Après-printemps arabe: la voie à suivre pour la région MENA

2018/2160(INI)

La commission des affaires étrangères a adopté un rapport d’initiative de Brando BENEFEI (S&D, IT) sur l’après-printemps arabe: la voie à suivre pour la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA).

La région examinée dans le présent rapport regroupe les pays du Maghreb et du Machrek, ce qui inclut par conséquent les rives méridionales ainsi qu’une partie des rives orientales de la Méditerranée (le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye, l’Égypte, le Liban, la Jordanie et la Syrie). Le rapport vise à fournir une évaluation de la situation de ces pays, huit ans après le printemps arabe, à déterminer certaines tendances et, en particulier, à évaluer la réponse qui a été apportée par l’Union européenne.

Progrès insuffisants

Les députés notent avec préoccupation que, huit ans après les premiers bouleversements, la plupart des aspirations légitimes des manifestants pacifiques à la dignité, aux droits de l’homme et aux réformes sociales, économiques et politiques progressistes n’ont toujours pas été réalisées dans la plupart des pays. Ils s’inquiètent des violations persistantes et continues des droits de l’homme et de l’état de droit et de la persistance d’une situation socio-économique désastreuse dans la région, en particulier des taux élevés de chômage et d’exclusion sociale, qui poussent les jeunes à la migration irrégulière ou les rendent plus vulnérables à la radicalisation.

Malgré les investissements politiques et budgétaires considérables et le dialogue politique et économique continu qu’elle a engagés, l’Union n’a pas réussi à acquérir une réelle et concrète influence politique et économique, l’incidence de ses politiques reste limitée et elle n’est pas perçue par les pays de la région comme un acteur susceptible de changer la donne.

Un engagement plus fort de l’Europe

Les députés ont appelé de leurs vœux un engagement plus fort et une vision plus ferme de la part de l’Union européenne pour lui permettre de devenir un acteur plus central. Ils ont invité les institutions européennes, ses États membres, ainsi que les agences de développement, à s’efforcer d’adopter une position européenne unifiée vis-à-vis de la région, en se concentrant sur les intérêts communs, en vue de garantir une stratégie européenne unique et cohérente, de manière à permettre à l’Union d’apporter un soutien significatif aux réformes démocratiques, économiques et sociales.

Les députés appuient les aspirations de tous dans la région MENA, notamment la majorité des jeunes qui souhaitent l’avènement de pays libres, stables, prospères, solidaires et démocratiques qui honorent leurs engagements nationaux et internationaux en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales.

L’Union européenne est en particulier invitée à :

- s’engager auprès des gouvernements des pays tiers afin de mettre un terme au contrôle persistant et dominant des ressources étatiques et économiques ainsi qu’aux lois répressives, et à s’engager auprès des défenseurs des droits de l’homme et des acteurs de la société civile les plus vulnérables de l’ensemble de la région ;

- soutenir fermement les processus de paix de l’Union dans le but de résoudre les conflits dans la région MENA;

- traiter les causes profondes de la migration, telles que les conflits, les causes environnementales, la pauvreté extrême et l’exclusion sociale, ainsi qu’à réorienter la coopération politique vers un partenariat plus équilibré et équitable avec la région MENA, en mettant à son cœur les politiques de la jeunesse, notamment l’accès des jeunes à l’entreprenariat, et les investissements en faveur des petites et moyennes entreprises (PME) locales;

- renforcer les programmes de coopération judiciaire avec les pays partenaires de la région afin de promouvoir l’échange de bonnes pratiques et d’établir un arsenal juridique efficace dans la lutte contre la corruption ;

- aider ses partenaires à s’attaquer aux causes profondes de la radicalisation et à ouvrir de nouvelles perspectives pour les jeunes, en renforçant la coopération avec la région MENA et en plaçant la population au cœur de cette coopération ;

- garantir une visibilité adéquate des efforts déployés par l’Union ainsi que de l’aide fournie et des investissements réalisés par celle-ci dans la région, par la communication stratégique renforcée, la diplomatie publique, la diplomatie culturelle, la coopération en matière d’enseignement et dans le domaine universitaire et des actions de sensibilisation visant à promouvoir les valeurs de l’Union ;

- renforcer l’aide qu’elle accorde aux pays les plus désireux de progresser sur la voie de la démocratisation, de l’état de droit, du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à l’aide de tous les instruments financiers à sa disposition, de l’aide macrofinancière à l’instrument européen de voisinage, en passant par le plan européen d’investissement extérieur, ainsi que le futur instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale.

Les députés ont mis en évidence l’importance de l’Union pour la Méditerranée (UpM) qui constitue le seul forum politique qui réunit les États membres de l’Union et l’ensemble des pays méditerranéens. Ils ont rappelé la valeur ajoutée de la diplomatie parlementaire et des réunions interparlementaires bilatérales que le Parlement organise régulièrement avec ses homologues du voisinage méridional. Ils ont insisté sur le fait que les femmes peuvent être de puissantes actrices dans la promotion et la consolidation de la paix, la résolution des conflits et les processus de stabilisation et se sont prononcés en faveur un projet de plan euro-méditerranéen relatif aux inégalités.

Le rapport a invité la Commission à donner suite à la proposition du Parlement concernant l’élaboration d’un ambitieux programme Erasmus euro-méditerranéen, distinct d’Erasmus+ et rappelé son soutien au financement des programmes de formation universitaire et professionnelle visant à créer d’importantes réserves de compétences professionnelles dans la région MENA.

Les députés ont enfin demandé une coopération mondiale renouvelée et intensive pour parvenir à une solution pacifique et durable au conflit en Syrie.