Responsabilité des entreprises dans les violations graves des droits de l'homme dans les pays tiers

2015/2315(INI)

Le Parlement européen a adopté par 569 voix pour, 54 contre et 74 abstentions, une résolution sur la responsabilité des entreprises dans les violations graves des droits de l'homme dans les pays tiers.

Contexte international : la mondialisation et l'internationalisation croissantes des activités commerciales et des chaînes d'approvisionnement vont accroître l'importance du rôle des entreprises dans la garantie du respect des droits de l'homme.

Dans ce contexte, les députés ont exprimé leur inquiétude quant aux violations des droits de l'homme commises dans des pays tiers, notamment à la suite de décisions prises par les dirigeants de certaines entreprises de l'Union. Ils ont réaffirmé la nécessité d'agir de manière continue à tous les niveaux, y compris aux niveaux national, européen et international, de façon à traiter les violations des droits de l'homme commises par des multinationales dès leur survenance.

Tout en se félicitant de l'adoption des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, le Parlement a exprimé le souhait que les représentants de l'Union défendent la mise en œuvre de ces principes et d'autres normes internationales sur la responsabilité sociale des entreprises au cours des dialogues sur les droits de l'homme menés avec les pays tiers.

Appels lancés aux entreprises : les entreprises, européennes ou non, devraient faire preuve de la diligence requise en matière de droits de l'homme et intégrer leurs conclusions dans leurs politiques et procédures internes.

Reconnaissant l'importance capitale de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), le Parlement a insisté sur le fait que respecter les droits de l'homme est une obligation morale et juridique qui s'impose aux entreprises et à leurs dirigeants et qu’il doit être intégré dans une perspective économique à long terme, quel que soit l'endroit où elles opèrent, et quels que soient leur taille ou leur secteur d'activité.

Les députés se sont félicités de ce que la Commission s'engage, en collaboration avec le Parlement et le Conseil ainsi que d'autres organismes internationaux, à parvenir à long terme à une convergence des initiatives en matière de RSE, à encourager l'échange des bonnes pratiques des entreprises en matière de RSE, ainsi qu'à promouvoir les lignes directrices de la norme ISO 26000 de l'Organisation internationale de normalisation afin de parvenir à une définition unique de la RSE au niveau mondial.

Les caractéristiques propres des PME devraient cependant être respectées et toute initiative susceptible d'entraîner des charges d'ordre administratif, bureaucratique ou financier pour les PME devrait être évitée.

Appels lancés aux États membres : le Parlement  a invité l'Union et les États membres à :

  • faire respecter les droits de l'homme contre les violations commises par des entreprises, même lorsque celles-ci opèrent dans des pays tiers ;
  • inclure explicitement le principe de respect des droits de l’homme dans tous les traités commerciaux qu'ils signent ;
  • adopter des instruments contraignants visant à protéger efficacement les droits de l'homme dans le domaine de la responsabilité des entreprises ;
  • appliquer les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme de manière rapide et stricte, dans tous les domaines relevant de leurs compétences respectives, y compris en élaborant des plans d'action ;
  • définir des règles précises énonçant clairement que les entreprises établies sur leur territoire et/ou placées sous leur juridiction sont tenues de respecter les droits de l'homme dans leurs activités, y compris en-dehors de l'Union ;
  • accorder la priorité à la mise en place du devoir de diligence en matière de droits de l'homme pour les entreprises sous le contrôle de l'État ou bénéficiant du soutien des agences de l'État ou des institutions européennes, ainsi que pour les entreprises qui fournissent des biens ou des services suite à des marchés publics ;
  • demander aux entreprises utilisant dans le cadre de la procédure législative actuelle des matières premières susceptibles d'être produites dans des zones de conflits de rendre publiques leur origine et l'utilisation qui en est faite grâce à l'étiquetage des produits, et de fournir des informations complètes sur le contenu et l'origine des produits.

Accès au recours effectif : les États membres devraient prendre les mesures adéquates pour garantir par des moyens judiciaires, administratifs, législatifs ou autres qu'en cas de violation des droits de l'homme, les victimes auront accès à un recours effectif, lorsqu'une entreprise basée dans les États concernés possède, dirige ou contrôle des entreprises responsables de violations des droits de l'homme dans d'autres pays.

Invitations adressées à la Commission : soulignant que les initiatives facultatives lancées par la Commission à l'intention du secteur privé pour des chaînes d'approvisionnement responsables n’étaient pas suffisantes, les députés ont demandé l'adoption de règles contraignantes assorties de sanctions et de mécanismes de contrôle indépendant.

La Commission a été invitée à :

  • inclure systématiquement dans les accords de commerce et d'investissement des règles concernant la responsabilité des entreprises dans les violations des droits de l'homme ;
  • présenter une proposition législative sur le contrôle des exportations de biens à double usage, sachant que des technologies produites par des entreprises européennes continuent à être à la source de violations des droits de l'homme dans le monde ;
  • établir des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontalière et concernant les violations des droits de l'homme commises par des entreprises dans des pays tiers ;
  • établir régulièrement un rapport sur les mesures prises pour assurer la protection efficace des droits de l'homme au niveau des activités des entreprises.

Le Parlement a plaidé pour la constitution d'un corpus de droit cohérent comprenant des règles régissant l'accès à la justice, la compétence, la reconnaissance et l'application des décisions de justice en matière civile et commerciale, le droit applicable et l'assistance juridique dans les affaires transfrontalières impliquant des pays tiers.

Pour sensibiliser davantage les producteurs et les consommateurs, les députés ont suggéré la création d'un label d'identification volontaire au niveau de l'Union attestant du respect des droits de l'homme. Ce label serait assorti d'un organe de suivi indépendant et doté de pouvoirs d'inspection, dont le rôle serait de vérifier et de certifier qu'aucune violation n'a été commise lors des différentes étapes de la chaîne de fabrication des produits concernés.

La Commission est invitée lancer au niveau de l'Union une campagne pour présenter et promouvoir le label attestant du respect des droits de l'homme.