des frontières, la sécurité maritime, l'agriculture, l'environnement, l'action pour le climat, la sécurité énergétique, la gestion des catastrophes, l'aide humanitaire et le transport.

Dans ce contexte, le Parlement a réaffirmé l'importance et la valeur ajoutée de la politique spatiale dans le cadre de la PSDC tout en estimant que l'espace devrait faire partie des politiques futures de l'Union (par exemple, des politiques en matière de sécurité intérieure, de transports, d'espace, d'énergie ou de recherche). Il a souligné l’importance :

  • d’utiliser les capacités spatiales dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et les organisations terroristes ;
  • d’améliorer l'accès aux capacités spatiales dans le domaine de la communication par satellite, de l'analyse de la situation, de la navigation de précision et de l'observation de la Terre et d’assurer l'indépendance de l'Europe en ce qui concerne les technologies spatiales critiques et l'accès à l'espace ;
  • d’utiliser les capacités satellitaires pour mieux évaluer et identifier les flux d'immigrants illégaux et les trajets qu'ils suivent et, lorsqu'ils arrivent d'Afrique du Nord, pour repérer les points d'embarquement, afin de procéder aux arraisonnements plus tôt et de sauver davantage de vies;
  • de consentir un investissement financier suffisant en vue de garantir l'autonomie de l'Union en matière d'infrastructures spatiales en se dotant des moyens nécessaires à cet effet.

Programmes spatiaux : le Parlement a rappelé que les deux programmes phares de l'Union - Galileo et Copernicus - étaient des programmes civils contrôlés par le pouvoir civil, et que c'est la nature européenne de ces programmes qui les a rendu possibles et a assuré leur succès. Il a demandé de veiller à ce que les programmes spatiaux européens mettent en place des capacités et des services spatiaux civils utiles pour la sécurité et la défense européennes, en particulier en consacrant des fonds suffisants à la recherche.

Compte tenu de l'essor actuel des programmes spatiaux à double usage de l'Union européenne, les députés ont plaidé pour une approche globale, intégrée et à long terme du secteur spatial au niveau de l'Union européenne, estimant que le secteur spatial devrait être mentionné dans la nouvelle stratégie globale de l'UE concernant les questions de politique étrangère et de sécurité.

Le Parlement a fait remarquer l'importance du service public réglementé (PRS) relevant de Galileo pour la navigation et le guidage des systèmes militaires. Il a invité la haute représentante et les États membres de l'Union à accroître leurs efforts en vue de la révision éventuelle du traité sur l'espace extra-atmosphérique de 1967 ou à instaurer un nouveau cadre réglementaire qui tienne compte des progrès technologiques et vise à éviter une course à l'armement dans l'espace. Les députés ont estimé que la capacité du PRS devrait être développée davantage dans les prochaines générations afin de répondre à l'évolution des menaces.

Besoins de l’Union et objectifs stratégiques : le Parlement a demandé à la Commission de définir les besoins de l'Union en ce qui concerne la contribution potentielle de la politique spatiale à la PSDC sous tous ses principaux aspects: lancement, positionnement, imagerie, communication, météorologie spatiale, débris spatiaux, cyber-sécurité, brouillage, manipulation des données et autres menaces intentionnelles, sécurité du segment terrestre.

Le développement des capacités spatiales européennes pour la sécurité et la défense européennes devrait poursuivre deux objectifs stratégiques clés :

·        la sécurité sur la planète par des systèmes spatiaux en orbite conçus pour surveiller la surface de la terre ou pour fournir des informations de positionnement, de navigation et de temps ou des communications par satellite, et

·        la sécurité dans l'espace extérieur ainsi que la sécurité de l'espace, à savoir la sécurité en orbite et dans l'espace par des systèmes de surveillance de l'espace à la surface de la terre et en orbite.

Coordination opérationnelle : la résolution a souligné que la coopération entre la Commission, le Service européen pour l'action extérieure, l'Agence du GNSS, l'Agence européenne de défense, l'Agence spatiale européenne et les États membres était cruciale pour améliorer les capacités et services spatiaux européens. L'Union devrait dès lors coordonner et appuyer cette coopération au moyen d'un centre spécifique de coordination opérationnelle.

Entre autres recommandations, le Parlement a également suggéré :

  • de promouvoir l'innovation spatiale et de la recherche en matière de sécurité et de défense et d’élaborer des technologies de mégadonnées innovantes pour utiliser le plein potentiel des données spatiales pour la sécurité et la défense ;
  • d’élargir les diverses initiatives diplomatiques de l'Union dans le domaine de l'espace, dans un cadre tant bilatéral que multilatéral, afin qu'elles contribuent à une plus grande institutionnalisation de l'espace ;
  • de mettre en place un programme permanent et d’exploiter la valeur ajoutée européenne de l'Agence européenne de défense (AED) pour les communications militaires par satellite également ;
  • de remédier à tout retard technologique potentiel afin de faciliter la coopération UE - États-Unis concernant les capacités et services spatiaux de l'avenir ;
  • de renforcer la coopération entre l'Union européenne et l'OTAN dans le domaine de la sécurité et de la défense, y compris en ce qui concerne les capacités et services spatiaux ;
  • de continuer à faciliter l'établissement d'un code de conduite international pour les activités menées dans l'espace extra-atmosphérique tout en empêchant toute militarisation de l'espace ;
  • de faire en sorte que la surveillance de l'espace ou la météorologie spatiale, la communication par satellite, le renseignement électronique et les alertes rapides puissent bénéficier d'une plus grande coopération entre les secteurs public et privé et d'un soutien additionnel au niveau de l'UE ; 
  • d’évaluer comment répondre à la nécessité opérationnelle de données d'observation terrestre à très haute résolution au titre du programme Copernicus ;
  • de poursuivre le développement des propres capacités de l’UE en matière de  surveillance de l'espace et du suivi des objets en orbite (Space Surveillance and Tracking - SST) ;
  • d'élaborer des politiques et des capacités de recherche afin de fournir des applications futures et de développer une industrie européenne compétitive, capable de succès commerciaux fondés sur un environnement économique sain ;
  • d’établir des cadres politiques et réglementaires afin de donner à l'industrie un nouvel élan et des incitations à poursuivre le développement technologique et la recherche sur les capacités spatiales.

Le Parlement s’est félicité du processus et des projets de développement de nouveaux lanceurs européens Ariane 6 et VEGA, jugeant la mise au point de ces lanceurs cruciale pour la viabilité et l'indépendance à long terme des programmes spatiaux européens. Il a également noté l'importance stratégique d'un accès indépendant à l'espace et la nécessité d'une action de l'Union en la matière, notamment en ce qui concerne la sécurité et la défense.

Enfin, les députés ont souligné que la création, à terme, d'un cadre juridique permettant des investissements soutenus au niveau de l'Union européenne dans les capacités de sécurité et de défense pourrait favoriser une coopération européenne plus intense et plus systématique en matière de défense afin d'assurer la disponibilité des capacités essentielles.