Rapport annuel du Conseil établi en application du point 8 du dispositif du code de conduite de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements

2018/2157(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté un rapport d’initiative de Sabine LÖSING (GUE/NGL, DE) sur le thème: «Exportations d’armements: mise en œuvre de la position commune 2008/944/PESC».

Selon les derniers chiffres, les exportations d’armes depuis l’Union à 28 s’élevaient à plus de 27 % du total mondial de 2013 à 2017, ce qui ferait de l’Union à 28 prise collectivement le deuxième fournisseur d’armements au monde, après les États-Unis (34 %) et avant la Russie (22 %).

Les exportations et les transferts d’armes ont une incidence indéniable sur les droits de l’homme et la sécurité humaine, sur le développement socio-économique et sur la démocratie. Cela justifie d’instaurer un système de contrôle des armes qui soit strict, transparent et efficace, et qui soit établi et accepté par toutes les parties. La position commune 2008/944/PESC est un cadre juridiquement contraignant qui définit huit critères en ce qui concerne les exportations de technologie et d’équipements militaires.

Le secteur de la défense est devenu un élément central de la politique de l’Union comme en atteste la stratégie globale de l’Union qui indique qu’«une industrie européenne de la défense durable, innovante et compétitive est indispensable à l’autonomie stratégique de l’Europe et à la crédibilité de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC)». Les exportations d’armement sont donc essentielles au renforcement de la base industrielle et technologique de défense européenne.

Renforcement de la position commune et amélioration de sa mise en œuvre: les députés ont invité les États membres à venir à bout du manque actuel d’efficacité des dépenses de défense imputable aux doubles emplois, à la fragmentation et à l’absence d’interopérabilité en vue de permettre à l’Union de s’affirmer comme garante de la sécurité grâce notamment à un meilleur contrôle des exportations d’armes.

Le rapport constate que les huit critères de la position commune sont interprétés et appliqués différemment par les États membres. Il demande une application uniforme, cohérente et coordonnée de ces critères ainsi qu’une mise en œuvre complète de la position commune et de tous les engagements y afférents. Il appelle à lancer un processus destiné à élaborer un mécanisme de sanction à l’encontre des États membres qui ne respectent pas la position commune.

Les députés préconisent d’enrichir la méthode d’évaluation des risques applicable aux autorisations d’exportation d’un principe de précaution. Ils estiment que les États membres devraient également apprécier les risques au regard de l’ensemble de la situation dans le pays de destination, compte tenu de facteurs tels que l’état de la démocratie et de l’état de droit ainsi que de son développement socioéconomique. Dans cette perspective, les États membres et le SEAE devraient renforcer les mécanismes d’échanges d’informations en mettant à disposition davantage d’informations de meilleure qualité concernant les évaluations des risques liés aux autorisations.

Le rapport déplore la non application systématique des huit critères par des États membres et le fait que des technologies militaires parviennent parfois à des destinations et à des utilisateurs finaux qui ne répondent pas aux critères fixés dans la position commune. Il demande une évaluation indépendante du respect, par l’État membre, des huit critères de la position commune.

Les députés estiment que les exportations à destination de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis et d’autres pays membres de la coalition saoudienne au Yémen ne respectent pas au minimum le critère 2 en raison de l’implication des pays concernés dans de graves violations du droit humanitaire tel qu’établi par les autorités compétentes des Nations unies. Ils réitèrent  leur appel du 13 septembre 2017 concernant la nécessité impérieuse d’imposer un embargo sur les armes à l’Arabie saoudite et félicitent les États membres tels que l’Espagne, l’Allemagne et les Pays-Bas, qui ont changé de position concernant le conflit yéménite.

Les députés rappellent les effets négatifs que les exportations insuffisamment contrôlées de technologies de cybersurveillance peuvent avoir sur la sécurité des infrastructures numériques de l’Union et sur le respect des droits de l’homme. Ils insistent sur l’importance d’une mise à jour rapide, effective et globale du règlement de l’Union sur les biens à double usage. Ils exigent également l’application stricte de la position commune en ce qui concerne la production sous licence dans les pays tiers.

Tout en notant que le Conseil procédait actuellement à une réévaluation de la mise en œuvre de la position commune, les députés ont demandé que cette dernière soit réexaminée. Ils ont suggéré que le champ d’application des huit critères soit élargi et que ceux-ci portent également sur le transfert du personnel militaire, des forces de sécurité et de police, sur les services, le savoir-faire et la formation en lien avec les exportations d’armements, sur les technologies de sécurité ainsi que sur les services armés et les services de sécurité à caractère privé.

Les États membres et le SEAE sont invités à collaborer afin de prévenir les risques découlant du détournement et du stockage des armes, tels que le trafic illégal d’armes et la contrebande.

Rapport annuel du groupe «Exportations d’armes conventionnelles» (COARM): les députés déplorent qu’un certain nombre d’États membres n’aient pas présenté de contributions complètes pour le dix-neuvième rapport annuel incluant des données détaillées et propres à chaque pays. Ils suggèrent de mettre en place un système de contrôle et de rapport normalisé afin de fournir des informations plus détaillées et exhaustives.

Parlement et société civile: le rapport souligne le rôle important joué par les parlements nationaux, le Parlement européen, la société civile, les autorités chargées du contrôle des exportations d’armements et les associations professionnelles dans le soutien en faveur des normes concertées de la position commune, et dans la mise en place d’un système transparent de contrôle et de justification. Il réclame, à cet égard, l’établissement d’un mécanisme de contrôle robuste et transparent qui renforce le rôle des parlements et de la société civile.

Contrôle des armes et désarmement à l’échelle internationale: les députés estiment que l’Union devrait assumer ses responsabilités accrues en matière de paix et de sécurité en Europe et dans le monde en améliorant encore les mécanismes de contrôle des exportations et les initiatives de désarmement. Ils demandent à nouveau l’interdiction des exportations de produits utilisés dans la mise au point et la fabrication de systèmes d’armes létales autonomes.