Nécessité d'une stratégie de l'Union européenne pour faire cesser et prévenir l'écart entre les pensions des hommes et des femmes

2016/2061(INI)

La commission des droits de la femme et de l’égalité des genres a adopté un rapport d’initiative de Constance Le GRIP (PPE, FR) sur la nécessité d’une stratégie de l’Union européenne pour éradiquer et prévenir l’écart entre les pensions des hommes et des femmes.

La commission de l’emploi et des affaires sociales exerçant les prérogatives de commissions associées en vertu de l’article 54 du Règlement du Parlement européen, a également exprimé son avis sur ce rapport.

Les députés rappellent qu’en 2014, l’écart des rémunérations de retraite ou écart de pension entre hommes et femmes (le «Gender gap in pensions», que l’on peut définir comme étant l’écart entre la rémunération moyenne perçue (avant impôts et taxes) par les femmes au titre de leur retraite par rapport à celle des hommes) représentait 39,4% pour la classe d’âge des 65 ans et plus dans les 28 États membres de l’Union. Ils rappellent également que cet écart s’était creusé dans la moitié des États membres au cours des 5 ans écoulés.

Les députés rappellent également que les écarts de salaire entre hommes et femmes dans l’UE s’élevaient encore à 16,3% en 2014 en raison notamment de phénomènes de discrimination, de ségrégation et de ruptures dans les parcours professionnels.

L’enjeu est donc de parvenir à une réelle égalité entre femmes et hommes, en menant une stratégie globale et généralisée incluant de multiples variables, menée en étroite coopération avec les États membres.

Stratégie globale : les députés estiment que la stratégie ne doit pas se limiter à corriger les effets de l’écart de pension dans les États membres, notamment auprès des personnes les plus vulnérables, mais doit viser à prévenir cet écart, en s’attaquant à ses causes profondes, telles que les inégalités entre les hommes et les femmes sur le marché de l’emploi, du point de vue des rémunérations, de la progression de la carrière et des perspectives d’emploi à temps plein, ou encore la ségrégation sur le marché du travail.

Ils insistent sur le caractère multiforme (une combinaison de mesures au titre de diverses politiques destinées à améliorer l’égalité hommes-femmes) de l’approche pour mener à bien la stratégie, qui doit envisager :

  • la retraite en tenant compte de toute la durée de vie active de la personne,
  • des écarts entre hommes et femmes du point du vue du niveau des emplois,
  • des possibilités contributives et de ceux qui résultent de l’organisation des systèmes de retraite.

Mesurer et sensibiliser pour mieux combattre l’écart de pension : de manière générale, les députés demandent aux États membres et à la Commission de continuer leurs recherches sur l’écart de pension et d’élaborer, en partenariat avec Eurostat et avec l’Institut européen pour l’égalité des genres (IEEG), des indicateurs formels et fiables sur cet écart.

Les États membres sont également appelés à promouvoir des mesures destinées à combler l’écart de pension entre les hommes et les femmes dans le cadre de leurs politiques sociales et à sensibiliser l’opinion publique aux questions liées à l’égalité salariale et à l’écart de pension.

Ils invitent en particulier les États membres à accorder immédiatement les financements de fin de carrière après le départ à la retraite, afin de prévenir des situations de difficulté économique.

Réduire les inégalités dans les possibilités contributives : tout en appelant les États membres à mettre pleinement en œuvre la législation européenne contre les discriminations directes et indirectes entre les hommes et les femmes, les députés condamnent sans réserve les écarts de salaire entre hommes et femmes et leur caractère prétendument «inexplicable». Ils réitèrent leur appel à la révision de la directive 2006/54/CE.

Les États membres et la Commission sont également appelés à :

  • lutter contre la ségrégation horizontale et verticale sur le marché du travail;
  • élaborer des mesures visant à inciter les femmes à participer plus longtemps, et avec des interruptions plus courtes, au marché du travail;
  • prêter une attention particulière au cas des femmes migrantes, qui n’ont souvent pas constitué de droits à pension dans leur pays d’origine.

Réduire les inégalités entre hommes et femmes dans les parcours professionnels : les députés appellent les États membres à étudier la possibilité de permettre aux salariés de négocier des accords volontaires sur la flexibilité au travail, notamment des formules d’«aménagement intelligent» du travail, afin qu’hommes et femmes puissent de mieux concilier vie privée et vie professionnelle.

Ils invitent les États membres à élaborer des stratégies pour reconnaître l’importance des soins informels effectués pour les membres de la famille et les autres personnes à charge et notamment pour permettre aux salariés de retrouver leurs conditions de travail initiales après leur congé de maternité ou leur congé parental.

Effets des régimes de retraites sur l’écart de pension : les députés indiquent que, pour être viables, les régimes de retraite doivent tenir compte des défis que représentent les changements démographiques. Compte tenu de l’espérance de vie croissante dans l’Union, les députés soulignent que les États membres devraient étudier la viabilité de mécanismes plus flexibles de régimes professionnels et privés de contribution au régime des pensions.

Par ailleurs, les députés estiment qu’il est important que les retraites du premier pilier restent au centre des régimes de retraite des États membres. Le recours aux régimes de retraite privés devrait rester un choix facultatif.

D’autres mesures sont préconisées telles que :

  • la réforme des régimes de pensions de réversion, comme l’allocation de veuvage, afin que les femmes non mariées ne soient pas pénalisées;
  • la suppression des obstacles à l’accès à une retraite convenable pour les personnes ayant eu des interruptions de carrière (en majorité des femmes);
  • le principe d’une pension publique minimale d’un montant adéquat, qui soit indépendante de la vie professionnelle du bénéficiaire.

Enfin, les députés soulignent que tout le monde a droit à l’accès universel à une pension de retraite publique. Ils appellent dès lors Commission et les États membres à veiller à ce que les femmes comme les hommes aient la chance d’avoir une période de cotisation complète et le droit à une pension complète.