L'impact des réformes fiscales nationales sur l'économie de l'UE

2021/2074(INI)

La commission des affaires économiques et monétaires a adopté un rapport d’initiative de Markus FERBER (PPE, DE) sur l’impact des réformes fiscales nationales sur l’économie de l’UE.

Bien que la politique fiscale relève en grande partie de la responsabilité des États membres, le marché unique exige une harmonisation et une coordination dans la définition de la politique fiscale afin d’accroître l’intégration du marché unique et de prévenir l’érosion des bases d’imposition.

1) Incidences sur les petites et moyennes entreprises (PME)

Les coûts induits par le respect des obligations fiscales sont estimés, pour les grandes entreprises multinationales, à environ 2% des impôts acquittés, alors qu’ils s’élèveraient à 30% de ceux-ci pour les PME. Par ailleurs, les bénéfices des entreprises multinationales tendent à être moins imposés que ceux des entreprises nationales équivalentes.

Le rapport souligne que les différences entre les régimes fiscaux nationaux peuvent constituer des obstacles pour les PME qui tentent d’exercer leurs activités au-delà des frontières, les PME disposant de moins de ressources que les entreprises multinationales à consacrer au respect des obligations fiscales et à l’optimisation fiscale.

Les députés sont d’avis qu’une harmonisation de l’assiette fiscale, telle que l’assiette commune pour l’impôt sur les sociétés pourrait réduire les coûts de respect des obligations fiscales pour les PME menant des activités dans plus d’un État membre. Ils réaffirment que l’imposition des bénéfices dans le pays où les activités économiques ont lieu permettrait aux pouvoirs publics d’offrir des conditions de concurrence équitables à leurs PME.

Les députés soulignent la nécessité d’imposer les sociétés en recourant à une formule équitable et efficace pour la répartition des droits d’imposition entre les pays, qui tienne compte de facteurs tels que la main-d’œuvre et l’existence d’actifs corporels. Ils demandent aux États membres de se mettre rapidement d’accord sur une proposition ambitieuse de corpus réglementaire européen en matière d’impôt sur les sociétés.

Le rapport note également que de nombreux États membres ainsi que l’Union européenne ont mis en place des régimes spécifiques favorables aux PME. Les députés estiment que ce traitement spécial, bien que souhaitable en règle générale, risque, s’il est utilisé à grande échelle, de créer de nouvelles distorsions et de nouvelles possibilités de planification fiscale agressive. Les États membres sont invités à créer des avantages fiscaux pour les PME d’une manière qui soit cohérente avec le régime fiscal global et qui n’encourage pas les PME à conserver une taille modeste.

2) Harmonisation et coordination des politiques fiscales

Les députés rappellent que l’Union dispose principalement d’instruments juridiques non contraignants pour établir la coordination des politiques fiscales, les plus importants étant le groupe «Code de conduite (fiscalité des entreprises)» et les recommandations par pays dans le cadre du Semestre européen. Ils estiment que ces deux mécanismes doivent être encore améliorés.

Le rapport prend acte des limites du processus actuel de prise de décisions au sein du Conseil pour répondre aux besoins législatifs lorsqu’il s’agit de favoriser la coordination entre les États membres et de lutter contre les pratiques fiscales dommageables. Il demande que toutes les possibilités offertes par le traité FUE soient explorées. Il souligne également que le niveau idéal de coordination des politiques fiscales pour assurer une incidence maximale est la scène internationale, à travers le G20/l’OCDE, rappelant que les propositions fiscales de l’Union fondées sur des accords internationaux ont toujours été plus susceptibles d’être adoptées par le Conseil.

3) Recommandations et domaines de réforme

Le rapport souligne que dans les domaines qui revêtent une grande importance pour le fonctionnement du marché unique, notamment la fiscalité et l’union des marchés des capitaux, une plus grande harmonisation se justifie. Les réformes devraient se concentrer sur domaines clés suivants:

Distorsion fiscale en faveur de l’endettement

Les députés déplorent les incitations fiscales favorisant l’endettement dans le domaine de l’imposition des sociétés, qui permettent des déductions fiscales généreuses sur les paiements d’intérêts, alors qu’il n’existe pas de mécanisme similaire pour déduire les coûts de financement sur fonds propres, ce qui rend le financement par l’emprunt relativement plus attractif que le financement sur fonds propres.

Les députés rappellent qu’il est possible de réduire ces incitations soit en autorisant une nouvelle déduction des coûts de financement sur fonds propres soit en réduisant les possibilités de déduction des intérêts. Ils attendent avec intérêt la proposition de la Commission relative à une franchise pour la réduction des incitations fiscales favorisant l’endettement.

Concurrence des taux d’imposition effectifs marginaux

Le rapport constate que le taux d’imposition effectif marginal peut être un facteur déterminant pour les entreprises qui prennent des décisions d’investissement. Compte tenu des différences considérables entre les États membres en ce qui concerne le taux d’imposition effectif marginal, les députés invitent la Commission à examiner si certains États membres faussent la concurrence en abaissant artificiellement leur taux d’imposition effectif marginal, par exemple par des plans d’amortissements accélérés ou l’adaptation de la déductibilité fiscale de certains postes, et à transmettre ses conclusions au Parlement.

Incitations fiscales à la recherche et au développement

Tout en soulignant que les incitations fiscales en faveur de la recherche et du développement peuvent présenter des avantages pour la société et l’économie, les députés sont préoccupés par le fait que certains types d’incitations fiscales, comme les régimes fiscaux favorables aux brevets ou à la propriété intellectuelle, n’augmentent guère les dépenses consacrées à la recherche et au développement et peuvent en fait fausser le marché unique en incitant au transfert de bénéfices et à la planification fiscale agressive.

Les députés invitent la Commission à proposer des lignes directrices sur les incitations fiscales qui n’entraînent pas de distorsion pour le marché unique. Ils estiment qu’une harmonisation plus poussée des incitations fiscales en faveur des dépenses de recherche et développement pourrait se justifier.

Tableau de bord de la fiscalité dans l’UE

Prenant acte des travaux en cours de la Commission sur un tableau de bord de la fiscalité dans l’UE, les députés ont souligné que ce tableau de bord devrait contribuer à la lutte contre la concurrence fiscale dommageable et prendre en considération les lourdes pertes de recettes publiques qu’entraînent les politiques fiscales nationales qui facilitent l’évasion fiscale. Le tableau de bord devrait être conçu comme un instrument destiné à aider les États membres à mettre en œuvre des réformes profondes et judicieuses en matière fiscale.