Criminalité financière, fraude fiscale et évasion fiscale

2018/2121(INI)

La commission spéciale sur la criminalité financière, la fraude et l'évasion fiscale a adopté le rapport rédigé par Jeppe KOFOD (S&D, DK) et Luděk NIEDERMAYER (PPE, CZ) sur la criminalité finacière, la fraude fiscale et l'évasion fiscale.

Suite aux révélations aux révélations qui ont été faites ces cinq dernières années connues sous le nom de «LuxLeaks», «Panama papers», «Paradise papers» et «CumEx Files», le Parlement européen a décidé, le 1er mars 2018, de créer une commission spéciale sur les crimes financiers, l'évasion fiscale et l'évasion fiscale (TAX3).

Nécessité urgente d'une réforme

Soulignant que les règles fiscales existantes sont souvent incapables de suivre le rythme croissant de l'économie, les députés ont estimé urgent de réformer ces règles afin que les systèmes fiscaux internationaux, européens et nationaux soient adaptés aux nouveaux défis économiques, sociaux et technologiques du XXIe siècle.

Les députés se sont félicités du fait que, au cours de son mandat actuel, la Commission a présenté 26 propositions législatives visant à combler certaines lacunes, à améliorer la lutte contre la criminalité financière et la planification fiscale agressive, ainsi qu'à accroître l'efficacité et l'équité du recouvrement des impôts. Ils ont toutefois regretté l'absence de progrès au sein du Conseil sur les grandes initiatives relatives à la réforme de l'impôt des sociétés qui n'ont pas encore été finalisées en raison de l'absence d'une véritable volonté politique.

Ils ont appelé à l'adoption rapide des initiatives de l'UE qui n'ont pas encore été finalisées et à un suivi attentif de leur mise en œuvre afin d'en assurer l'efficacité et la bonne application, de manière à suivre le rythme de la fraude fiscale, de l'évasion fiscale et de la planification fiscale agressive.

Les députés ont demandé à l'UE d'adopter une stratégie globale par laquelle l'UE aiderait les États membres à passer de leurs systèmes fiscaux actuels qui leur portent préjudice à un système fiscal compatible avec le cadre juridique de l'UE et l'esprit des traités de l'UE.

Transactions en espèces

Le rapport souligne que les transactions en espèces demeurent un risque très élevé en termes de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale, y compris la fraude à la TVA. Si les règles relatives au contrôle de l'argent liquide aux frontières extérieures de l'UE ont été harmonisées, les règles entre les États membres concernant les mouvements d'argent liquide à l'intérieur des frontières de l'UE varient. La fragmentation et la nature divergente de ces mesures risquent de perturber le bon fonctionnement du marché intérieur.

La Commission est invitée à préparer une proposition sur les restrictions européennes concernant les paiements en espèces, tout en maintenant les espèces comme moyen de paiement. Notant que les grosses coupures en euros présentent un risque plus élevé en termes de blanchiment d'argent, les députés ont demandé à la Banque centrale européenne (BCE) d'établir un calendrier pour supprimer progressivement la possibilité d'utiliser les billets de 500 euros.

Dépouillement par dividendes et cessions de coupons fictives

Les députés ont noté que les transactions de type «CumEx» sont un problème mondial connu depuis les années 1990, y compris en Europe, mais qu'aucune mesure coordonnée n'a été prise pour y remédier. Ils ont déploré la fraude fiscale révélée par le scandale des dossiers dits «CumEx», qui a entraîné des pertes de recettes fiscales des États membres qui, selon certaines estimations des médias, s'élèveraient à 55,2 milliards d'euros. Le système de fraude CumEx démontre clairement que la complexité des systèmes fiscaux engendre des vides juridiques.

La Commission est invitée à évaluer si une action de l'UE est nécessaire à cet égard et à présenter une proposition législative si l'évaluation démontre la nécessité d'une telle action.

Police financière européenne

Les députés ont invité la Commission à commencer immédiatement à travailler sur une proposition de création d'une force de police financière européenne dans le cadre d'Europol, dotée de ses propres capacités d'enquête, ainsi que sur un cadre européen pour les enquêtes fiscales transfrontalières et autres délits financiers transfrontaliers.

TVA

Le rapport a souligné l’importance d'harmoniser les règles de TVA au niveau de l'UE dans la mesure où cela est nécessaire pour assurer l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur et pour éviter toute distorsion de concurrence. On estime qu'environ 50 milliards d'euros - soit 100 euros par citoyen de l'UE chaque année - sont perdus à cause de la fraude transfrontalière à la TVA. Les députés estiment qu’une meilleure coopération entre les autorités administratives, judiciaires et répressives de l'UE est nécessaire afin de mieux lutter contre la fraude à la TVA. La prochaine Commission est invitée à donner la priorité à l'introduction et à la mise en œuvre du régime définitif de TVA afin de l'améliorer.

Suppression progressive des visas et passeports dorés

Les députés se sont inquiétés du fait qu'une majorité d'États membres ont adopté des programmes de citoyenneté par l'investissement (CBI) ou de résidence par l'investissement (RBI), généralement connus sous le nom de « visas et passeports dorés » ou programmes d'investisseurs, qui accordent la citoyenneté ou la résidence aux citoyens européens et non européens en échange d'investissements financiers.

Au moins 5 000 ressortissants de pays tiers ont obtenu la citoyenneté de l'UE grâce à des programmes d'investissement. Les membres ont déploré le fait que l'opacité qui entoure l'origine des fonds liés aux programmes CBI et RBI ait considérablement accru les risques politiques, économiques et sécuritaires pour les pays européens.

Ces régimes devraient être progressivement supprimés selon les députés

Paradis fiscaux

Les députés ont rappelé l'importance d'une liste commune de juridictions non coopératives de l'UE à des fins fiscales ("la liste de l'UE") fondée sur des critères exhaustifs, transparents, solides, objectivement vérifiables et communément acceptés, et régulièrement actualisés.

Ils ont également déclaré que la Commission avait critiqué sept États membres - la Belgique, Chypre, la Hongrie, l'Irlande, le Luxembourg, Malte et les Pays-Bas - pour les lacunes de leurs systèmes fiscaux qui facilitent une planification fiscale agressive, arguant qu'ils sapent l'intégrité du marché unique européen. Les députés sont d'avis que ces juridictions peuvent également être considérées comme facilitant la planification fiscale agressive à l'échelle mondiale. Une révision de la liste de l'UE est prévue au cours du premier trimestre de 2019.

Contre-mesures

Les membres ont renouvelé leur appel à l'UE et à ses États membres pour qu'ils prennent des contre-mesures efficaces et dissuasives contre les juridictions non coopératives en vue d'encourager une bonne coopération en matière fiscale. Ils ont déploré le fait que la plupart des contre-mesures proposées par le Conseil sont laissées à la discrétion nationale.

Les États membres devraient adopter un ensemble unique de contre-mesures strictes, telles que la retenue à la source, l'exclusion des appels d'offres pour les marchés publics, des exigences accrues en matière d'audit, etc.

Ces contre-mesures devraient également être envisagées à l'encontre des États-Unis si ce pays n'assure pas la réciprocité de la Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA).