Mise en œuvre du règlement Dublin III

2019/2206(INI)

Le Parlement européen a adopté par 448 voix pour, 98  contre et 149 abstentions, une résolution sur la mise en œuvre du règlement Dublin III.

La résolution indique que 1.393.920 demandeurs d’asile ont demandé une protection internationale dans les pays de l’UE+ en 2015 et que ce chiffre était de 1.292.740 en 2016, soit une multiplication par quatre par rapport à 2012 et à 2013. Le nombre de demandes de protection internationale dans les pays de l’UE+ est reparti à la hausse entre 2018 (665.920) et 2019 (738.425), ce qui représente 0,13 % de la population totale de l’Union en 2019. Les enfants représentent près de la moitié des demandes d’asile présentées dans l’Union.

Le Parlement a constaté que le règlement Dublin III, dans sa conception et sa mise en œuvre, n’avait pas atteint son principal objectif, à savoir la détermination rapide de l’État membre responsable d’une demande d’asile et que dès lors, il n’était pas parvenu à garantir une répartition équitable de la responsabilité entre les États membres ni un accès rapide aux procédures d’asile.

Intégrer le principe de solidarité dans le régime d’asile européen commun

Le règlement Dublin III actuel fait peser une responsabilité disproportionnée sur une minorité d’États membres se trouvant en première ligne en particulier lorsque les arrivées sont très nombreuses.

Le Parlement estime dès lors que l’Union a besoin d’un mécanisme de réciprocité durable, qui fixe des règles équitables pour l’attribution de la responsabilité entre les États membres dans le plein respect du droit fondamental des demandeurs d’asile à la sécurité et à la protection. Il juge par ailleurs essentiel de fournir davantage de ressources et de capacités aux États membres situés en première ligne, par exemple par l’intermédiaire du Bureau européen d’appui en matière d’asile (EASO).

Selon les députés, la protection des droits fondamentaux des demandeurs d’asile devrait toujours rester au cœur de ce mécanisme, lequel devrait permettre la participation d’organisations de la société civile qui offrent une assistance professionnelle, en particulier de nature juridique, aux personnes ayant besoin d’une protection internationale.

Les États membres sont invités à faire un meilleur usage de la « clause discrétionnaire » qui permet à un État membre de prendre en charge une demande d’asile même s’il n’a pas été désigné comme l’État membre responsable en vertu du règlement Dublin III, afin de faire face aux situations difficiles et aux urgences humanitaires en l’absence d’un mécanisme de réciprocité permanent.

Les députés regrettent que le Conseil, contrairement au Parlement n’ait pas pris position sur la proposition de refonte «Dublin IV», estimant que ce blocage pourrait être interprété comme une violation du principe de coopération loyale entre les institutions de l’Union.

Protéger les droits fondamentaux

Le Parlement a rappelé que la protection des droits fondamentaux devait être au centre de la mise en œuvre de toutes les mesures prises pour mettre en œuvre le règlement Dublin III, notamment la protection des enfants, des victimes de trafic, des personnes LGBTI et de toute autre personne en situation de vulnérabilité.

La résolution a notamment insisté sur :

- le droit des demandeurs d’asile d’être pleinement informés des procédures;

- l’évaluation correcte des risques auxquels les demandeurs peuvent s’exposer dans les États membres de destination;

- le principe selon lequel la rétention des demandeurs d’asile dans le cadre de la procédure de Dublin ne peut être imposée que comme une mesure de dernier ressort, la durée du placement en rétention devant être aussi courte que possible;

- la prééminence de l’objectif ultime de protéger les enfants, par exemple de la traite, afin de garantir aux enfants migrants un accès rapide à l’éducation, aux soins de santé et à un hébergement approprié;

- la nécessaire harmonisation du niveau de preuve requis en ce qui concerne le regroupement familial pour que les critères et les exigences soient plus faciles à remplir;

- la priorité accordée à la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les procédures de Dublin.

Simplifier les procédures, réduire sensiblement les délais et défendre le droit à un recours effectif

Le Parlement constate que les lacunes concernant l’organisation structurelle, les ressources et le fonctionnement des autorités nationales compétentes en matière d’asile ont contribué à retarder les procédures de Dublin et entravé l’application du règlement.

Les députés mentionnent en particulier le manque d’effectifs dans unités nationales «Dublin», le manque de coopération et de partage d’informations entre les États qui compromet le principe de solidarité dans l’Union, l’application excessive et inappropriée du critère d’ «entrée irrégulière» qui fait peser une charge disproportionnée sur les pays de première entrée, ainsi que le manque de clarté dans le calcul des délais et la détermination du moment qui marque le début de chaque procédure.

La résolution note également la persistance de problèmes au niveau des États membres, tels que l’accès limité à des représentants juridiques indépendants dans les centres d’accueil éloignés, les faibles compensations financières allouées à l’assistance juridique, le manque de locaux adaptés pour les entretiens préparatoires et privés, et l’insuffisance de l’aide juridique fournie aux demandeurs dans les centres de rétention.

La Commission est invitée à évaluer la mise en œuvre globale du RAEC, ainsi que les lacunes et défauts éventuels du règlement Dublin III qui entraînent une charge disproportionnée de responsabilité pour les pays situés aux frontières extérieures de l’Union.

Renforcer la gouvernance et la convergence entre les États

Le Parlement souligne que les États membres pourraient, avec l’aide de la Commission et en coordination avec elle, élaborer des plans de prévention lorsque l’application du règlement pourrait être compromise par un risque avéré de pressions particulières sur les régimes d’asile des États ou de problèmes de fonctionnement de ces régimes,

Ces mesures préventives pourraient tenir compte des informations fournies par la Commission et l’ESAO, pourraient conduire à une solidarité réelle et concrète, d’une part avec les États membres dont les régimes d’asile en général sont particulièrement sollicités, et d’autre part avec les demandeurs, et permettraient une meilleure préparation en cas de nouvelle crise en matière d’asile.