Libre circulation des marchandises: élimination des entraves aux échanges, mécanisme d'intervention de la Commission

1997/0330(CNS)

Le présent document de travail des services de la Commission concerne l'évaluation du règlement (CE) n° 2679/98 relatif au fonctionnement du marché intérieur en ce qui concerne la libre circulation des marchandises entre les États membres.

L’évaluation a pour objet d'apprécier le fonctionnement du règlement au cours de la période 1999-2018 tel qu'il est appliqué par les États membres de l'UE. L'évaluation s'appuie sur les conclusions des précédentes évaluations réalisées par la Commission depuis l'adoption du règlement en 1998.

La période couverte par l’évaluation va de 1999 à la mi-2019. La portée géographique de l'évaluation inclut tous les États membres de l'UE. Les États de l'AELE et la Turquie n'ont pas été inclus. En termes d'études de cas, l'accent a été mis sur la France, l'Espagne, la Bulgarie, la Grèce, la Slovaquie, l'Autriche et la Belgique.

Cette évaluation fait suite à la décision prise en 2016 par la Commission européenne, les autorités nationales et plusieurs acteurs clés sur la nécessité d'évaluer le règlement à la lumière des derniers développements et défis tels que ceux liés à l'utilisation des nouvelles technologies.

L'exercice d'évaluation a été lancé en 2017 et le présent document de travail conclut ce processus d'évaluation.

Principaux constats

Sur la base des résultats de l'évaluation et sans préjudice des lacunes identifiées par l'évaluation, les principales réalisations du règlement sont doubles : 

i) il a permis l'échange d'informations entre la Commission et les points de contact nationaux  (PCN) par le biais du mécanisme d'alerte précoce ;

ii) il s'est révélée être un outil efficace pour faire pression sur les États membres afin qu'ils traitent rapidement les cas de perturbations dans la circulation physique des marchandises et a amélioré la gestion des entraves.

Efficacité et efficience

L'efficacité du règlement est compromise par le manque de connaissance, en particulier de la part des autorités locales, de l'existence du règlement, de son rôle, de ses mécanismes et des objectifs qu'il vise à poursuivre. Par conséquent, de nombreuses entraves ou perturbations ne sont pas signalées.  L'absence d'un mécanisme de contrôle du respect par les États membres de leurs obligations nuit également à l'efficacité du règlement.

L'échange d'informations par courrier électronique entre la Commission et les États membres ne semble pas suffisant. Le règlement ne garantit pas que les autres parties prenantes seront informées. En outre, il n'existe pas de canal de communication direct entre les PCN des différents États membres lorsqu'un obstacle se présente. De plus, l'information en temps réel sur les entraves actuelles ou futures n'est pas accessible au public. 

Le principal facteur externe influant sur l'efficacité du règlement est que, pour ne pas entraver le droit de grève, le règlement n'empêche pas l'apparition d'entraves, de sorte qu'il n'empêche pas les pertes pour les opérateurs économiques, bien qu'il puisse contribuer à réduire la durée des perturbations et donc les dommages connexes.

Cohérence, pertinence et valeur ajoutée de l'UE

Pour que le règlement reste cohérent, pertinent et doté d'une valeur ajoutée européenne, il doit être adapté aux nouveaux développements technologiques afin d'assurer une communication plus rapide des entraves et d'informer toutes les parties intéressées et parties prenantes. Il est également souligné que certains nouveaux défis ne sont pas abordés par le règlement, tels que les fluctuations des prix agricoles, les flux migratoires et les menaces pour la sécurité.

En termes de cohérence, le règlement est considéré comme un instrument utile qui n'interfère pas avec d'autres politiques européennes ou nationales, en particulier avec les politiques des transports et de l'environnement. L'utilisation du règlement dans le cas de grèves suscite toutefois certaines préoccupations, étant donné que l'objectif du règlement est de prévenir les entraves tout en ne portant pas atteinte aux droits fondamentaux tels que le droit de grève.

Actuellement, le règlement ne prévoit pas de mécanisme de compensation pour les pertes subies par les particuliers. La Commission n'est donc pas en mesure d'exiger que les dommages subis par les particuliers en cas d'obstacle soient indemnisés.

Conclusion

Les problèmes mentionnés  pourraient être atténués par les moyens suivants :

- une meilleure définition des "entraves", du moment de la communication ("immédiatement" et "dès que possible") et des "mesures nécessaires et proportionnées", afin de garantir la bonne application du règlement ;

- la mise en place d'un mécanisme de suivi pour vérifier le respect par les États membres de leurs obligations d'informer la Commission ;

- l'introduction d'une solution numérique unifiée avec des informations en temps réel accessibles aux entreprises et aux associations nationales pour accélérer l'échange d'informations et réduire l'asymétrie de l'information ;

- une procédure transparente, non discriminatoire et efficace pour indemniser les opérateurs économiques de toute perte ou dommage lié aux obstacles.

Compte tenu du volume croissant de marchandises transportées dans l'UE, les obstacles à la libre circulation des marchandises peuvent entraîner des pertes économiques plus importantes aujourd'hui que lors de l'adoption initiale du règlement, tant pour les particuliers que pour les économies nationales. Par conséquent, le renforcement de la politique contenue dans le règlement pourrait contribuer à la rendre plus efficace et pourrait apporter des avantages au fonctionnement du marché intérieur de l'UE et à ses opérateurs économiques. 

Par le passé, les institutions de l'UE et les parties prenantes concernées ont été dissuadées de s'engager dans des actions visant à renforcer la politique énoncée dans le règlement en raison de la règle de l'unanimité requise pour réviser le règlement actuel. Toutefois, il convient de noter que toutes les actions visant à renforcer davantage la politique ne nécessiteraient pas nécessairement des modifications législatives et que d'autres bases du Traité pourraient également être examinées.

Si, par exemple, l'introduction d'un mécanisme de surveillance et la mise en place d'un mécanisme de compensation sont susceptibles d'exiger des modifications législatives, l'échange direct d'informations entre les États membres et les autres parties intéressées, via une plate-forme électronique centrale, est moins susceptible d'exiger des modifications législatives. Quoi qu'il en soit, cette question devrait faire l'objet d'une enquête plus approfondie. 

Toute tentative visant à développer davantage les mesures visant à atténuer les problèmes identifiés dans cette évaluation devrait être analysée à la lumière des développements technologiques en cours qui exigent, comme l'évaluation l'a montré, de réfléchir éventuellement d'une manière différente au fonctionnement du règlement « fraises ».