Résolution sur les effets néfastes de la loi des États-Unis relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (FATCA) sur les citoyens de l’Union européenne, et en particulier les «Américains accidentels»

2018/2646(RSP)

Le Parlement européen a adopté par 470 voix pour, 43 contre et 26 abstentions, une résolution déposée par la commission des pétitions sur les effets néfastes de la loi des États-Unis relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (FATCA) sur les citoyens de l’Union européenne, et en particulier les «Américains accidentels». Il a noté que sa commission des pétitions a été saisie d’une pétition émanant d’un collectif de citoyens européens s’inquiétant des effets néfastes de la FATCA, de ses accords intergouvernementaux de mise en œuvre et de l’incidence extraterritoriale de l’imposition fondée sur la citoyenneté.

Les députés ont rappelé que, depuis l’entrée en vigueur de la FATCA et de ses accords intergouvernementaux de mise en œuvre conclus entre les États membres et les États-Unis, les établissements financiers de l’Union européenne doivent, sous la menace d’une retenue à la source de 30 %, fournir des informations détaillées sur les comptes détenus par des «personnes américaines» présumées à l’administration fiscale américaine (IRS).

La FATCA vise à empêcher l’évasion fiscale par des personnes américaines et elle exige des institutions financières étrangères qu’elles recherchent des «personnes américaines» en recherchant un certain nombre d'«indices d’américanité», tels qu’un lieu de naissance aux États-Unis ou un numéro de téléphone aux États-Unis.

Le Parlement a noté que le recours à de tels indices, comme le prévoit la FATCA, peut conduire au signalement et à la sanction arbitraire de personnes qui, en réalité, n’ont pas de véritables liens avec les États-Unis. Cela inclut les «Américains accidentels» qui ont hérité de la citoyenneté américaine par le hasard de leur naissance, mais qui n’entretiennent aucun contact avec les États-Unis, qui n’ont jamais vécu, travaillé ou étudié aux États-Unis et qui n’ont pas de numéro de sécurité sociale aux États-Unis.

Les députés ont relevé le fait que les personnes répondant à la définition de «personnes américaines» voient leurs comptes d’épargne gelés et se trouvent privées d’accès aux services bancaires, notamment les assurances-vie, les pensions et les prêts hypothécaires, car les institutions financières rechignent à produire les coûteux rapports que leur impose la FATCA. De plus, les données à caractère personnel des membres européens de leur famille sont en outre partagées avec les États-Unis, et que l’accès de ces personnes aux services bancaires de l’Union est restreint (par exemple, en matière de comptes joints ou de prêts hypothécaires).

Le Parlement a noté que les «Américains accidentels» qui souhaitent ne pas être affectés par la FATCA sont tenus de renoncer officiellement à leur citoyenneté américaine et qu’ils doivent pour cela engager une procédure très lourde qui n’a aucune chance d’aboutir sans un numéro de sécurité sociale américain ou un numéro d’identification fiscale américain, qu’ils ne peuvent généralement pas fournir.

Dans ces circonstances, le Parlement a émis les points suivants :

Directive sur les comptes de paiement : rappelant que la directive 2014/92/UE (directive sur les comptes de paiement) oblige les États membres à veiller à ce que les établissements de crédit n’exercent pas de discrimination à l’égard de consommateurs fondée sur leur nationalité ou leur lieu de résidence, le Parlement a appelé une transposition pleine et correcte de la directive sur les comptes de paiement et à garantir le droit pour tous les citoyens de l’Union d’avoir accès à un compte de paiement assorti de prestations de base indépendamment de leur nationalité. La Commission a été invitée à :

  • accélérer la réalisation de son analyse sur les mesures de transposition nationales de la directive sur les comptes de paiement (le délai pour la transposition était le 18 septembre 2016) et à intégrer dans son évaluation la situation des «Américains accidentels», des citoyens binationaux et des citoyens américains résidant légalement dans l’Union européenne, en prenant dûment en considération toute discrimination exercée par les établissements financiers à l’encontre de contribuables résidant légalement dans l’Union et considérés comme des «personnes américaines» aux fins de la FATCA ;
  • lancer sans attendre des procédures d’infraction en cas de manquements établis dans la mise en œuvre de la directive sur les comptes de paiement, et à rendre compte au Parlement et au Conseil.

