Prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme

2013/0025(COD)

La Commission a présenté un rapport sur l’interconnexion des mécanismes automatisés centralisés nationaux (registres centraux ou systèmes électroniques centraux de recherche de données) des États membres concernant les comptes bancaires.

Conformément à la directive anti-blanchiment (2015/849/UE), les États membres doivent mettre en place au 10 septembre 2020 des mécanismes automatisés centralisés nationaux, tels que des registres centraux ou des systèmes électroniques centraux de recherche de données, permettant l’identification de toute personne physique ou morale qui détient ou contrôle des comptes de paiement, des comptes bancaires et des coffres-forts.

Objectifs des mécanismes centralisés

Au titre de la directive anti-blanchiment, l’objectif des mécanismes centralisés concernant les comptes bancaires est d’améliorer la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et leur accès est limité à certains pouvoirs publics. La directive anti-blanchiment définit un ensemble minimal d’informations à inclure dans ces mécanismes centralisés. Elle prévoit par ailleurs que les cellules de renseignement financier devraient y avoir accès de manière immédiate et non filtrée, et que les autres autorités compétentes devraient également y avoir accès pour l’accomplissement des missions qui leur incombent au titre de ladite directive.

L’accès des autorités compétentes aux registres centraux des comptes bancaires ou aux systèmes centraux de recherche de données aura une forte incidence dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, les infractions sous-jacentes associées ou le financement du terrorisme et, plus généralement, dans la lutte contre les formes graves de criminalité. Ayant en vue les objectifs de la directive anti-blanchiment et de la directive facilitant l’accès aux informations financières et d’une autre nature, une interconnexion future des registres des comptes bancaires et des systèmes de recherche de données à l’échelle de l’Union faciliterait la coopération transfrontière des autorités compétentes participant à la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et d’autres formes graves de criminalité.

La Commission doit évaluer les conditions et les spécifications techniques et procédures permettant d’assurer une interconnexion sécurisée et efficace des mécanismes automatisés centralisés. Ainsi, ce rapport évalue les différentes solutions informatiques à l’échelle de l’Union qui sont déjà opérationnelles ou en cours d’élaboration et qui pourraient servir de modèles pour une interconnexion possible des mécanismes centralisés. Un instrument législatif serait nécessaire pour assurer une telle interconnexion.

Le présent rapport doit être examiné en liaison avec le rapport de la Commission sur l’évaluation supranationale des risques, le rapport de la Commission sur les cellules de renseignement financier et le rapport de la Commission sur l’évaluation des récents cas présumés de blanchiment de capitaux impliquant des établissements de crédit de l’Union européenne, qui sont présentés parallèlement.

État des lieux

Registres centralisés ou systèmes électroniques de recherche de données concernant les comptes bancaires dans les États membres

À l’heure actuelle, les mécanismes centralisés contenant des informations sur les comptes bancaires sont opérationnels dans 15 États membres. D’après leurs réponses, les États membres ont une légère préférence pour la solution technique du registre centralisé : en effet, ils sont 17 à avoir ou à être sur le point d’avoir des registres centralisés, contre 9 à déclarer avoir ou envisager d’avoir des systèmes centraux de recherche de données. Ils ont également exprimé une préférence pour les systèmes qui contiennent plus de données que l’ensemble minimal d’informations relatives au profil du compte.

Systèmes européens assurant l’interconnexion des bases de données électroniques nationales décentralisées

Plusieurs projets européens assurent l’interconnexion décentralisée à l’échelle de l’Union des bases de données électroniques nationales. Les systèmes informatiques jugés pertinents pour ce rapport sont les suivants :

