Égalité des genres et politiques fiscales dans l’Union européenne

2018/2095(INI)

Le Parlement européen a adopté par 313 voix pour, 276 contre et 88 abstentions une résolution sur l’égalité des genres et les politiques fiscales dans l’Union européenne.

Le Parlement a invité la Commission à soutenir l’égalité entre les femmes et les hommes dans toutes les politiques fiscales et à adresser des lignes directrices et des recommandations spécifiques aux États membres, afin d’éliminer les préjugés fiscaux liés au genre et de garantir qu’aucune nouvelle législation fiscale, loi sur les dépenses, programme ou pratique qui augmente les disparités entre les genres sur le marché du travail ou qui creuse les écarts de revenu après impôt entre les sexes ne soit établi.

Les députés ont invité la Commission et les États membres à veiller à ce que la législation de l'UE contre la discrimination indirecte et directe fondée sur le sexe soit correctement mise en œuvre et à ce que ses progrès soient systématiquement suivis.

Impôt sur le revenu des personnes physiques

Les députés ont souligné les conséquences négatives de l’absence de mesures encourageant l’emploi des femmes et leur indépendance économique et ont attiré l’attention sur l’écart important entre les hommes et les femmes en matière de retraite qui résulte de l’imposition commune. Ils ont demandé aux États membres et aux institutions de l’Union de promouvoir des études sur les effets de l’écart de pension entre les femmes et les hommes sur les retraites et l’indépendance économique des femmes, qui tiennent compte du vieillissement de la population, des différences entre les femmes et les hommes en matière de santé et de l’espérance de vie.

Les députés ont demandé aux États membres :

  • d’introduire progressivement l’imposition individuelle tout en veillant à préserver l’intégralité des avantages financiers et autres dont bénéficient les parents dans les régimes actuels d’imposition commune;
  • d’intensifier leurs efforts pour lutter efficacement contre l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes afin d'améliorer la situation économique des femmes et de préserver leur indépendance économique;
  • de veiller à ce que les incitations fiscales liées à l'emploi et au travail indépendant n'entraînent pas de discrimination fondée sur le sexe et d’envisager des incitations fiscales et d’autres services ou avantages fiscaux pour les seconds titulaires de revenus et les parents isolés;
  • de ne pas réduire le caractère progressif de leur régime d’impôt sur le revenu des personnes physiques, notamment en tentant de simplifier l’impôt sur le revenu des personnes physiques.

Les députés ont noté que, dans certains États membres, les allègements fiscaux privés bénéficiaient de manière disproportionnée aux hommes et aux hauts salaires, et ont plaidé pour un système de retraite universelle qui accorde aux femmes un accès égal à une garantie de pension de retraite complète.

Impôt sur les sociétés

Le Parlement a noté que, en moyenne, les taux d’imposition sur les sociétés ont considérablement baissé depuis les années 1980, passant de plus de 40 % à 21,9 % en 2018, alors qu’en revanche, le taux des taxes à la consommation (dont la TVA est une part importante) a augmenté depuis 2009 pour atteindre 20,6 % en 2016. Les députés ont estimé que la mise en place d’un taux minimal commun et équitable pour l’impôt sur les sociétés était le seul moyen de créer les conditions d’un traitement égal et équitable des différents agents économiques dans l’Union, ainsi que dans la communauté plus large des contribuables. Ils ont demandé aux États membres :

  • de finaliser les négociations et introduire l’assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés ;
  • d’introduire un taux plancher d’impôt des sociétés au niveau européen pour arrêter la course vers le fond ;
  • de rationaliser les incitations fiscales ou les allègements fiscaux qu'ils accordent aux entreprises pour faire en sorte que ces avantages profitent principalement aux petites entreprises et favorisent une véritable innovation;
  • d’évaluer l'impact potentiel de ces incitations sur l'égalité des sexes.

Le Parlement a invité les pays identifiés pour leurs dispositions en matière de planification fiscale agressive à modifier leur législation et clôturer ces dispositions dès que possible.

Impôt sur le capital et la fortune

Le Parlement a constaté que l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur la fortune jouent un rôle crucial dans la réduction des inégalités. Les États membres ont été appelés à :

  • améliorer leurs politiques fiscales afin d’accroître la disponibilité et l’accessibilité de services de garde d’enfants abordables et de qualité au moyen d’incitations fiscales en vue de réduire les obstacles à l’accès des femmes à un emploi rémunéré et de réduire ainsi les écarts de rémunération et de retraite entre les hommes et les femmes ;
  • combler les écarts de richesse entre les sexes dans l’ensemble de l’Union en matière d’actifs financiers, de propriété foncière, d’actifs commerciaux, de droits à l’assurance, d’épargne retraite et de stock-option.

Fiscalité indirecte

Les députés ont constaté que la TVA exerce un préjugé sexiste en raison des modes de consommation des femmes, qui diffèrent de ceux des hommes dans la mesure où elles achètent davantage de biens et services dans le but de promouvoir la santé, l’éducation et la nutrition. Le Parlement a craint que cette situation, conjuguée au faible revenu des femmes, n’entraîne un alourdissement de la charge de la TVA pour les femmes. Il a invité les États membres à prévoir des exonérations de TVA, des taux réduits et des taux zéro pour les produits et services ayant des effets positifs sur le plan social, sanitaire et/ou environnemental.

Impact de l'évasion et de la fraude fiscale sur l'égalité des sexes

L'évasion et la fraude fiscales contribuent largement à l'inégalité entre les sexes car elles limitent les ressources disponibles pour accroître l'égalité aux niveaux national et international.

Le Parlement a invité la Commission et les États membres à promouvoir des réformes fiscales égalitaires dans toutes les enceintes internationales, y compris l’OCDE et les Nations unies, et à soutenir la création d’un organe fiscal intergouvernemental des Nations unies dont la composition serait universelle, les droits de vote égaux et la participation des femmes et des hommes égale. Il a également chargé la Commission de réexaminer les conventions existantes en matière de double imposition afin d’examiner et de résoudre les problèmes d’imposition à la source et de veiller à ce que les futures conventions en matière de double imposition comportent des dispositions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes en plus des dispositions générales anti-abus.

Intégration de la dimension de genre dans les politiques fiscales

Le Parlement a invité la Commission et les États membres à procéder à des évaluations régulières de l’incidence des politiques fiscales sur les femmes. Il a également souligné qu’il était nécessaire de poursuivre les recherches et d’améliorer la collecte de données ventilées par sexe en ce qui concerne les effets distributifs et allocatifs du régime fiscal selon le sexe.

Les États membres ont été invités à :

  • partager les meilleures pratiques concernant la conception de leurs marchés du travail et de leurs systèmes fiscaux afin de contribuer à réduire les écarts de rémunération et de pension entre les hommes et les femmes;
  • recueillir des données fiscales de manière individuelle, et pas uniquement sur les ménages, ainsi qu’à combler les écarts des données entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les habitudes de consommation et l’utilisation de taux réduits, la répartition des revenus d’entreprise et du paiement des taxes associées ainsi que la répartition de la richesse, les revenus du capital et le paiement des impôts connexes.