Politique cohérente de l'Union européenne pour le secteur culturel et créatif
Le Parlement européen a adopté par 540 voix pour, 77 contre et 85 abstentions, une résolution sur une politique communautaire cohérente pour les secteurs de la culture et de la création.
Le Parlement souligne que les secteurs de la création en Europe fournissent plus de 12 millions d'emplois à plein temps, soit 7,5% de la main-d'uvre de l'Union, créant environ 509 milliards EUR de valeur ajoutée dans le PIB. Il précise par ailleurs que les secteurs de la culture et de la création emploient 2,5 fois plus de personnes dans l'Union que les constructeurs automobiles et 5 fois plus que l'industrie chimique.
Le Parlement invite dès lors la Commission à développer un cadre de politique industrielle cohérent et à long terme pour les secteurs de la culture et de la création et à prévoir des conditions cadres pour stimuler l'innovation ainsi que pour assurer son financement adéquat.
Des conditions-cadre pour promouvoir linnovation : le Parlement demande à la Commission de proposer un régime-cadre permettant de combler le fossé existant entre la recherche et le développement, la production européenne de contenu créatif et l'innovation technologique dans le domaine des média et au-delà. Il relève qu'un tel régime-cadre stimulera la production de services européens créatifs et compétitifs, les possibilités commerciales et professionnelles et améliorera l'accès des PME et jeunes entreprises. Il invite également la Commission à mettre en place un cadre juridique approprié, y compris le droit dauteur, pour la chaîne de valeur à l'ère numérique, qui tienne compte des particularités du secteur.
Il appelle la Commission et ses États membres à promouvoir des coopérations intersectorielles en établissant des «laboratoires dapprentissage» ou dautres espaces de travail innovants ainsi que des systèmes en réseau destinés à renforcer les interactions existants et possibles entre les PME et les grandes entreprises ainsi quentre les ONG et les entreprises commerciales.
Droits dauteur : le Parlement demande à la Commission, vu la réforme du droit d'auteur en cours, de créer des solutions juridiques équilibrées qui soient adaptées à lère numérique, y compris en partenariat avec lindustrie et les groupes de consommateurs, qui favorisent et répondent aux intérêts des PME, des très petites entreprises et des micro-entreprises, des créateurs, des titulaires de droits, des utilisateurs de droits, des travailleurs indépendants et des consommateurs afin de préciser que les exemptions de responsabilité peuvent s'appliquer uniquement aux fournisseurs de services en ligne réellement neutres et passifs et non aux services jouant un rôle actif dans la distribution, la promotion et la monétisation du contenu aux dépens des créateurs.
Rappelant le fait que la contrefaçon constituait un problème grave pour le secteur de linnovation, le Parlement appelle à plus de surveillance dans lapplication de la législation en vigueur et à l'adoption de sanctions plus strictes. Il invite la Commission à proposer des mesures efficaces de lutte contre le piratage en ligne pour s'assurer que les services en ligne qui hébergent du contenu appliquent des mesures effectives en vue de retirer les contenus sans licence de leurs services et de prendre les mesures nécessaires pour éviter leur réapparition.
Il appelle également à la création d'un système de garanties de traçabilité pour dissuader les contrefacteurs, ainsi que l'augmentation des dommages et intérêts pour les titulaires des droits.
Protection de la politique culturelle européenne : le Parlement insiste sur la nécessité d'exclure les services culturels et audiovisuels du mandat de négociation des accords de libre-échange généraux, en rappelant que les biens culturels et créatifs présentent une valeur intrinsèque double.
Digitalisation des industries culturelles et créatives : le Parlement met l'accent sur les possibilités qu'offrent les TIC, telles que le «Big Data», les systèmes en nuages (cloud computing), l'Internet des objets, pour l'économie et la société, en particulier lorsqu'elles sont intégrées à des secteurs tels que les secteurs culturels et de linnovation. Il souligne toutefois que, pour que ces dernières puissent pleinement saisir le potentiel de croissance et d'emploi des nouvelles technologies, il est urgent dachever la mise en place dun marché unique numérique.
A cet égard, le Parlement appelle à la convergence des modèles proposés de manière à créer de nouvelles opportunités, en termes de financements et daccès, et disponibilités en ligne des productions culturelles et de lhéritage culturel européen.