Protection des données : le Parlement a noté que les plateformes internet américaines telles que AirBnB, TripAdvisor et Amazon sont tenues de collecter des données fiscales sur tous les citoyens de l’Union utilisant ces services en ligne et de les transmettre à l’administration fiscale américaine (IRS) afin de vérifier si l’utilisateur est un citoyen américain et donc de déterminer si les revenus générés par ces plateformes sont soumis à l’impôt américain dans le cadre de la FATCA. Il a déclaré que cette pratique n’est manifestement pas conforme aux règles de l’Union en matière de protection des données. Insistant sur le besoin de fournir un niveau approprié de protection des données personnelles transmises aux USA dans le cadre de la FATCA, le Parlement a invité la Commission à :

  • réaliser une analyse exhaustive de l’impact de la FATCA et de la pratique extraterritoriale de l’imposition fondée sur la citoyenneté appliquée par les États-Unis à l’encontre des citoyens de l’Union, et expliquer si un écart majeur existe entre les citoyens de l’Union et/ou les résidents de l’Union dans différents États membres, en particulier eu égard aux règles de l’Union en matière de protection des données et aux normes en matière de droits fondamentaux en lien avec la FATCA et les «indices d’américanité» ;
  • évaluer en détail le degré de réciprocité ou de non-réciprocité de la FATCA dans l’ensemble de l’Union et à vérifier scrupuleusement que les États-Unis respectent les obligations qui leur incombent en vertu des divers accords intergouvernementaux signés avec les États membres ;
  • enquêter sur toute violation des règles de l’Union européenne en matière de protection des données par des États membres dont la législation autorise le transfert de données à caractère personnel à l’administration fiscale américaine aux fins de la FATCA, et à lancer des procédures d’infraction contre les États membres qui n’appliquent pas correctement les règles de l’Union en matière de protection des données ;
  • prendre des mesures pour veiller à ce que les droits fondamentaux et les valeurs de l’Union européenne consacrés dans la charte des droits fondamentaux et dans la convention européenne des droits de l’homme, comme le droit à la protection de la vie privée et le principe de non-discrimination, ainsi que les règles de l’Union en matière de protection des données soient respectés dans le contexte de la FATCA et de l’échange automatique d’informations fiscales avec les États-Unis.

Accords intergouvernementaux : le Parlement a déploré le manque de réciprocité inhérent aux accords intergouvernementaux de mise en œuvre signés par les États membres, en particulier en ce qui concerne l’étendue des informations à échanger, qui est plus vaste pour les États membres qu’elle ne l’est pour les États-Unis.

Il a demandé à tous les États membres de suspendre collectivement l’application de leurs accords intergouvernementaux de mise en œuvre jusqu’à ce que les États-Unis consentent à adopter une approche multilatérale de l’échange automatique d’informations, soit en abrogeant la FATCA et en intégrant la norme commune de déclaration, soit en renégociant la FATCA à l’échelle de l’Union européenne avec les mêmes obligations de réciprocité en matière de partage des deux côtés de l’Atlantique.

En dernier lieu, la résolution a demandé au Conseil de charger la Commission d’ouvrir des négociations avec les États-Unis en vue d’un accord FATCA UE–États-Unis afin de garantir la pleine réciprocité de l’échange d’informations et de faire respecter les principes fondamentaux du droit de l’Union ainsi que la directive sur les comptes de paiement, et de permettre aux «Américains accidentels» de se défaire de leur citoyenneté américaine non souhaitée gratuitement, sans enregistrement de leurs données et sans sanctions.