Finance numérique: risques émergents liés aux crypto-actifs - enjeux en matière de réglementation et de surveillance dans le domaine des services, institutions et marchés financiers

2020/2034(INL)

Le Parlement européen a adopté par 542 voix pour, 63 contre et 89 abstentions, une résolution contenant des recommandations à la Commission concernant la finance numérique: risques émergents dans les crypto-actifs - défis liés à la réglementation et à la surveillance dans le domaine des services, institutions et marchés financiers.

Les députés ont rappelé que la finance numérique joue un rôle clé dans le développement des activités financières, et qu’elle sera un élément majeur du succès de l’union des marchés des capitaux (UMC) en améliorant l’offre de solutions de financement pour les entreprises et les citoyens ainsi que les possibilités d’investissement. Ils ont souligné la nécessité accrue du réexamen des mesures relatives à la réglementation de la finance numérique, en tenant tout particulièrement compte de l’importance croissante de ce secteur dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

Prendre des mesures au niveau de l’Union

Le Parlement s’est félicité de l’adoption par la Commission de l’ensemble de mesures sur la finance numérique, dont deux propositions législatives sur les crypto-actifs et la cyber-résilience, tout en regrettant que la Commission n’ait pas traité correctement les problèmes relatifs au blanchiment de capitaux, au financement du terrorisme et aux activités criminelles liées aux crypto-actifs.

Étant donné la nature intergouvernementale de la finance numérique, le Parlement a invité la Commission à  coordonner étroitement ses travaux avec les forums internationaux et les organismes de réglementation pour ce qui concerne l’élaboration de normes internationales. Il a souligné que les mesures prises au niveau de l’Union dans le domaine de la finance numérique devraient reposer sur les principes suivants:

- application des mêmes règles aux mêmes activités et services, et aux risques associés;

- proportionnalité et neutralité technologique;

- approche fondée sur les risques, la transparence et la responsabilité;

- respect des droits fondamentaux, en particulier du droit à la protection de la vie privée et des données à caractères personnel;

- niveau élevé de protection des consommateurs et des investisseurs;

- conditions de concurrence équitables;

- approche favorable à l’innovation.

Recommandations

Le Parlement a formulé une série de recommandations à la Commission quant aux actions à proposer : 

1)  Définir un cadre pour les crypto-actifs

Le terme «crypto-actifs» est utilisé pour désigner une grande variété d’actifs dématérialisés, parmi lesquels les monnaies et les jetons virtuels. À l’heure actuelle, les crypto-actifs ne sont émis ni garantis par aucune banque centrale ou autorité publique de l’Union et ils peuvent répondre à divers usages, y compris un usage en tant que monnaie d’échange, à des fins d’investissement ou pour accéder à un bien ou à un service.

Les députés estiment souhaitable d’élaborer une taxonomie paneuropéenne complète pour les nouveaux produits tels que les crypto-actifs afin de favoriser une compréhension commune, de faciliter la collaboration entre les juridictions et d’offrir une plus grande certitude juridique aux acteurs du marché engagés dans des activités transfrontalières.

Le Parlement a recommandé la présentation d’une proposition législative portant sur les crypto-actifs, qui apporterait la sécurité juridique en ce qui concerne le traitement des crypto-actifs, tout en garantissant un niveau élevé de protection des consommateurs et des investisseurs, d’intégrité du marché et de stabilité financière. Cette proposition législative devrait:

- fournir des orientations sur les procédures réglementaires, prudentielles et de surveillance et sur le traitement des crypto-actifs;

- adopter des règles spécifiques en matière de transparence et d’intégrité du marché au moins équivalentes à celles de la directive sur les marchés d’instruments financiers (MiFID II) en ce qui concerne les émetteurs ou les promoteurs de crypto-actifs;

- remédier aux lacunes de la législation de l’Union sur les crypto-actifs, en classant par exemple certains d’entre eux dans la catégorie «valeurs mobilières» au titre de la MiFID II;

- élaborer un régime réglementaire sur mesure pour les activités nouvelles et évolutives liées aux crypto-actifs, telles que les offres initiales de jetons ou les offres initiales d’échange, et pour tout crypto-actif qui ne relève pas du cadre réglementaire existant.

- se pencher sur l’impact environnemental du crypto-minage.

Le Parlement a également recommandé i) de tendre vers une convergence plus forte en matière de réglementation et de surveillance; ii) d’élaborer un cadre législatif pour les cryptomonnaies stables; iii) de présenter une proposition de cadre commun au niveau de l’Union portant création d’un «bac à sable» paneuropéen pour les services financiers numériques; iv) de renforcer l’application du dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme en ce qui concerne les crypto-actifs.

2) Une stratégie commune en matière de cyber-résilience du secteur financier

Le Parlement a recommandé de présenter une proposition législative sur la cyber-résilience qui garantisse la cohérence des normes en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC) et de cybersécurité dans l’ensemble du secteur financier de l’Union dans le respect des normes internationales. Un tel cadre devrait être tourné vers l’avenir et, en même temps, combler les failles et les lacunes réglementaires susceptibles de faire peser un risque sur les entreprises, les investisseurs et les consommateurs.

Les modifications législatives dans le domaine des exigences de cybersécurité devraient avant tout porter sur: i) la modernisation de la gouvernance des TIC et de la gestion des risques, et le respect des normes internationales; ii) l’alignement des règles de déclaration en matière d’incidents informatiques; iii) un cadre commun relatif aux essais en matière d’infiltration et de résilience opérationnelle dans tous les secteurs financiers; iv) la surveillance des fournisseurs tiers critiques dans le domaine des TIC et l’application auxdits fournisseurs de normes minimales.

3) Données

Le rôle traditionnel de l’Union en tant que source de normes à l’échelle mondiale appelle une approche réglementaire ambitieuse de la gestion des données par les entités financières, avec en son centre la protection des consommateurs. La Commission a été invitée à :

- proposer un cadre relatif à la dématérialisation du processus de souscription et à l’utilisation des identités financières numériques qui tienne également compte des mesures nationales en vigueur. Un tel cadre devrait être conforme à la législation pertinente de l’Union en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et de protection des données et de respect de la vie privée;

- contribuer à renforcer la responsabilité, la compréhensibilité et la transparence des algorithmes, et du traitement et de l’analyse des données.