Détachement de conducteurs dans le secteur du transport routier
Le Conseil a adopté sa position en première lecture en vue de l'adoption dune directive du Parlement européen et du Conseil établissant des règles spécifiques en ce qui concerne la directive 96/71/CE et la directive 2014/67/UE pour le détachement de conducteurs dans le secteur du transport routier et modifiant la directive 2006/22/CE quant aux exigences en matière de contrôle et le règlement (UE) n° 1024/2012.
Cette proposition a été présentée dans le cadre du premier train de mesures sur la mobilité. Elle a pour objectif général :
- de garantir des conditions de travail décentes et une protection sociale adéquate aux conducteurs et,
- de préciser, harmoniser et réduire les exigences administratives imposées aux opérateurs, en leur permettant de fournir des services dans un environnement de concurrence loyale.
La proposition répond en outre à la nécessité, exprimée au cours de la révision de la directive concernant le détachement de travailleurs au moyen de la directive (UE) 2018/957, d'établir des règles sectorielles en matière de détachement pour les conducteurs dans le secteur du transport routier.
La position du Conseil en première lecture reflète le compromis intervenu dans les négociations entre le Conseil et le Parlement européen. Elle comporte les principaux éléments suivants:
Dérogations au régime de détachement pour les travailleurs effectuant des transports internationaux par route
La position du Conseil concerne l'introduction d'une dérogation aux règles générales en matière de détachement liée au degré élevé de mobilité, ainsi que la portée de cette dérogation.
En vertu de la position du Conseil, la dérogation serait limitée au cas où un contrat de service existe entre l'employeur envoyant le conducteur et une partie opérant dans l'État membre d'accueil ; les opérations pour compte propre non couvertes par des contrats de service ne seraient donc pas exclues.
Les activités exemptées des règles en matière de détachement comprendraient notamment les «opérations de transport bilatérales» aussi bien dans le transport de marchandises que dans le transport de voyageurs, et supposeraient une flexibilité très limitée en ce qui concerne les arrêts supplémentaires liés au transport.
Au cours du trajet vers le pays de destination et du trajet de retour, une activité supplémentaire de chargement et/ou déchargement de marchandises serait autorisée dans chaque sens sans relever du régime de détachement, ou bien zéro au cours du trajet vers le pays de destination et jusqu'à deux au cours du trajet de retour. Le transit serait également exclu des règles sur le détachement.
Pour tous les autres types d'opérations, y compris la prestation de services de transport nationaux dans un autre État membre (cabotage), le régime de détachement s'appliquerait pleinement dès le premier jour des opérations. Des règles similaires s'appliqueraient au transport de passagers, avec un arrêt supplémentaire dans le cadre des opérations bilatérales.
À des fins de contrôle, la flexibilité limitée en ce qui concerne les arrêts supplémentaires liés au transport dépendrait de l'enregistrement, dans le véhicule, des franchissements de frontières ainsi que, à un stade ultérieur, de l'enregistrement des activités de chargement et de déchargement.
La position du Conseil clarifie qu'un conducteur qui transite par le territoire d'un autre État membre n'est pas un travailleur détaché. Elle indique également que la somme des présences interrompues d'un conducteur dans un État membre d'accueil ne constitue pas à un détachement de longue durée.
Opérateurs de pays tiers
La position du Conseil précise que les entreprises de transport établies dans un État non membre ne peuvent pas obtenir un traitement plus favorable que les entreprises établies dans un État membre, y compris lorsqu'elles effectuent des opérations de transport dans le cadre d'accords bilatéraux ou multilatéraux donnant accès au marché de l'Union ou à des parties de celui-ci.
Transparence concernant les conditions de travail et d'emploi
Le Conseil a introduit une règle spéciale relative au devoir de transparence de l'État membre d'accueil en ce qui concerne ses conditions de travail et d'emploi, y compris celles fixées par certaines conventions collectives.
Exigences administratives relatives au détachement, au contrôle et à l'application
Les États membres ne pourraient imposer que les exigences suivantes:
- lobligation pour lopérateur de transport routier établi dans un autre État membre de soumettre une déclaration via le système d'information du marché intérieur (IMI) aux autorités nationales compétentes de lÉtat membre dans lequel le conducteur est détaché au plus tard au début du détachement. Cette déclaration devrait notamment contenir des informations sur l'identité de l'opérateur, les coordonnées d'un gestionnaire de transport, lidentité, l'adresse du lieu de résidence et le numéro du permis de conduire du conducteur, la date de début du contrat de travail du conducteur et le droit applicable à ce contrat, les dates prévues pour le début et la fin du détachement ;
- lobligation pour lopérateur de transport de veiller à ce que le conducteur ait à sa disposition, sur support papier ou en format électronique, lorsquelles sont demandées lors dun contrôle sur route, la preuve des opérations de transport ayant lieu dans l'État membre d'accueil ainsi que les enregistrements du tachygraphe;
- lobligation pour lopérateur de transport de fournir, après la période de détachement, à la demande expresse des autorités compétentes de l'État membre dans lequel le détachement a eu lieu, les documents ayant trait à la rémunération du conducteur pour la période de détachement, le contrat de travail, les relevés d'heures relatifs au travail du conducteur et la preuve de paiement.
Sanctions
La position du Conseil oblige les États membres à prévoir des sanctions applicables en cas de violation des dispositions adoptées en vertu de la directive, et à sanctionner les acteurs de la chaîne logistique lorsqu'ils ont ou auraient dû avoir connaissance de telles violations. En outre, elle introduit une disposition relative au «contrôle avec des moyens intelligents», qui oblige les États membres à intégrer le contrôle des règles en matière de détachement dans une stratégie de contrôle globale.
Coopération administrative en matière d'application
Les règles relatives à la coopération administrative sont modifiées afin de mieux les distinguer de l'échange d'informations au titre du règlement (UE) n° 1071/2009, qui est déjà réalisé au moyen d'un système électronique spécifique. Pour les autres cas, le texte du Conseil prévoit l'utilisation du système IMI et fixe des délais de réponse pour les autorités nationales.
Intégration de la directive 2002/15/CE dans les normes d'application relatives à la législation sociale
La directive 2002/15/CE complète le règlement relatif aux durées de conduite, aux pauses et aux temps de repos qui doivent être observés par les conducteurs travaillant dans le secteur des transports, par exemple en limitant la durée maximale hebdomadaire globale de travail des conducteurs et le travail de nuit.
L'intégration de cette directive dans les normes de contrôle concerne plusieurs aspects: les systèmes de contrôles nationaux, le nombre minimal de contrôles et la transmission des résultats, le déclenchement de contrôles dans les locaux à la suite d'infractions graves, les systèmes nationaux de classification par niveau de risque et l'échange d'informations.
Normes d'application révisées en ce qui concerne la législation sociale
Le système de classification par niveau de risque, outre qu'il serait étendu aux règles nationales au titre de la directive relative au temps de travail, subirait deux modifications : 1) la Commission introduirait une formule commune permettant de calculer le niveau de risque d'une entreprise et, 2) les informations nationales relatives au niveau de risque seraient accessibles aux autorités de contrôle dans l'ensemble de l'UE, y compris dans le cadre de la réalisation des contrôles sur route.
Transposition et évaluation
Les États membre devraient transposer la directive dans les 18 mois qui suivent son entrée en vigueur. Une évaluation par la Commission de la mise en uvre de la directive, et en particulier des dispositions spéciales relatives aux conducteurs détachés, est prévue pour la fin 2025.