  • ECRIS : le système européen d’information sur les casiers judiciaires (ECRIS) a été mis en service en avril 2012 afin d’améliorer l’échange d’informations sur les casiers judiciaires dans l’ensemble de l’Union. Tous les États membres sont actuellement connectés à l’ECRIS. L’ECRIS garantit que les informations sur les condamnations pénales sont échangées entre les États membres de façon uniforme, rapide et compatible et offre aux juges et aux procureurs un accès aisé à toutes les informations relatives aux antécédents judiciaires des personnes concernées.
  • EUCARIS : le système d’information européen concernant les véhicules et les permis de conduire (EUCARIS) met en contact les États qui en sont membres afin qu’ils puissent partager les informations dont ils disposent sur les véhicules et les permis de conduire ainsi que d’autres données en lien avec les transports. L’EUCARIS est un mécanisme qui met en lien les différentes autorités chargées de l’immatriculation des véhicules et des permis de conduire dans l’Union. Grâce à ce système, les données concernant les propriétaires de véhicules et les assurances automobiles peuvent être échangées entre les points de contact nationaux des États membres.
  • IRI : l’interconnexion des registres d’insolvabilité (IRI) à l’échelle de l’Union, qui comprend deux projets différents. La première version du système (IRI 1.0) est accessible sur le portail e-Justice européen depuis juillet 2014. Elle a été élaborée en tant que projet pilote avec la participation volontaire de certains États membres. La seconde version (IRI 2.0) interconnectera les registres d’insolvabilité nationaux de tous les États membres (à l’exception du Danemark). Tous les États membres doivent assurer ladite interconnexion d’ici juin 2021.
  • BRIS : le système d’interconnexion des registres du commerce (BRIS) interconnecte les registres du commerce; il permet à ces derniers d’échanger des messages transfrontaliers sur des fusions et des succursales, et offre aux utilisateurs du portail e-Justice la possibilité d’obtenir des informations sur des entreprises de l’Union dans plusieurs langues différentes.
  • LRI : l’interconnexion des registres fonciers (LRI) est un projet volontaire en cours qui vise à fournir un point d’accès unique aux registres fonciers des pays participants de l’UE sur le portail e-Justice européen. Il devrait être opérationnel au cours du deuxième trimestre de l’année 2020.
  • E-CODEX : le système e-CODEX (communication du portail e-Justice au moyen d’échanges de données en ligne) facilite la mise en place d’une communication sécurisée dans les procédures pénales et civiles en prévoyant un système décentralisé pour l’échange de messages électroniques transfrontaliers dans le domaine de la justice.

Interconnecter les registres bancaires

Le système utilisé pour interconnecter les registres bancaires devra échanger des données entre différentes bases de données, chacune ayant ses propres modèles de données et normes sémantiques. Des normes sémantiques communes devront être établies, soit de façon native dans les systèmes ou en tant que couche de définition entre les différentes normes dans les États membres. Toutefois, avant de créer une nouvelle norme sémantique, la réutilisation de normes existantes doit être envisagée.

Prochaines étapes

Le rapport établit un ensemble d’éléments à prendre en compte pour pouvoir interconnecter les registres et les systèmes de recherche de données concernant les comptes bancaires, et illustre le fait que l’interconnexion de ces mécanismes centralisés est techniquement possible. Un tel système pourrait être un système décentralisé sur une plateforme commune à l’échelle de l’Union. La technologie déjà développée par la Commission européenne dans le contexte des différents modèles analysés pourrait être employée.

Ces dernières années, différents systèmes ont suivi la réutilisation des éléments constitutifs communs. Ces éléments constitutifs sont par essence un ensemble de normes et de spécifications techniques bien connus qui peuvent être appliqués aux difficultés récurrentes telles que l’échange sécurisé d’informations. Le recours constant à ces éléments constitutifs est une approche prônée par la politique numérique actuelle de la Commission, envers laquelle les États membres se sont engagés dans la déclaration de Tallinn sur l’administration en ligne.

Une interconnexion future des mécanismes automatisés centralisés nationaux pourrait tirer parti de l’utilisation des mêmes éléments constitutifs pour accélérer sa création et son alignement avec les règlements européens pertinents tels que le règlement eIDAS.

Étant donné qu’une future interconnexion à l’échelle de l’Union des mécanismes centralisés accélérerait l’accès aux informations financières et faciliterait la coopération transfrontalière des autorités compétentes, la Commission prévoit de consulter également les parties prenantes pertinentes, les pouvoirs publics, ainsi que les cellules de renseignement financier, les autorités répressives et les bureaux nationaux de recouvrement, car ils pourraient être les «utilisateurs finaux» d’un possible système d’interconnexion.