Lutte contre la criminalité organisée. Décision-cadre
La Commission a présenté un rapport fondé sur larticle 10 de la décision-cadre 2008/841/JAI du Conseil relative à la lutte contre la criminalité organisée.
La décision-cadre est principalement axée sur lincrimination des infractions relatives à la participation à une organisation criminelle (article 2 de la décision-cadre) en se fondant sur les définitions d«organisation criminelle» et d«association structurée». Son champ dapplication devrait donc englober les infractions généralement commises dans le cadre dune organisation criminelle. Il devrait également prévoir des sanctions correspondant à la gravité de ces infractions commises par des personnes physiques et morales.
Le présent rapport évalue les mesures de transposition nationales de la décision-cadre de manière distincte pour les États membres qui fondent leur législation sur une infraction autonome telle que visée à larticle 2, d'une part, et pour les États qui adoptent des approches différentes, d'autre part. Il ninclut pas le Royaume-Uni qui a exercé son droit de se retirer de cet instrument, lequel ne sapplique plus à ce pays depuis le 1er décembre 2014.
Laperçu de la transposition de la décision-cadre dans les États membres révèle plusieurs divergences, qui peuvent être imputées, dans une large mesure, aux différentes traditions juridiques des États membres.
Infractions relatives à la participation à une organisation criminelle : la Commission estime que la décision-cadre ne réalise pas le rapprochement minimal requis en ce qui concerne la direction d'une organisation criminelle et la participation à celle-ci, basé sur un concept unique dune telle organisation.
Ainsi, la Commission considère que la décision-cadre permet aux États membres de ne pas introduire le concept dorganisation criminelle, mais de continuer à appliquer le droit pénal national existant, en recourant aux règles générales relatives à la participation à des infractions spécifiques et à la préparation de ces dernières. Cela risque de créer dautres divergences dans la mise en uvre concrète de la décision-cadre.
Si la plupart des États membres ont défini des infractions autonomes relatives à la participation à une organisation criminelle, conformément à larticle 2, deux États membres (le Danemark et la Suède) ne l'ont pas fait.
Tous les États membres qui prévoient une infraction autonome couvrent la participation à une organisation criminelle [article 2, point a)], tandis que certains dentre eux couvrent également lassociation de malfaiteurs dans le cadre de la criminalité organisée [article 2, point b)]. Aucun État membre na choisi dincriminer de façon distincte une telle association [article 2, point b)].
Plusieurs États membres vont au-delà des exigences minimales : certains dentre eux ont élargi leurs dispositions nationales en ne mentionnant pas tous les éléments de la définition de la criminalité organisée, comme le critère de la recherche dun avantage ou la portée des infractions principales, par exemple. En conséquence, la réglementation nationale sapplique à un plus grand nombre dinfractions, par exemple à celles qui nont pas nécessairement été commises pour obtenir un avantage (ou du moins lorsque cet avantage ne doit pas être démontré) ou à celles dont le champ dapplication va au-delà de celui dune infraction grave.
Outre les infractions visées à larticle 2, de nombreux États membres prévoient des mesures dont la décision-cadre ne fait pas mention, comme des infractions parallèles concernant certains types de groupes organisés qui se définissent par leur objectif ou leur mode opératoire.
Responsabilité des personnes morales (article 5) : tous les États membres (excepté Chypre) ont adopté des dispositions législatives concernant la responsabilité pénale ou non pénale des personnes morales impliquées dans des infractions relatives à la participation à une organisation criminelle.
Tous les États membres prévoient des dispositions ayant trait à la responsabilité des infractions commises pour le compte dune personne morale par une personne qui la représente, mais seuls quinze dentre eux font expressément mention de la responsabilité pour défaut de supervision ou dencadrement de la part dune personne ayant rendu possible la commission de linfraction en question.
De plus, tous les États membres disposent dune définition de la «personne morale» et reconnaissent que la responsabilité des personnes morales est sans préjudice de lengagement de poursuites pénales à lencontre des personnes physiques auteurs ou complices de linfraction.
Sanctions : le rapport note que les niveaux des sanctions de base sont plus élevés que ceux prévus par la décision-cadre et que, dans certains cas, ils sont encore accrus en raison, par exemple, dun comportement ou dun rôle particuliers au sein de lorganisation.
Conformément à larticle 3, paragraphe 2, de la décision-cadre, les États membres veillent à ce quune infraction principale commise dans le cadre de la criminalité organisée puisse être considérée comme une circonstance aggravante dans leur système national.
En général, les législations nationales de tous les États membres se caractérisent par le principe de l'individualisation des peines, selon lequel toute sanction pénale peut potentiellement être aggravée ou atténuée en fonction de circonstances particulières, décidées au cas par cas.
Les dispositions de nature facultative ont par ailleurs été largement transposées :
- tous les États membres prévoient des circonstances entraînant une exonération de la responsabilité pénale, ou une exemption ou réduction de la peine dans le cadre de circonstances atténuantes ;
- tous les États membres (à lexception de Chypre) prévoient des amendes pénales ou non pénales pour le comportement des personnes morales dans le cadre des infractions visées. En outre, tous les États membres, excepté cinq, prévoient également des mesures autres que des amendes, comme par exemple des mesures dexclusion du bénéfice dune aide publique ou des mesures dinterdiction temporaire ou définitive dexercer une activité commerciale.
Conclusions : la Commission estime que de nombreux points pourraient nécessiter des éclaircissements supplémentaires en vue de la bonne mise en uvre de la décision-cadre. Il s'agit principalement i) du champ dapplication potentiellement limité de la définition dune organisation criminelle, ainsi que ii) de la transposition correcte de larticle 5 relatif à la responsabilité des personnes morales.
Conformément au programme européen en matière de sécurité, la Commission offrira son soutien aux États membres pour atteindre un niveau satisfaisant de mise en uvre de la décision-cadre. Elle continuera également à contrôler la conformité des mesures nationales avec les instruments de lUnion.
Lévaluation tiendra également compte des éventuelles incidences des problèmes décelés sur la bonne mise en uvre de la décision-cadre. La Commission engagera des dialogues bilatéraux avec les États membres concernés et fera usage, le cas échéant, des pouvoirs dexécution qui lui sont conférés par les traités. Le présent rapport contribuera également à lévaluation de la nécessité et de lopportunité dun réexamen de la décision-cadre.