Un cadre européen en matière de retenue à la source

2021/2097(INI)

La commission des affaires économiques et monétaires a adopté un rapport d’initiative de Pedro MARQUES (S&D, PT) sur un cadre européen en matière de retenue à la source.

Les retenues à la source peuvent réduire le risque de fraude et d’évasion fiscales. Elles représentent une source de recettes pour les États membres en vue du financement des dépenses publiques et constituent un outil efficace pour garantir une base d’imposition nationale et lutter contre le transfert de bénéfices vers des juridictions à faible imposition.

Malgré les efforts, le système de retenue à la source est resté largement fragmenté entre les États membres en termes de taux et de procédures d’allègement, ce qui a créé des lacunes et une insécurité juridique. En outre que le système actuel est utilisé de manière abusive pour transférer les bénéfices, permet une planification fiscale agressive et crée l’effet indésirable de la double imposition.

Mettre un terme aux pratiques de transfert de bénéfices

Les députés rappellent que les retenues à la source peuvent être une mesure défensive prise par les États membres à l’encontre des pays figurant sur la liste de l’Union européenne des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales. Ils demandent que la Commission envisage de présenter une proposition législative qui renforce les mesures défensives coordonnées à l’encontre des pays figurant sur la liste. Ils soulignent, à cet égard, qu’il convient de prendre en considération la mise en œuvre de l’accord du G20/de l’OCDE sur une réforme à deux piliers, y compris un taux d’imposition minimal mondial effectif.

La Commission est invitée à présenter une proposition législative en vue d’appliquer une retenue à la source dans toute l’Union et faire ainsi en sorte que les bénéfices générés au sein de l’Union soient imposés au moins une fois avant qu’ils ne quittent son territoire.

Le rapport invite en outre la Commission et les États membres à mettre en place un cadre commun et normalisé de retenue à la source qui réduise la complexité pour les investisseurs, enraye la pratique du chalandage fiscal et garantisse que tous les dividendes, intérêts, plus-values, paiements de redevances, paiements de services professionnels et paiements contractuels pertinents générés dans l’Union soient imposés à un taux effectif.

Les députés constatent que l’absence d’un taux d’imposition minimum effectif sur les paiements de dividendes aux actionnaires a créé un environnement susceptible de favoriser l’évasion fiscale. Ils invitent la Commission à analyser cette question et à évaluer les meilleures options législatives pour y remédier, y compris la possibilité de réviser la directive «mères-filiales».

Intensifier la lutte contre l’arbitrage de dividendes

Les députés rappellent que les systèmes «CumEx» et «CumCum» impliquent tous deux des récupérations de la retenue à la source sur les dividendes auxquelles les bénéficiaires n’avaient pas droit et ont représenté pour les contribuables un coût total estimé à environ 140 milliards d’euros entre 2000 et 2020.

Le rapport invite la Commission à évaluer d’éventuelles solutions qui permettraient de lutter contre ces systèmes, en particulier la possibilité de lier les remboursements de l’impôt à la distribution sous-jacente de dividendes, notamment au moyen d’un identifiant unique et/ou en confiant à une entité unique dans chaque État membre la responsabilité de percevoir la retenue à la source et de délivrer le certificat fiscal correspondant afin de garantir que plusieurs remboursements de l’impôt ne puissent pas être effectués pour une même distribution et que les administrations fiscales puissent facilement détecter tout abus des procédures de remboursement.

La Commission est invitée à :

- analyser si le règlement sur les abus de marché a été violé et à examiner s'il est nécessaire de le modifier;

- proposer des mesures pour renforcer la coopération et l’assistance mutuelle entre les autorités fiscales, les autorités de surveillance des marchés financiers et, le cas échéant, les services répressifs en ce qui concerne la détection des systèmes de remboursement des retenues à la source et les poursuites à leur encontre;

- élaborer des mesures appropriées pour prévenir leur rôle des intermédiaires dans la facilitation des abus fiscaux et de l’évasion fiscale;

- étendre l’échange obligatoire d’informations aux montages d’arbitrage de dividendes et à toutes les informations sur les plus-values de capitaux, y compris l’octroi de remboursements d’impôt sur les dividendes et sur les plus-values de capitaux.

Supprimer les obstacles aux investissements transfrontières dans le marché unique

Les députés se félicitent de l’intention de la Commission de présenter, d’ici la fin de 2022, une proposition établissant un système commun et standardisé de retenue à la source, assorti d’un mécanisme d’échange d’informations et de coopération entre les administrations fiscales des États membres. Ils demandent à la Commission de s’efforcer également de remédier aux différences de taux de retenue à la source au sein de l’Union.

La Commission est invitée à :

- présenter une procédure commune et normalisée de l’UE pour les remboursements de retenues à la source pour tous les États membres;

- introduire, dans le cadre de cette harmonisation, des règles en matière d’exonérations et de déductions, ainsi qu’un format et un processus normalisés pour les demandes de remboursement, et à s’attaquer à l’absence actuelle de définition uniforme du concept de «bénéficiaire effectif», à l’absence d’alignement des délais pour la demande et le remboursement, ainsi qu’aux barrières linguistiques;

- prendre en considération les solutions numériques existantes dans les États membres, à évaluer la façon d’exploiter les technologies des chaînes de blocs pour éviter l’évasion et la fraude fiscale, dans le plein respect des règles de l’UE en matière de protection des données, et à envisager la mise sur pied d’un projet pilote.

Les députés se félicitent de l’option proposée par la Commission de mettre en place un véritable système commun de dégrèvement à la source de l’Union, qui pourrait constituer une solution fiable à long terme.