Le Parlement européen a adopté par 625 voix pour, 38 contre et 28 abstentions, une résolution sur un cadre européen en matière de retenue à la source.
Les États membres continuent de perdre des recettes fiscales en raison de pratiques fiscales dommageables et que les estimations des pertes de recettes dues à lévasion fiscale des entreprises varient entre 36 à 37 milliards deuros et 160 à 190 milliards deuros par an.
Malgré les efforts, le système de retenue à la source est resté largement fragmenté entre les États membres en termes de taux et de procédures dallègement, ce qui a créé des lacunes et une insécurité juridique. En outre que le système actuel est utilisé de manière abusive pour transférer les bénéfices, permet une planification fiscale agressive et crée leffet indésirable de la double imposition.
Mettre un terme aux pratiques de transfert de bénéfices
Le Parlement sest félicité des progrès accomplis ces dernières années dans la lutte contre les pratiques fiscales dommageables, tant au niveau de lUnion quau niveau international. Il a toutefois souligné quune meilleure application de la législation existante est nécessaire et quune action législative peut savérer utile, parallèlement aux efforts visant à lever les obstacles fiscaux aux investissements transfrontières.
La résolution a salué laccord auquel le cadre inclusif de lOCDE et du G20 est parvenu sur une réforme à deux piliers, y compris un taux dimposition minimal mondial effectif, et sest félicité que la Commission ait présenté une proposition législative pour la mise en uvre du deuxième pilier. Le Conseil est invité à adopter rapidement ces propositions, tout en tenant compte de la position du Parlement, afin quelles soient effectives en 2023.
Les députés ont rappelé que les retenues à la source peuvent être une mesure défensive prise par les États membres à lencontre des pays figurant sur la liste de lUnion européenne des pays et territoires non coopératifs à des fins fiscales. Ils ont demandé que la Commission envisage de présenter une proposition législative qui renforce les mesures défensives coordonnées à lencontre des pays figurant sur la liste.
Appliquer une retenue à la source dans toute lUnion
La Commission est invitée à présenter une proposition législative en vue dappliquer une retenue à la source dans toute lUnion et faire ainsi en sorte que les bénéfices générés au sein de lUnion soient imposés au moins une fois avant quils ne quittent son territoire. La Commission devrait inclure dans cette proposition des mesures fortes de lutte contre les abus.
Les députés ont regretté que lérosion de la base dimposition et le transfert de bénéfices se poursuivent et soient facilités par labsence dune retenue à la source commune sur les paiements sortants à destination des pays tiers, ainsi que par labsence de règles et de procédures communes qui assurent plus efficacement limposition des flux intraeuropéens de dividendes, de redevances et dintérêts.
La Commission et les États membres sont invités à mettre en place un cadre commun et normalisé de retenue à la source qui réduise la complexité pour les investisseurs, enraye la pratique du chalandage fiscal et garantisse que tous les dividendes, intérêts, plus-values, paiements de redevances, paiements de services professionnels et paiements contractuels pertinents générés dans lUnion soient imposés à un taux effectif.
Les députés ont invité la Commission à analyser la question de labsence dun taux dimposition minimum effectif sur les paiements de dividendes aux actionnaires et à évaluer les meilleures options législatives pour y remédier, y compris la possibilité de réviser la directive «mères-filiales».
Intensifier la lutte contre larbitrage de dividendes
Les députés ont rappelé que les systèmes «CumEx» et «CumCum» impliquent tous deux des récupérations de la retenue à la source sur les dividendes auxquelles les bénéficiaires navaient pas droit et ont représenté pour les contribuables un coût total estimé à environ 140 milliards deuros entre 2000 et 2020. Le Parlement a invité la Commission à évaluer déventuelles solutions qui permettraient de lutter contre ces systèmes qui continuent dêtre exploités aux dépens des fonds publics européens.
La Commission est invitée à :
- analyser si le règlement sur les abus de marché a été violé et à examiner s'il est nécessaire de le modifier;
- proposer des mesures pour renforcer la coopération et lassistance mutuelle entre les autorités fiscales, les autorités de surveillance des marchés financiers et, le cas échéant, les services répressifs en ce qui concerne la détection des systèmes de remboursement des retenues à la source et les poursuites à leur encontre;
- élaborer des mesures appropriées pour prévenir leur rôle des intermédiaires dans la facilitation des abus fiscaux et de lévasion fiscale;
- étendre léchange obligatoire dinformations aux montages darbitrage de dividendes et à toutes les informations sur les plus-values de capitaux, y compris loctroi de remboursements dimpôt sur les dividendes et sur les plus-values de capitaux.
Supprimer les obstacles aux investissements transfrontières dans le marché unique
Les députés se sont félicités de lintention de la Commission de présenter, dici la fin de 2022, une proposition établissant un système commun et standardisé de retenue à la source, assorti dun mécanisme déchange dinformations et de coopération entre les administrations fiscales des États membres. Ils ont demandé à la Commission de sefforcer également de remédier aux différences de taux de retenue à la source au sein de lUnion.
La Commission est invitée à :
- présenter une procédure commune et normalisée de lUE pour les remboursements de retenues à la source pour tous les États membres;
- introduire, dans le cadre de cette harmonisation, des règles en matière dexonérations et de déductions, et à sattaquer à labsence actuelle de définition uniforme du concept de «bénéficiaire effectif», à labsence dalignement des délais pour la demande et le remboursement, ainsi quaux barrières linguistiques;
- prendre en considération les solutions numériques existantes dans les États membres, à évaluer la façon dexploiter les technologies des chaînes de blocs pour éviter lévasion et la fraude fiscale, dans le plein respect des règles de lUE en matière de protection des données, et à envisager la mise sur pied dun projet pilote.
Les députés se sont félicités de loption proposée par la Commission de mettre en place un véritable système commun de dégrèvement à la source de lUnion, qui pourrait constituer une solution fiable à long terme.