Rapport 2016 de la Commission concernant la Serbie

2016/2311(INI)

Le Parlement européen a adopté par 524 voix pour, 70 voix contre et 79 abstentions, une résolution sur le rapport 2016 de la Commission concernant la Serbie.

Le Parlement rappelle que la Serbie, comme tout pays aspirant à adhérer à l’Union, doit être jugée sur sa capacité à satisfaire aux mêmes critères que les autres pays et à s’y conformer.

Négociation d’adhésion : de manière générale, le Parlement se félicite de l’ouverture des négociations d’adhésion avec ce pays et de la poursuite des efforts de la Serbie sur la voie de l’intégration à l’Union européenne.

Il souligne que la mise en œuvre intégrale des réformes et des politiques constitue un indicateur déterminant de la réussite du processus d’intégration. Il constate toutefois des retards dans l’absorption de l’aide de préadhésion, et appelle la Serbie à évoluer dans ce domaine.

Réformes économiques : le Parlement se félicite des avancées réalisées par la Serbie afin de mettre en place une économie de marché fonctionnelle ainsi que pour améliorer la situation économique globale du pays. Il souligne que les PME sont essentielles pour l’évolution économique du pays et encourage la Serbie à promouvoir l’entrepreneuriat, notamment chez les jeunes.

Réformes politiques et élections législatives : si le Parlement se félicite de l’organisation des élections législatives du 24 avril 2016, qui se sont déroulées positivement. Tout en rappelant les recommandations formulées par la mission d’observation électorale du BIDDH de l’OSCE concernant notamment le manque de transparence du financement des partis politiques et de la campagne électorale, le Parlement souligne que le financement des partis doit être conforme aux normes internationales les plus strictes en la matière. Il invite les autorités à enquêter comme il se doit sur les irrégularités, les violences et les intimidations qui ont été signalées pendant le processus électoral.

Prenant acte des résultats de l’élection présidentielle du 2 avril 2017, le Parlement condamne fermement la rhétorique utilisée au cours de la campagne présidentielle par des fonctionnaires d’État et des médias favorables au gouvernement à l’encontre d’autres candidats à l’élection présidentielle. Il déplore l’accès inégal des candidats aux médias au cours de la campagne électorale ainsi que la suspension du parlement pendant la campagne, ce qui a privé les responsables politiques de l’opposition d’un espace d’expression public.

La Plénière constate par ailleurs que le premier ministre, Aleksandar Vučić, a recueilli 55, 08% des voix à l’élection présidentielle du 2 avril 2017 et souligne qu’une délégation non partisane de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a observé l’élection en même temps que d’autres institutions telles que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Relations avec la Russie : le Parlement invite une nouvelle fois la Serbie, conformément aux prescriptions requises par son statut de candidate, à harmoniser progressivement sa politique étrangère et de sécurité avec celle de l’Union européenne, y compris sa politique à l’égard de la Russie. Il juge regrettable la pratique d’exercices militaires serbo-russes communs ainsi que la présence d’installations aériennes russes à Niš. Il se félicite toutefois de la contribution importante de la Serbie à plusieurs missions et opérations de l’Union au titre de la PSDC (EUTM Mali, EUTM Somalie, EUNAVFOR-Atalanta, EUTM RCA) ainsi que de sa participation continue aux opérations internationales de maintien de la paix.

Parallèlement, le Parlement félicite la Serbie pour son approche constructive et humanitaire de la gestion de la crise migratoire. Il demande à la Serbie de respecter pleinement les droits des demandeurs d’asile et à protéger les mineurs non accompagnés ou séparés. Il invite la Commission à poursuivre son action en matière de migrations avec tous les pays des Balkans occidentaux, afin de s’assurer que les normes et les critères européens et internationaux sont bien respectés.

État de droit : le Parlement appelle de ses vœux des réformes effectives dans le domaine judiciaire, en particulier en vue de rendre la justice indépendante. Il s’inquiète de l’absence de progrès en matière de lutte contre la corruption et prie la Serbie de faire preuve d’une volonté politique et d’une détermination sans faille face à ce problème. De même, le Parlement demande une juste réforme du délit d’abus d’autorité et d’abus de responsabilités permettant d’empêcher les éventuels abus et les interprétations arbitraires.

Des efforts sont également demandés dans :

  • la lutte contre la criminalité organisée et les réseaux criminels ;
  • les efforts menés en matière de poursuite engagées pour crimes de guerre;
  • la lutte contre le terrorisme et le blanchissement des capitaux.

Démocratie et droits de l’homme : le Parlement estime, entre autres choses, que la constitution devrait faire l’objet d’une révision destinée à prendre en compte les recommandations de la Commission de Venise, axées en particulier sur l’indépendance des institutions. Il appelle en outre à la dépolitisation de l’administration publique.

Il attend de nouveaux efforts pour améliorer la situation des personnes appartenant à des groupes vulnérables, dont les Roms, les personnes handicapées, les personnes porteuses du VIH/SIDA et les personnes LGBTI, les migrants et les demandeurs d’asile, ainsi que les minorités ethniques.

Des mesures sont en outre attendues en matière de liberté d’expression et des médias. Le Parlement insiste en particulier sur le fait que l’ingérence politique, les menaces, les violences et les intimidations à l’encontre des journalistes, dont les agressions physiques, les menaces verbales et écrites et les atteintes aux biens, demeurent un sujet de préoccupation. Il invite les autorités à condamner publiquement et catégoriquement toutes les agressions, à fournir des ressources suffisantes pour enquêter plus activement sur toutes les attaques dirigées contre des journalistes ou des médias et à traduire rapidement les auteurs en justice.

Protection des minorités : le Parlement insiste sur le fait que la Voïvodine (Nord de la Serbie) a maintenu un haut niveau de protection des minorités et que la situation interethnique y est demeurée bonne. Il souligne que l’autonomie de la région de Voïvodine ne saurait être mise à mal et que la loi sur les ressources de la Voïvodine doit être adoptée sans délai, ainsi que le prévoit la constitution.

Parallèlement, le Parlement prend acte de l’adoption de la nouvelle stratégie d’insertion sociale des Roms 2016-2025, lesquels subissent de multiples mesures vexatoires poussant la plupart d’entre eux à demander l’asile dans l’Union européenne.

Bon voisinage : le Parlement encourage la Serbie à renforcer le dialogue actif et constructif qu’elle entretient avec ses voisins et l’ensemble de la région. Il prie la Serbie de mettre intégralement en œuvre les accords bilatéraux conclus avec les pays voisins et à renforcer sa collaboration avec les États membres de l’Union voisins, notamment dans les régions frontalières.

Il constate que la Serbie s’est associée de plus en plus aux initiatives de coopération régionale, telles que la stratégie pour le Danube, le processus de coopération en Europe du Sud-Est, le Conseil de coopération régionale, etc. et invite la Serbie à mettre en œuvre les mesures de réforme en matière de connectivité et les conclusions de la conférence de Paris de 2016 sur les Balkans occidentaux et le règlement RTE-T.

Tribunal pénal international : le Parlement se félicite de l’adoption d’une stratégie nationale pour les enquêtes et les poursuites liées aux crimes de guerre. Il prône le renforcement de la coopération régionale pour traiter les crimes de guerre et régler les questions en suspens. Il préconise également une coopération totale avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) et demande aux autorités concernées de continuer de se préoccuper du sort des personnes disparues, de localiser les fosses communes et de garantir les droits des victimes et de leurs familles. Il réaffirme son soutien à l’initiative visant à mettre en place la commission régionale pour l’établissement de faits concernant les crimes de guerre et autres graves violations des droits de l’homme commises en ex-Yougoslavie.

Coopération régionale : le Parlement salue l’ouverture de trois nouveaux points de passage frontaliers entre la Serbie et la Roumanie, ainsi que les mesures de rapprochement avec l’Albanie. Il se félicite également de la poursuite des efforts de la Serbie dans le cadre du processus de normalisation des relations avec le Kosovo. Il regrette néanmoins la décision prise par les autorités serbes de ne pas laisser l’ancienne présidente du Kosovo, Atifete Jahjaga, assister au festival Mirëdita Dobar Dan à Belgrade et y prononcer un discours sur les victimes de violences sexuelles pendant la guerre au Kosovo comme elle avait été invitée à le faire. Il déplore également qu’en mesure de représailles, les autorités kosovares aient interdit au ministre serbe du travail, Aleksandar Vulin, d’entrer au Kosovo. La Plénière souligne que ces décisions violent l’accord de Bruxelles sur la libre circulation conclu par la Serbie et le Kosovo.

Il invite les deux parties à aller de l’avant et à définir de nouveaux domaines de dialogue permettant d’améliorer l’existence de la population et de normaliser complètement leurs relations. A cet effet, le Parlement déplore les tensions qu’a engendrées le trajet du premier train Belgrade-Mitrovica-Nord, lequel a donné lieu à des déclarations bellicistes et à des discours anti-européens.

Le Parlement invite la Commission à fournir davantage d’efforts pour soutenir un véritable processus de réconciliation dans la région, notamment en apportant son soutien à des projets culturels qui traitent du passé récent et promeuvent une interprétation commune et partagée de l’histoire, ainsi qu’une culture publique et politique de tolérance, d’intégration et de réconciliation.

Énergie : enfin, le Parlement invite la Serbie à mettre pleinement en œuvre les mesures de réforme en matière de connectivité dans le secteur de l’énergie et à ratifier l’Accord de Paris sur le climat.