Le Parlement européen a adopté par 506 voix pour, 81 contre et 99 abstentions, une résolution sur la réforme de la politique de lUnion en matière de pratiques fiscales dommageables (y compris la réforme du groupe «Code de conduite»).
Lutte contre lévasion fiscale
Les politiques de lutte contre lévasion fiscale ont entraîné une diminution des régimes fiscaux préférentiels dans le monde entier, en particulier dans lUnion. Toutefois, de nouvelles formes de pratiques fiscales dommageables sont apparues, notamment par la transformation de régimes préférentiels en régimes généraux agressifs. Selon certaines études, le niveau d'imposition effective des grandes multinationales est inférieur à celui des PME nationales.
Le groupe «Code de conduite» sur la fiscalité des entreprises mis en place au sein du Conseil est parvenu efficacement à dissuader les régimes fiscaux préférentiels. Toutefois, il nest pas parvenu à éradiquer les régimes fiscaux déloyaux octroyés par certains États membres aux grandes entreprises, comme les accords préalables dommageables en matière de prix («rescrits fiscaux»), et les avantages concurrentiels déloyaux qui en découlent.
Mesures prises actuellement par lUnion pour lutter contre les pratiques fiscales dommageables
Les députés ont souligné que la multiplication des scandales fiscaux au cours de la dernière décennie (Lux Leaks, Panama Papers, Paradise Papers, etc.) impliquant des multinationales a révélé lampleur et la gravité des pratiques fiscales dommageables et lurgence de trouver des solutions définitives pour y remédier.
La fraude fiscale et lévasion fiscale entraînent, pour les États membres, une perte inacceptable de revenus importants, actuellement nécessaires pour faire face aux conséquences dévastatrices de la pandémie. Selon les estimations de lOCDE, lérosion de la base dimposition et le transfert de bénéfices (BEPS) coûte de 4 à 10% des recettes fiscales des entreprises au niveau mondial, soit 84 à 202 milliards dEUR par an.
Le Parlement a salué les actions engagées à léchelle de lUnion et à léchelle internationale pour renforcer les principes de transparence fiscale, la lutte contre la concurrence fiscale dommageable.
Si la concurrence fiscale entre pays nest pas en soi problématique, les députés estiment toutefois quil faut soumettre à des principes communs la mesure dans laquelle les pays peuvent utiliser leurs régimes fiscaux pour attirer les entreprises et les bénéfices. Or, la nature de la concurrence fiscale et les formes quelle prend ont considérablement changé au cours des deux dernières décennies et le Code de conduite na pas évolué pour faire face aux difficultés nouvelles qui se présentent.
Recommandations pour les futurs travaux de lUnion sur les pratiques fiscales dommageables
Le Parlement a salué la proposition de réforme du pilier 2 du cadre inclusif de lOCDE/G20 sur lérosion de la base dimposition et le transfert de bénéfices (le «cadre inclusif»), qui vise à définir des règles accordant aux pays un droit à récupérer limpôt lorsque dautres pays nont pas exercé leurs droits dimposition primaires ou que le paiement est soumis à de faibles niveaux dimposition effective, afin dimposer un taux dimposition effectif.
Les députés ont pris acte du nouvel élan donné aux négociations du cadre inclusif par les propositions récentes de ladministration des États-Unis ainsi que de laccord récent conclu par le G7, ce qui pourrait faciliter la conclusion, dici mi-2021, d'un accord sur le pilier 2 réunissant plus de 130 pays. Ils partagent lengagement pris par le G7 à légard d«un taux dimposition minimal au niveau mondial dau moins 15% pays par pays» comme base pour la poursuite des négociations.
Le Parlement a demandé ladoption dune définition du «niveau minimal de substance économique» compatible avec la norme mondiale de lOCDE basée de préférence sur une approche fondée sur des formules, qui évoluerait progressivement au fur et à mesure de laugmentation des revenus déclarés. Il a proposé que ce critère soit utilisé pour évaluer si un régime fiscal est potentiellement dommageable.
La Commission est invitée à élaborer des lignes directrices sur la manière de concevoir des incitations fiscales équitables et transparentes présentant moins de risques de distorsion du marché unique, garantissant une concurrence loyale et favorisant la création demplois.
Les députés se sont félicités que la Commission reconnaisse quil conviendrait denvisager dintroduire à lavenir une norme dimposition minimale au niveau mondial dans le Code de conduite, quun consensus soit trouvé ou non au niveau mondial, pour veiller à ce que toutes les entreprises paient un impôt équitable lorsquelles réalisent des bénéfices dans le marché unique.
Réforme du Code de conduite dans le domaine de la fiscalité des entreprises
Les députés estiment que les critères actuels du Code de conduite qui définissent les pratiques fiscales dommageables sont en partie dépassés étant donné quils mettent laccent sur les régimes préférentiels. Lefficacité du Code de conduite devrait donc être améliorée à la lumière des récents scandales fiscaux et des défis actuels que sont la mondialisation, la numérisation et limportance croissante des actifs incorporels.
Déplorant le caractère non contraignant du Code de conduite, les députés demandent une révision des critères, de la gouvernance et du champ d'application du Code de conduite au moyen dun instrument juridiquement contraignant fondé sur les dispositions intergouvernementales actuelles et comportant une procédure décisionnelle plus efficiente. Cette révision devrait se faire par un processus démocratique, transparent et responsable et faire appel à un groupe dexperts composé dexperts de la société civile, de la Commission et du Parlement.
Selon la résolution, la réforme des critères du Code de conduite devrait intégrer, en premier lieu, un critère lié au taux dimposition effectif conformément au taux dimposition effectif minimal convenu au niveau international dans le cadre du pilier 2 du cadre inclusif de lOCDE/G20 ainsi que des exigences solides et progressives en matière de substance économique tout en permettant une concurrence loyale.
Les députés ont également présenté un projet détaillé de développement dun «cadre sur les dispositifs fiscaux agressifs et les faibles taux» qui remplacerait in fine lactuel Code de conduite.