Lutte contre la corruption et suivi de la résolution de la commission CRIM

2015/2110(INI)

La commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures a adopté un rapport d’initiative de Laura FERRARA (EFDD, IT) sur la lutte contre la corruption et le suivi de la résolution de la commission CRIM.

Dans le prolongement des recommandations présentées dans sa résolution du 23 octobre 2013 sur la criminalité organisée, la corruption et le blanchiment de capitaux, les députés demandent à nouveau l'adoption d'un plan d'action européen visant à éradiquer la criminalité organisée, la corruption et le blanchiment d'argent, qui devrait être doté des ressources financières suffisantes et de personnel qualifié pour être efficace.

Soulignant que la lutte contre la fraude, la corruption et le blanchiment d'argent devrait être une priorité de l'action politique des institutions de l'Union, le rapport formule les recommandations suivantes :

Garantir la bonne transposition des législations existantes, contrôler leur application et évaluer leur efficacité : les députés demandent à la Commission d'achever l'évaluation des mesures de transposition de ces instruments, de livrer au Parlement des informations complètes sur les résultats obtenus et, le cas échéant, d'engager des procédures d'infraction, en particulier en ce qui concerne la décision-cadre 2008/841/JAI du Conseil relative à la lutte contre la criminalité organisée et la directive 2008/99/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la protection de l'environnement par le droit pénal.

Le rapport recommande l’adhésion de l’Union européenne au groupe d’États contre la corruption (GRECO) en tant que membre effectif, ainsi que la réalisation, par la Commission, d'une étude des législations nationales les plus avancées en vue de mettre en place une législation européenne efficace et à l'avant-garde.

Priorités et structure opérationnelle : les députés appellent à une définition des priorités en lien avec les politiques européennes en matière de prévention de la criminalité, d’économie, de questions sociales, d’emploi et d’éducation, et demandent la garantie que le Parlement européen soit pleinement associé à ce processus. Ils demandent la création, au sein d’Europol, d’une unité spécialisée dans la lutte contre les groupes criminels organisés actifs concomitamment dans plusieurs secteurs.

Un cadre législatif plus solide : la Commission est invitée à prévoir des mesures réglementaires permettant de combler d'éventuelles lacunes dans la lutte contre la criminalité organisée et la corruption, et d'améliorer la coopération judiciaire transfrontalière. Les députés demandent en particulier :

  • de réviser la législation en vigueur afin de mettre en place des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives et de préciser les définitions communes des délits, y compris celui d’appartenance à une organisation ou association criminelle ;
  • de présenter une proposition législative révisée en vue de prévenir et de punir les crimes contre l’environnement.

La Commission devrait également élaborer des règles minimales relatives à la définition des délits et des sanctions dans les domaines suivants : i) définition de l’agent public, du délit de fraude et du délit de corruption ; ii) le fait pour les participants à des organisations criminelles, de profiter de la force d’intimidation de l’association et de la soumission et du silence qui en découlent pour commettre des infractions ; iii) protection des témoins et des personnes qui collaborent avec la justice en signalant des organisations criminelles ; iv) protection des lanceurs d’alerte; v) renforcement des droits des personnes soupçonnées ou poursuivies dans le cadre de procédures pénales, notamment en ce qui concerne la détention préventive ; vi) lutte contre l'exportation de matières radioactives et de déchets dangereux et le commerce illicite de la faune et de la flore.

Coopération judiciaire et policière plus efficace à l’échelle de l’Union : la Commission est invitée à lancer des actions concrètes pour une meilleure coordination européenne en matière de lutte contre la criminalité organisée, la corruption et le blanchiment de capitaux.

Les États membres devraient systématiquement introduire, utiliser et échanger toutes les données jugées nécessaires et utiles concernant des personnes condamnées pour une infraction liée à la criminalité organisée, dans les bases de données européennes existantes, et faire appel aux agences européennes Europol et Eurojust pour faciliter cet échange d'informations. Les députés insistent également sur l'urgence de créer un système plus efficace de communication et d'échange d'informations entre les autorités judiciaires au sein de l'Union.

