Évaluation des mesures préventives visant à éviter la corruption, les dépenses irrégulières et l’utilisation abusive des fonds de l’Union et des fonds nationaux dans le cas de fonds d’urgence et de domaines de dépenses liés à la crise

2020/2222(INI)

Le Parlement européen a adopté par 553 voix pour, 29 contre et 115 abstentions, une résolution sur l’évaluation des mesures préventives visant à éviter la corruption, les dépenses irrégulières et l’utilisation abusive des fonds de l’Union et des fonds nationaux dans le cas de fonds d’urgence et de domaines de dépenses liés à la crise.

Avec une enveloppe respective de plus de 670 milliards d’EUR et de plus de 50 milliards d’EUR, la facilité pour la reprise et la résilience (FRR) et REACT-EU constituent de puissants outils pour contribuer à la relance des pays de l’Union. NextGenerationEU est un instrument temporaire de relance de quelque 800 milliards d’EUR à prix courants, mis en place pour soutenir le redressement de l’Union européenne à la suite de la pandémie de COVID-19.

La crise de santé publique causée par la pandémie, conjuguée à l’urgence économique qui en découle risque d’encourager la fraude et la corruption ainsi que les irrégularités non frauduleuses, en particulier dans les marchés publics, les mesures de relance économique et les organisations publiques.

Mesures pour faire face aux risques liés à la corruption et au détournement des fonds de l’Union

Le Parlement a souligné que la pression exercée pour apporter une aide et la demande d’utiliser les ressources dans les plus brefs délais pourraient entraîner un risque accru de corruption, de fraude et d’autres irrégularités, et qu’une telle situation nécessite des mesures préventives et des processus de gestion des contrôles qui soient efficaces. Ainsi, toutes les procédures de passation de marchés devraient respecter les normes les plus élevées d’ouverture, de transparence et d’obligation de rendre des comptes.

La Commission et les États membres sont invités à intégrer dans leurs stratégies nationales respectives de lutte contre la corruption des mesures ciblées s’appliquant spécifiquement à l’utilisation de fonds publics en temps de crise. Les députés ont souligné, à cet égard, que les règles relatives à la protection des intérêts financiers de l’Union devraient s’appliquer également à l’aide d’urgence et aux instruments d’aide d’urgence tels que REACT-EU et la FRR. Ils ont réaffirmé le rôle essentiel du Parlement dans le contrôle du programme de relance et l’obligation, pour la Commission, de l’informer régulièrement de sa mise en œuvre.

Le Parlement a estimé que les mesures d’urgence doivent assurer le respect de l’état de droit et des principes de proportionnalité et de nécessité, qu’elles doivent être limitées dans le temps et que leur incidence doit faire l’objet d’un contrôle régulier. Préoccupé par le fait que la mise en œuvre des réformes en matière de transparence, de contrôle et de lutte contre la corruption a rencontré une certaine résistance dans certains États membres, il a insisté sur le fait qu’il faut éviter tout conflit d’intérêts affectant les législateurs et les fonctionnaires d’État et que les États membres doivent mettre en place des cadres solides de lutte contre la corruption.

La résolution a souligné l’importance des contrôles ex ante en ce qui concerne la traçabilité des fonds, le rôle crucial que jouent les organisations de la société civile et les journalistes d’investigation pour dénoncer la corruption. Elle a insisté sur la nécessité de prévoir des garanties pour le rôle d’observateur critique qui revient à la société civile.

La Commission est invitée à surveiller de près les risques potentiels pour les intérêts financiers de l’Union et à ne procéder à aucun versement si les critères liés aux mesures de prévention, de détection et de correction de la corruption et de la fraude ne sont pas respectés. Les députés ont demandé de ne pas privilégier l’absorption par rapport aux considérations liées à la performance, à l’optimisation des ressources et à la valeur ajoutée européenne des programmes. Les États membres sont invités à intégrer les évaluations des risques de corruption tout au long de la conception et de la mise en œuvre des programmes, dans les domaines des mesures de relance économique et des subventions.

Identifier les bénéficiaires des fonds de l’Union

Le Parlement a souligné que les bénéficiaires doivent pouvoir être identifiés dans tous les États membres et quels que soient les fonds. Il a préconisé à cet égard la mise en place d’une base de données unique et interopérable répertoriant les bénéficiaires finaux directs des subventions de l’Union. Il a également appelé à recourir aux instruments tels que le système de détection rapide et d’exclusion (EDES), la base de données Arachne et le système de gestion des irrégularités (IMS), afin de recenser de manière effective les opérateurs économiques problématiques et les particuliers qui y sont liés en gestion directe et indirecte.

Par ailleurs, les députés sont d’avis que les informations pertinentes relatives à tous les marchés publics (au moyen de fonds publics) devraient être mises à la disposition du public, publiées sur un site internet spécifique et aussi peu expurgées que possible, dans le respect de la législation sur la protection des données et des autres exigences légales.

La Commission est invitée à :

- proposer une révision du règlement financier afin d’y inclure une base juridique solide pour imposer l’utilisation de données standardisées et ouvertes dans les marchés publics, et de rendre obligatoires, publics et interopérables avec les bases de données nationales les systèmes informatiques de contrôle budgétaire;

- évaluer, en vue de définir des bonnes pratiques pour les crises futures, l’efficacité de l’accord de passation conjointe de marché et de l’initiative rescEU de constitution d’une réserve d’équipements médicaux;

- promouvoir l’harmonisation des définitions des délits de corruption à l’échelle de l’Union afin de disposer de données comparatives en provenance de toute l’Union sur le traitement des affaires de corruption.

La résolution a insisté sur la nécessité d’une collaboration entre le Parquet européen et d’autres organes de l’Union tels qu’Eurojust, Europol et l’OLAF lorsqu’ils mènent des enquêtes et engagent des poursuites pénales dans le cadre de leurs mandats respectifs. Elle a également plaidé pour une coopération internationale plus efficace en matière d’obtention des preuves, de reconnaissance mutuelle, de signification ou de notification des actes, ainsi que de confiscation des produits du crime et de gel des avoirs.

Le Parlement est d’avis qu’un système centralisé d’information et de suivi devrait inclure des exigences en matière de marchés publics, avec des données à l’échelle de l’Union, pays par pays, accessibles au public, obligeant les contractants et les pouvoirs adjudicateurs à communiquer systématiquement les données spécifiques des projets, les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs intermédiaires ainsi que les bénéficiaires effectifs directs et finaux, afin de garantir l’efficacité des contrôles et des audits.