Mise en place de conditions sur le marché du travail favorisant l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée

2016/2017(INI)

La commission de l'emploi et des affaires sociales ainsi que la commission des droits de la femme et de l'égalité des genres ont adopté le rapport d’initiative conjoint de Tatjana ŽDANOKA (Verts/ALE, LV) et de Vilija BLINKEVIČIŪTĖ (S&D, LT) sur la mise en place de conditions sur le marché du travail favorisant l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée.

Les députés rappellent qu'en 2014, 5,1 millions d'enfants sont nés dans l'EU-28, ce qui correspond à un taux brut de natalité de 10,1. Par comparaison, ce taux était de 10,6 en 2000, de 12,8 en 1985 et de 16,4 en 1970. L'Union est donc confrontée à un défi démographique grave en raison de la chute constante des taux de natalité dans la plupart des États membres.

Face à un tel constat, les députés indiquent que des politiques de conciliation entre vie familiale et vie professionnelle bien conçues et bien appliquées peuvent grandement contribuer à renforcer la croissance économique, la compétitivité, la participation globale au marché du travail, l'égalité des genres, la réduction du risque de pauvreté et influencer en définitive positivement les taux de natalité dans l'UE.

La conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle, comme un droit fondamental : les députés soulignent que le principe de conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée englobe à la fois des politiques à caractère législatif et non législatif visant à promouvoir un équilibre adéquat et proportionné entre les différents aspects de la vie des citoyens. Pour les députés, la conciliation de la vie professionnelle, privée et familiale doit être garantie comme un droit fondamental pour tous,  avec des mesures applicables à tous, et pas seulement aux jeunes mères, pères ou aidants.

Les députés demandent dès lors l'introduction d'un cadre visant à garantir ce droit en tant qu'objectif fondamental des systèmes sociaux et invitent l'Union et les États membres à encourager, tant dans le secteur public que privé, des modèles de protection sociale au niveau des entreprises, permettant de faire valoir ce droit.

Pour lutter contre le problème de natalité dans l’UE, les députés appellent la Commission et aux États membres à mettre en place des politiques et des incitations positives pour soutenir le renouveau démographique, préserver les systèmes de sécurité sociale et promouvoir le bien-être et le développement des citoyens et de la société dans son ensemble. Il convient également de promouvoir des environnements de travail favorables à la famille, des plans de conciliation entre vie professionnelle et vie privée, des programmes de retour au travail, des canaux de communication entre les employés et les employeurs, et des incitations pour les entreprises et les travailleurs indépendants, en particulier pour veiller à ce que les citoyens ne soient pas économiquement pénalisés par le fait d'avoir des enfants.

Pour un train de mesures favorables à la conciliation : la commission parlementaire demande que soient envisagées des mesures législatives et non législatives relatives à la conciliation de la vie professionnelle, privée et familiale. La Commission est ainsi appelée à présenter une proposition sur ce train de mesures dans le cadre de son programme de travail 2017. Les députés insistent sur le fait que les propositions législatives devraient inclure comme base juridique l'égalité entre les hommes et les femmes.

Parmi ces mesures, devraient figurer des politiques pour soutenir les personnes les plus défavorisées ou actuellement exclues de la législation: familles monoparentales, couples non mariés, couples homosexuels, migrants, travailleurs indépendants ou "conjoints aidants", ainsi que les familles dont l'un ou plusieurs des membres souffrent d'un handicap.

L’accent devrait tout particulièrement être mis sur le bien-être et l'intérêt de l'enfant et la lutte contre la pauvreté infantile.

D’autres mesures devraient être envisagées pour garantir une prise en charge de chaque personne à chaque étape et tout au long de sa vie.

Conciliation et égalité des genres : les députés soulignent qu'un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée et renforcement de l'égalité des sexes sont essentiels pour soutenir la participation des femmes au marché du travail. Ils invitent la Commission et les États membres à élaborer des politiques de transformation et à investir dans des campagnes de sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes de genre et promouvoir un partage plus équitable des soins et des tâches domestiques.

D’autres mesures s’avèrent nécessaires pour assurer une meilleure protection contre les discriminations et les licenciements abusifs liés à l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

En outre, pour améliorer la compréhension du manque de conciliation, il importe d’obtenir des données plus fiables, comparables et complètes en matière d'égalité. Les députés demandent dès lors à la Commission de prendre des mesures pour promouvoir la collecte de telles données et renforcer la mise en place d’indicateurs pertinents dans ce domaine.