Conditions de travail dans le secteur culturel et créatif : le Parlement souligne à quel point les emplois dits «atypiques» (contrats à temps partiel et à durée déterminée, travail temporaire et travail en faux indépendant) sont monnaie courante dans le secteur des médias et de la culture. Il souligne également les difficultés des travailleurs de ce secteur à pouvoir profiter de la mobilité. Cest la raison pour laquelle, il invite les États membres à mettre en uvre un cadre juridique et institutionnel pour les activités créatives et artistiques à travers l'adoption ou l'application d'un nombre de mesures cohérentes et complètes relatives aux contrats, aux moyens de représentation collective, à la sécurité sociale, à l'assurance maladie, aux impôts directs et indirects et au respect de la réglementation européenne afin d'améliorer la mobilité des artistes en Europe.
Au passage, le Parlement souligne l'écart moyen de rémunération (16,1% en 2014) et de pension (40,2%) existant entre hommes et femmes dans l'Union européenne, et souligne que les femmes sont confrontées aux mêmes barrières dans les secteurs de la culture et de la création que dans d'autres secteurs économiques, en particulier en ce qui concerne l'écart de rémunération et de pension entre hommes et femmes, l'accès au financement, les stéréotypes, la formation et l'apprentissage tout au long de la vie.
Enseignement, compétences et formation : le Parlement souligne le potentiel des secteurs de la culture et de la création en matière d'emploi des jeunes et de réindustrialisation. Il invite la Commission et les États membres à inclure ces secteurs dans l'Initiative pour l'emploi des jeunes et à prévoir des financements pour faciliter l'évolution de carrière et la formation dans ces secteurs. Il invite en outre la Commission et les États membres à garantir la préservation du savoir-faire traditionnel européen en préservant et en faisant la promotion des métiers de l'artisanat liés aux secteurs de la culture et de la création, et à revaloriser la formation professionnelle et une main-d'uvre hautement qualifiée afin d'attirer les talents. Des mesures sont également réclamées pour favoriser les carrières dans ces secteurs.
Le Parlement se dit en outre favorable à la création d'un "prix européen des secteurs de la culture et de la création" conçu suivant les mêmes lignes que le "prix franco-allemand des secteurs de la culture et de la création".
Il encourage par ailleurs les États membres à prendre des initiatives telles que le "bonus culturel" lancé par le gouvernement italien, qui met 500 EUR à la disposition de tout jeune de 18 ans qui réside légalement en Italie, à dépenser uniquement pour une activité "culturellement enrichissante" telle que la visite d'un musée, d'une galerie, d'un site archéologique ou du patrimoine, des livres ou des films.
Financement : le Parlement note les succès des régimes d'allègement fiscal dans les secteurs de la culture et de la création dans certains États membres. Il encourage donc tous les États membres à instaurer de tels régimes.
Il appelle la Commission à assurer le suivi des soutiens européens à la culture et aux industries créatrices. Il note que le réexamen à mi-parcours du CFP et les rapports sur la mise en uvre des programmes européens doivent être compris comme deux composantes liées faisant partie d'un seul et même processus. Notamment en ce qui concerne le programme Europe créative, Horizon 2020 et les Fonds structurels, il conviendrait d'évaluer de manière spécifique le rôle et l'incidence des secteurs de la culture et de la création. Ce processus constituerait une base solide et cohérente pour la révision du CFP et pour l'architecture des futurs programmes de l'Union après 2020. Dans lattente, il invite la Commission à tirer pleinement parti des synergies potentielles entre les politiques de l'Union européenne, de façon à utiliser efficacement les financements disponibles dans le cadre des programmes de l'Union comme Horizon 2020, le mécanisme pour l'interconnexion en Europe, Erasmus+, Europe Créative et COSME et des Fonds structurels et d'investissement européens (Fonds ESI) pour soutenir plus de projets dans les secteurs de la culture et de la création.
En ce qui concerne Europe Créative notamment, le Parlement souligne la nécessité d'augmenter le budget de cette initiative et du mécanisme de garantie pour soutenir efficacement les expressions culturelles et créatives européennes.
Le Parlement invite en outre la Commission à conférer aux secteurs de la culture et de la création le statut de priorité horizontale dans les dispositifs de financement de l'Union, en particulier en ce qui concerne Horizon 2020 et les Fonds ESI.
Enfin, le Parlement appelle à la promotion de "protocoles de biens de propriété intellectuelle" facilitant la valorisation des droits de propriété intellectuelle, et à adopter les mécanismes nécessaires afin d'augmenter l'attrait financier des droits de propriété intellectuelle et la reconnaissance de leur valeur en tant que bien.