Égalité des genres et politiques fiscales dans l’Union européenne

2018/2095(INI)

La commission des affaires économiques et monétaires et la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres ont adopté un rapport d’initiative présenté conjointement par Marisa MATIAS (GUE/NGL, PT) et Ernest URTASUN (Verts/ALE, ES) sur l’égalité des genres et les politiques fiscales dans l’Union européenne.

Les députés ont invité la Commission à soutenir l’égalité entre les femmes et les hommes dans toutes les politiques fiscales et à adresser des lignes directrices et des recommandations spécifiques aux États membres, notamment pour qu’ils procèdent à des audits des politiques fiscales afin d’éliminer les préjugés fiscaux liés au genre et de garantir qu’aucune nouvelle législation n’augmente les disparités entre les genres sur le marché du travail, creuse les écarts de revenu après impôt entre les sexes ou renforce le modèle du soutien de famille masculin.

La Commission devrait :

  • être explicitement mandatée à coopérer avec l’institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE) afin de surveiller l’incidence des politiques fiscales des États membres sur l’égalité entre les femmes et les hommes et à rendre régulièrement compte à ce sujet;
  • promouvoir la ratification par l’Union européenne de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Les députés ont invité la Commission et les États membres à veiller à ce que la législation de l'UE contre la discrimination indirecte et directe fondée sur le sexe soit correctement mise en œuvre et à ce que ses progrès soient systématiquement suivis.

Fiscalité directe:

Impôt sur le revenu des personnes physiques: les députés ont souligné les conséquences négatives de l’absence de mesures encourageant l’emploi des femmes et leur indépendance économique et ont attiré l’attention sur l’écart important entre les hommes et les femmes en matière de retraite qui résulte de l’imposition commune. Ils ont demandé aux États membres :

  • d’introduire progressivement l’imposition individuelle tout en veillant à préserver l’intégralité des avantages financiers et autres dont bénéficient les parents dans les régimes actuels d’imposition commune;
  • d’intensifier leurs efforts pour lutter efficacement contre l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes afin d'améliorer la situation économique des femmes et de préserver leur indépendance économique;
  • de veiller à ce que les incitations fiscales liées à l'emploi et au travail indépendant n'entraînent pas de discrimination fondée sur le sexe et d’envisager des incitations fiscales et d’autres services ou avantages fiscaux pour les seconds titulaires de revenus et les parents isolés;
  • de ne pas réduire le caractère progressif de leur régime d’impôt sur le revenu des personnes physiques, notamment en tentant de simplifier l’impôt sur le revenu des personnes physiques.

Les députés ont plaidé pour un système de retraite universelle qui accorde aux femmes un accès égal à une garantie de pension de retraite complète.

Impôt sur les sociétés: les députés estiment que la mise en place d’un taux minimal commun et équitable pour l’impôt sur les sociétés est le seul moyen de créer les conditions d’un traitement égal et équitable des différents agents économiques dans l’Union. Ils demandent aux États membres :

  • d’adopter sans attendre une assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés (ACCIS) et de mettre en place un taux minimal d’imposition des sociétés au niveau de l’Union en vue de mettre un terme à la course vers le bas;
  • de rationaliser les incitations fiscales ou les allègements fiscaux qu'ils accordent aux entreprises pour faire en sorte que ces avantages profitent principalement aux petites entreprises et favorisent une véritable innovation;
  • d’évaluer l'impact potentiel de ces incitations sur l'égalité des sexes.

Les pays identifiés pour leurs dispositions en matière de planification fiscale agressive de modifier leur législation et clôturer ces dispositions dès que possible.

Impôt sur le capital et la fortune: le rapport constate que l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur la fortune jouent un rôle crucial dans la réduction des inégalités. Les États membres sont appelés à ;

  • améliorer leurs politiques fiscales afin d’accroître la disponibilité et l’accessibilité de services de garde d’enfants abordables et de qualité au moyen d’incitations fiscales en vue de réduire les obstacles à l’accès des femmes à un emploi rémunéré, de contribuer à une répartition plus équitable des tâches rémunérées et non rémunérées au sein des ménages et de réduire ainsi les écarts de rémunération et de retraite entre les hommes et les femmes;
  • combler les écarts de richesse entre les sexes dans l’ensemble de l’Union en matière d’actifs financiers, de propriété foncière, d’actifs commerciaux, de droits à l’assurance, d’épargne retraite et de stock-option.

Fiscalité indirecte : les députés constatent que la TVA exerce un préjugé sexiste en raison des modes de consommation des femmes, qui diffèrent de ceux des hommes dans la mesure où elles achètent davantage de biens et services dans le but de promouvoir la santé, l’éducation et la nutrition. Ils craignent que cette situation, conjuguée au faible revenu des femmes, n’entraîne un alourdissement de la charge de la TVA pour les femmes. Ils invitent les États membres à prévoir des exonérations de TVA, des taux réduits et des taux zéro pour les produits et services ayant des effets positifs sur le plan social, sanitaire et/ou environnemental.

Impact de l'évasion et de la fraude fiscale sur l'égalité des sexes: l'évasion et la fraude fiscales contribuent largement à l'inégalité entre les sexes car elles limitent les ressources disponibles pour accroître l'égalité aux niveaux national et international.

Les députés ont appelé à la création d'un organe des Nations Unies pour faire en sorte que tous les pays puissent participer à la formulation et à la réforme des politiques fiscales mondiales. Il serait chargé d'examiner les politiques fiscales nationales, régionales et mondiales conformément aux obligations en matière d'égalité des sexes et de droits de l'homme.

Intégration de la dimension de genre dans les politiques fiscales: le rapport invite la Commission et les États membres à procéder à des évaluations régulières de l’incidence des politiques fiscales sur les femmes afin qu’aucun élément de discrimination directe ou indirecte ne figure dans les politiques fiscales de l’Union.

Les États membres sont invités à :

  • partager les meilleures pratiques concernant la conception de leurs marchés du travail et de leurs systèmes fiscaux afin de contribuer à réduire les écarts de rémunération et de pension entre les hommes et les femmes;
  • recueillir des données fiscales de manière individuelle, et pas uniquement sur les ménages, ainsi qu’à combler les écarts des données entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les habitudes de consommation et l’utilisation de taux réduits, la répartition des revenus d’entreprise et du paiement des taxes associées ainsi que la répartition de la richesse, les revenus du capital et le paiement des impôts connexes.