Gouvernance et conciliation : les députés considèrent qu'il est nécessaire que le personnel des autorités nationales, régionales et locales, les autorités répressives ainsi que les inspecteurs du travail bénéficient d'une formation adéquate en matière de législation et de jurisprudence anti-discrimination. Ils invitent les États membres ainsi que la Commission, à garantir que les droits sociaux accordés par les politiques publiques établissent une égalité des droits individuels et d'accès pour les femmes et les hommes, afin de permettre à chacun de jouir de ses droits et de mieux concilier vie professionnelle et vie privée.

Les femmes et les hommes, égaux dans le travail et dans la prise en charge des proches : les députés invitent les États membres à mettre en place des politiques proactives et à réaliser des investissements destinés à soutenir les femmes et les hommes qui entrent sur le marché du travail, y reviennent, y demeurent ou y progressent, après des périodes de congés liés à la famille et à la prise en charge de proches. Ils demandent également que les États membres remplacent le modèle du ménage en tant qu'unité et à individualiser l'imposition et les droits de protection sociale afin de garantir aux femmes des droits individuels et de lutter contre leur dépendance vis-à-vis de leurs partenaires ou de l'État.

Congés liés à la famille et à la prise en charge de proches : constatant le retrait par la Commission de la directive sur le congé de maternité, les députés appellent à une nouvelle version du texte ambitieuse et assortie de normes de haut niveau dans ce domaine. La Commission et les États membres devraient ainsi veiller à ce que les femmes soient payées et couvertes par une protection sociale pendant la durée de leur congé de maternité.

La Commission devrait par ailleurs proposer :

  • une directive sur le congé de paternité prévoyant un minimum de 2 semaines de congé obligatoire entièrement rémunérées;
  • une directive sur le congé pour personne à charge complétant la prestation de soins professionnels, permettant aux travailleurs de s'occuper des personnes dépendantes tout en offrant à l'aidant une rémunération et une protection sociale adéquates;
  • des normes minimales applicables dans tous les États membres afin de répondre aux besoins spécifiques des parents et des enfants adoptifs et d'établir les mêmes droits que les parents biologiques.

Prise en charge des personnes dépendantes : les députés demandent aux États membres d'envisager la possibilité d'adapter les horaires scolaires aux horaires de travail à temps plein, par l'organisation d'activités extrascolaires gratuites aussi bien après les heures d'enseignement scolaire qu'en période de vacances scolaires, et ce, afin de faciliter la conciliation réelle de la vie professionnelle, familiale et privée des travailleurs. Ils invitent également les États membres à promouvoir des politiques fiscales constituant un puissant levier permettant d'améliorer l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Ils encouragent également l'emploi des femmes en introduisant un crédit d'impôt pour la prise en charge d'enfants, de personnes âgées ou autres personnes dépendantes.

Des emplois de qualité : les députés soulignent le nombre élevé de travailleurs pauvres dans toute l'Europe et le fait que certaines personnes doivent travailler plus et plus longtemps, voire combiner plusieurs emplois, pour obtenir un revenu décent. Ils soulignent que l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée doit d’abord se fonder sur les droits des travailleurs et la sécurité sur le marché du travail, ainsi que sur le droit de prendre des temps de repos sans être soumis à des exigences plus strictes en matière de mobilité et de flexibilité. Dans ce contexte, les députés soutiennent pleinement l’idée du "travail intelligent" en tant qu'approche visant à organiser le travail par une combinaison de flexibilité, d'autonomie et de collaboration, laquelle n'exige pas nécessairement du travailleur qu'il soit présent sur le lieu de travail ou dans un lieu prédéfini et lui permet de gérer ses propres heures de travail, tout en garantissant néanmoins la cohérence avec l'horaire de travail quotidien et hebdomadaire maximal fixé dans la législation et les conventions collectives.

Les députés indiquent par ailleurs qu'une durée du travail excessive et irrégulière et des périodes de repos insuffisantes constituent des facteurs majeurs d'augmentation du nombre d'accidents du travail et de maladies professionnelles, tout comme le stress et la dégradation de la santé physique et mentale.

Les députés en appellent dès lors à des mesures favorables à l’augmentation de la "qualité de vie" qui renvoie au bien-être général des individus dans une société. Dans ce contexte, ils invitent les États membres à promouvoir des mesures visant à mettre en place des systèmes de revenus minimaux appropriés permettant ainsi aux personnes de vivre dignement, de participer pleinement à la vie en société et d'assurer leur indépendance tout au long du cycle de vie.