Vers un mécanisme européen d’ajustement des émissions de carbone aux frontières compatible avec l’OMC

2020/2043(INI)

La commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire a adopté un rapport d’initiative de Yannick JADOT (Verts/ALE, FR) intitulé «vers un mécanisme européen d’ajustement des émissions de carbone aux frontières compatible avec l’OMC».

Les députés estiment que le fait de garantir une tarification efficace et significative du carbone, dans le cadre d’un environnement réglementaire plus large, pourrait inciter à développer des méthodes de production présentant une empreinte carbone plus faible et pourrait stimuler les investissements dans l’innovation et les nouvelles technologies.

Le rapport indique que les émissions de gaz à effet de serre (GES) intégrées dans les importations vers l’Union n’ont cessé d’augmenter, sapant ainsi les efforts déployés par l’Union pour réduire son empreinte carbone mondiale. Les importations nettes de biens et de services dans l’Union représentent plus de 20 % des émissions de CO2 de l’Union.

Un mécanisme européen d’ajustement des émissions de carbone aux frontières compatible avec l’OMC

Les députés ont soutenu la mise en place d’un mécanisme européen d’ajustement carbone aux frontières, à condition qu’il soit compatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et les accords de libre-échange (ALE) de l’Union et qu’il ne soit pas utilisé abusivement pour renforcer le protectionnisme.

En appuyant les politiques climatiques de l’Union et mondiales en faveur de la neutralité en gaz à effet de serre, dans le droit fil des objectifs de l’accord de Paris, un tel mécanisme permettrait de réduire les émissions mondiales de CO2 et de prévenir les fuites de carbone. Il encouragerait également les industries européennes et les partenaires commerciaux de l’Union à décarboner leurs industries.

Selon les députés, l’introduction d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières devrait:

- faire partie d’un ensemble de mesures législatives visant à garantir la réduction rapide des émissions de GES résultant de la production et de la consommation de l’Union, notamment en renforçant l’efficacité énergétique et le déploiement des énergies renouvelables;

- être associé à des politiques visant à favoriser les investissements dans les processus industriels à faible intensité de carbone, notamment au moyen d’outils de financement innovants et d’une politique industrielle européenne à la fois ambitieuse sur le plan environnemental et socialement équitable, en vue de guider une réindustrialisation décarbonée de l’Europe.

Lien avec la révision du système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE)

Les députés ont préconisé d’étudier les modalités pour la conception d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières couplée à la révision du SEQE de l’UE, de façon à garantir leur complémentarité et leur cohérence.

Pour prévenir d’éventuelles distorsions sur le marché intérieur et le long de la chaîne de valeur, le mécanisme devrait couvrir tous les produits importés dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE), y compris lorsqu’ils sont incorporés dans des produits intermédiaires ou finaux.

Le rapport a souligné que, dans une première phase (dès 2023) et à la suite d’une analyse d’impact, le mécanisme devrait couvrir le secteur de l’électricité et les secteurs industriels à forte intensité d’énergie tels que ceux du ciment, de l’acier, de l’aluminium, du raffinage de pétrole, du papier, du verre, des produits chimiques et des engrais, qui continuent de bénéficier de quotas gratuits en quantités importantes et représentent encore 94 % des émissions industrielles de l’Union.

Les députés estiment qu’afin de répondre au risque de fuite de carbone potentielle tout en respectant les règles de l’OMC, le mécanisme devrait facturer la teneur en carbone des importations d’une manière qui reflète les coûts du carbone payés par les producteurs de l’Union. La tarification du carbone dans le cadre du mécanisme devrait refléter l’évolution dynamique du prix des quotas de l’Union dans le cadre du SEQE de l’UE tout en garantissant la prévisibilité et en réduisant la volatilité des prix du carbone.

Aspects liés au commerce d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières

Les députés exigent que l’accord de Paris et son objectif de 1,5 °C figurent parmi les grands principes directeurs de la politique commerciale, auxquels toutes les initiatives en matière de commerce ainsi que leurs instruments de politique doivent être ajustés, par exemple en intégrant ce principe comme élément essentiel des ALE.

Soulignant que l’Union a joué un rôle de premier plan dans l’action mondiale en faveur du climat, le rapport encourage la Commission et les États membres à intensifier leur diplomatie climatique aussi bien avant qu’après l’adoption de la proposition législative pour un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, et à veiller en particulier au dialogue continu entre les partenaires commerciaux, pour stimuler l’action mondiale pour le climat.

Alimenter le budget européen en tant que nouvelle ressource propre

Les députés ont soutenu l’intention de la Commission d’utiliser les recettes générées par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières comme de nouvelles ressources propres pour le budget de l’Union. Ils ont défendu l’objectif que cette ressource soit principalement affectée au pacte vert pour l’Europe et à la transition juste et qu’une partie significative soutienne les transitions dans les pays les plus pauvres et les plus impactés par le dérèglement climatique.