Frapper le patrimoine des organisations criminelles : la Commission est invitée présenter une proposition législative visant à garantir la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation découlant des mesures nationales de protection patrimoniale.

Les députés demandent à la Commission et aux États membres de renforcer les mesures de l’Union en ce qui concerne notamment le dépistage, le gel et la confiscation des produits du crime, ainsi que la promotion de la gestion des biens gelés et confisqués et de leur réutilisation à des fins sociales et comme forme d'indemnisation des familles des victimes et des entreprises victimes d’usure et d’extorsion.

Prévenir l’infiltration de l’économie légale par la criminalité organisée et la corruption : les députés demandent la mise en place d’un système complet de passation de marchés en ligne dans toute l’Union, qui permettrait de réduire le risque de corruption dans le cadre des marchés publics. Ils suggèrent le recours à une « liste noire » et invitent aux États membres à créer une certification «sans lien avec la criminalité organisée» qui serait conférée aux entreprises.

En vue de prévenir le blanchiment d'argent par l'intermédiaire de structures de sociétés complexes, les États membres devraient prendre des mesures afin d'améliorer la traçabilité des transactions, afin de débusquer les filières de financement criminel et terroriste (principe consistant à «suivre l'argent»).

Le Commission et les États membres devraient exiger des contractants qu’ils dévoilent pleinement leur structure d'entreprise et les bénéficiaires ultimes avant de conclure un contrat avec eux.

Les députés jugent également nécessaire :

  • l’adoption par les États membres de mesures de prévention et de répression des activités des professionnels, établissements bancaires, fonctionnaires ou responsables politiques à tous les niveaux qui, bien qu'ils ne soient pas affiliés à une organisation criminelle, soutiennent ses activités à différents niveaux ;
  • le renforcement des dispositions législatives visant à garantir une transparence et une traçabilité accrues des flux de capitaux, en particulier dans la gestion des fonds européens.

Sur un plan spécifique, les députés recommandent entre autres :

  • de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir la contrefaçon des biens, des médicaments et des produits agroalimentaires et lutter contre ce phénomène ;
  • de s’attaquer aux liens entre le marché de la drogue et d’autres activités criminelles et à leur incidence sur l’économie et le commerce légaux ;
  • de combattre l’utilisation par les organisations criminelles des circuits légal et illégal des jeux d’argent et de hasard ainsi que le trucage de matchs afin de blanchir l’argent ;
  • de porter une attention particulière aux paradis fiscaux et aux pays qui se livrent à des pratiques fiscales opaques ou dommageables dès lors que la fraude et l’évasion fiscales coûtent mille milliards d’euros chaque année à l’Union européenne ;
  • d’élaborer un plan d'action commune pour prévenir et combattre l'activité criminelle de type organisé ou mafieux, tels que le trafic et le traitement illégal des déchets, notamment toxiques, ou la destruction du patrimoine naturel ;
  • de renforcer la législation de l’Union et la coopération entre les États membres et avec les agences de l’Union dans le domaine de la cybercriminalité ;
  • de veiller à ce que le financement et le soutien du terrorisme par l'intermédiaire de la criminalité organisée soient érigés en infraction et de mettre rapidement en œuvre le plan d'action de la Commission contre le trafic et l'utilisation illicite d'armes à feu et d'explosifs ;
  • de renforcer la coopération internationale contre les filières de passeurs afin de faire cesser le trafic d’êtres humains et de réduire le plus possible l’influence des réseaux de passeurs ;
  • de développer une stratégie de politique étrangère anticorruption pour lutter efficacement contre la corruption et la criminalité financière.

Parquet européen : les députés demandent à nouveau que soit créé un parquet européen, le plus rapidement possible et en y associant le plus grand nombre d’États membres possible, qui soit efficace et indépendant des gouvernements nationaux et des institutions de l’Union, et protégé contre les influences et les pressions politiques.