Pays tiers dont les ressortissants sont soumis ou exemptés de l'obligation de visa: mécanisme de suspension

2016/0142(COD)

Le Parlement européen a adopté par 485 voix pour, 132 contre et 21 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 539/2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation (révision du mécanisme de suspension).

La position du Parlement européen, adoptée en première lecture suivant la procédure législative ordinaire, a modifié la proposition de la Commission comme suit :

Suspension de l’exemption de l’obligation de visa: il est proposé que, par dérogation à l'article 1er, par. 2 du règlement (CE) n° 539/2001, l'exemption de l'obligation de visa à l'égard des ressortissants d'un pays tiers figurant sur la liste de l'annexe II du règlement soit temporairement suspendue dans les situations d'urgence, en dernier ressort, en se basant sur des données pertinentes et objectives telles que définies ci-après:

  • lorsqu’il y a accroissement substantiel du nombre de ressortissants de ce pays tiers qui se sont vu refuser l’entrée ou dont il s’avère qu’ils séjournent sur le territoire de cet État membre sans en avoir le droit;
  • qu’il y a accroissement substantiel du nombre de demandes d’asile déposées par les ressortissants de ce pays tiers pour lequel le taux de reconnaissance de ces demandes est faible (de l’ordre de 3 ou 4% maximum ou moins si la Commission l’estime applicable);
  • quand il y a baisse de la coopération en matière de réadmission avec ce pays tiers, étayée par des données suffisantes, en particulier un accroissement substantiel du taux de refus des demandes de réadmission que l’État membre a transmises à ce pays tiers pour ses propres ressortissants;
  • lorsqu’il y a accroissement des risques ou menace imminente pour l’ordre public ou la sécurité intérieure des États membres, en particulier accroissement substantiel des infractions pénales graves liées à des ressortissants de ce pays tiers, étayé par des données et des informations pertinentes, concrètes et objectives, fournies par les autorités compétentes.

Par «accroissement substantiel », il faut entendre, un accroissement excédant un seuil de 50% ou moins élevé si la Commission le juge applicable.

Avant de prendre toute décision de suspension, la Commission devra tenir compte de la situation des droits de l’homme dans ce pays tiers et des conséquences éventuelles d’une telle suspension dans ce cas concret.

Notification : la notification de suspension devra énoncer les motifs sur lesquels se fonde la décision d’exemption et devra comporter des données et statistiques pertinentes, ainsi qu’un exposé circonstancié des premières mesures que l’État membre concerné a prises en vue de remédier à la situation. Dans sa notification, l’État membre pourra préciser les catégories de ressortissants du pays tiers concernés, en indiquant les motifs précis de sa demande de suspension en en informant immédiatement le Parlement européen et le Conseil.

Décision étayée par des éléments probants : des dispositions sont prévues pour permettre à la Commission de prendre les mesures nécessaires en connaissance de cause, une fois obtenues des informations concrètes et fiables et des statistiques pertinentes sur les circonstances justifiant la décision d’exemption. A cet effet, elle devra communiquer son analyse au Parlement européen et au Conseil rapidement.

Vérification des critères de libéralisation du régime des visas avec un pays tiers : il est prévu que la Commission s’assure que les critères qui ont été utilisés pour évaluer l’opportunité d’une libéralisation du régime des visas soient toujours respectés par les pays tiers dont les ressortissants sont exemptés de l’obligation de visa pour se rendre sur le territoire des États membres.

La Commission devra faire régulièrement rapport au Parlement européen et au Conseil et ce, au moins une fois par an, pendant une période de 7 ans après l’entrée en vigueur de la libéralisation du régime des visas à l’égard d’un pays tiers donné ou par la suite si elle l’estime nécessaire ou à la demande du Parlement européen ou du Conseil. Ce rapport devra mettre l’accent sur les pays tiers pour lesquels la Commission estime que certains critères ne sont plus remplis.

Lorsqu’il ressort du rapport de la Commission qu’un ou plusieurs des critères spécifiques ne sont plus remplis pour un pays tiers donné, des mesures sont alors prises.

Modalités de mise en application de la suspension de l’exemption de visa : il est prévu que lorsque, sur la base de l’étude et l’analyse minutieuse de la situation par la Commission et tenant compte des conséquences d’une suspension de l’exemption de l’obligation de visa sur les relations extérieures de l’Union et de ses États membres avec le pays tiers concerné, la Commission décide de mesures pertinentes, celle-ci le fasse en travaillant en coopération étroite avec ce pays afin de trouver des solutions de remplacement à long terme.

Ce type de mesures pourrait également être pris lorsqu’une majorité simple d’États membres se disent favorables à une mesure de suspension.

Acte d’exécution : il reviendra alors à la Commission d’adopter un acte d’exécution portant suspension temporaire de l’exemption de l’obligation de visa à l’égard des ressortissants du pays tiers concerné pour une période de 9 mois. La suspension s’appliquera à certaines catégories de ressortissants du pays tiers concerné, en se basant sur les informations disponibles, et en tachant de remédier aux circonstances justifiant la suspension, dans le respect du principe de proportionnalité.

L’acte d’exécution sera adopté dans un délai d’un mois après réception de toutes les informations requises et conformément aux critères définis au règlement.

Cet acte d’exécution sera adopté en conformité avec la procédure d’examen et fixera la date à laquelle la suspension de l’exemption de l’obligation de visa devra prendre effet.

Pendant la période de suspension, la Commission devra établir avec le pays tiers concerné, un dialogue renforcé en vue de remédier aux circonstances en question.

Acte délégué : afin de garantir la participation appropriée du Parlement européen et du Conseil à l’application du mécanisme de suspension, étant donné la nature politique particulièrement sensible que revêt la suspension de l’exemption de l’obligation de visa pour tous les ressortissants d’un pays tiers figurant sur la liste de l’annexe II du règlement (CE) n° 539/2001 et ses implications horizontales pour les États membres, les pays associés à l’espace Schengen et l’Union elle-même, en particulier pour leurs relations extérieures et pour le fonctionnement global de l’espace Schengen, la Commission se verra déléguer le pouvoir d’adopter des actes conformément à l’article 290 du TFUE en ce qui concerne la suspension temporaire de l’exemption de l’obligation de visa pour les ressortissants du pays tiers concerné. A ce titre, la Commission devra procéder aux consultations appropriées durant son travail préparatoire, y compris au niveau des experts, et dûment informer le Parlement européen et le Conseil avant la prise de décision.

Ainsi, si les circonstances justifiant la 1ère suspension de 9 mois persistent, la Commission pourra adopter un acte délégué, au plus tard 2 mois avant l’expiration de la période de 9 mois visée ci-avant, en vue de prévoir une suspension temporaire de l’application de l’annexe II du règlement, et ce pour une période de 18 mois, pour tous les ressortissants du pays tiers concerné. L’acte délégué prendra effet à compter de la date d’expiration de l’acte d’exécution.

Cette décision pourrait être prolongée de 6 mois dans des cas particuliers visés au règlement.

Au cours des périodes de suspension, les ressortissants du pays tiers concerné seront soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres.

Le pouvoir d’adopter cet acte délégué sera conféré à la Commission pour une période de 5 ans à compter de la date d’entrée en vigueur du règlement. La Commission devra élaborer un rapport relatif à la délégation de pouvoir au plus tard 9 mois avant la fin de la période de 5 ans. La délégation de pouvoir sera tacitement prorogée pour des périodes d’une durée identique, sauf si le Parlement européen ou le Conseil s’oppose à cette prorogation 3 mois au plus tard avant la fin de chaque période.

La délégation de pouvoir pourra être révoquée à tout moment par le Parlement européen ou le Conseil.

L’acte délégué ne pourra entrer en vigueur que si le Parlement européen ou le Conseil n’ont pas exprimé d’objections dans un délai de 2 mois à compter de la notification de cet acte au Parlement européen et au Conseil ou si, avant l’expiration de ce délai, le Parlement européen et le Conseil ont tous deux informé la Commission de leur intention de ne pas exprimer d’objections.

Information du Parlement européen : avant l’expiration de la durée de validité de l’acte délégué, la Commission devra soumettra au Parlement européen et au Conseil un rapport, accompagné d’une proposition législative de modification du présent règlement en vue du transfert de la référence du pays tiers concerné de l’annexe II à l’annexe I du règlement (pays tiers soumis à l’obligation de visa).

Rapport de mise en œuvre : au plus tard 4 ans après l’entrée en vigueur du règlement modifié, la Commission devra soumettre au Parlement européen et au Conseil un rapport évaluant l’efficacité du mécanisme de suspension prévu ainsi que, si nécessaire, une proposition législative de nouvelle modification du présent règlement. Le Parlement européen et le Conseil statueraient sur cette proposition selon la procédure législative ordinaire.