CFP 2021-2027: lutte contre les structures oligarchiques, protection des fonds de l’Union contre la fraude et conflits d’intérêts

2020/2126(INI)

Le Parlement européen a adopté par 409 voix pour, 61 contre et 42 abstentions une résolution sur le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027: lutte contre les structures oligarchiques, protection des fonds de l’Union contre la fraude et les conflits d’intérêts

Le train de mesures lié au CFP 2021-2027 représente, avec l’instrument de relance NextGenerationEU, un financement total sans précédent de 1800 milliards d’euros pour soutenir la reprise après la pandémie de COVID-19 et les priorités à long terme de l’Union dans différents domaines d’action.

La protection des intérêts financiers de l’Union est un élément fondamental de l’agenda politique de l’Union pour consolider la transparence, la responsabilité démocratique et la capacité à répondre aux besoins des citoyens, pour renforcer la confiance du public et pour garantir que l’argent des contribuables est correctement dépensé.

La mise en œuvre du paquet budgétaire du CFP 2021-2027 devrait être conforme aux principes généraux consacrés dans les traités, en particulier aux valeurs de l’Union européenne ainsi que dans le règlement sur la conditionnalité et au principe de bonne gestion financière.

Structures oligarchiques

La résolution a souligné que des membres de gouvernements nationaux et d’autres titulaires de positions politiques font partie, dans certains États membres, de l’oligarchie, et qu’ils ont activement cherché à utiliser les fonds de l’Union pour servir leurs propres intérêts financiers.

Les députés sont préoccupés du fait que des réseaux oligarchiques en relation avec le monde politique peuvent interférer dans le fonctionnement des sphères publiques démocratiques. Ils s’inquiètent des liens fréquents des systèmes oligarchiques avec la corruption généralisée, avec un contrôle étroit des médias et avec un système judiciaire qui n’est pas indépendant des oligarques eux-mêmes.

Le Parlement estime que des politiques et des organes de lutte contre la corruption solides, ainsi que des systèmes de contrôle et un système judiciaire indépendant, garantissant le bon fonctionnement de l'État de droit, encourageant la concurrence, renforçant la transparence et assurant la mise en œuvre fonctionnelle des règles de passation des marchés publics et le libre accès aux marchés, sont essentiels pour empêcher les oligarques de prendre le contrôle de l'économie et des marchés financiers.

Fraude et conflits d'intérêts dans le cadre juridique actuel

Le Parlement a encouragé la Commission à renforcer les dispositions relatives aux conflits d’intérêts prévues à l’article 61 du règlement financier dans le cadre de sa prochaine révision, en particulier en ce qui concerne la préparation du budget, afin de permettre une identification plus précise des catégories d’agents publics qui sont en mesure d’influencer les flux financiers du budget de l’Union et d’empêcher l’apparition de conflits d’intérêts.

Les députés ont par conséquent demandé l’amélioration des capacités et la mise en place de systèmes efficaces de gestion et de contrôle dans les organes de l’Union et dans les États membres, condition essentielle pour surveiller les cas de conflits d’intérêts, enquêter à leur sujet et garantir et préserver la légalité et la régularité des dépenses des fonds de l’Union.

Principaux défis en matière de cohésion et d'agriculture

En ce qui concerne la politique de cohésion, les députés ont souligné que les types les plus fréquemment détectés d’irrégularités frauduleuses parmi les projets financés au moyen des Fonds structurels et d'investissement européens pendant la période de programmation 2014-2020 étaient la surtarification, des pièces justificatives incorrectes, manquantes ou falsifiées, le non-respect des dispositions contractuelles, l’inéligibilité et la violation des règles régissant les marchés publics, ainsi que les manquements à l’éthique et à l’intégrité, y compris les conflits d’intérêts et la corruption.

Les députés ont noté avec inquiétude que la proportion de marchés attribués en présence d’un seul soumissionnaire s’est élevée à environ 50% en République tchèque et en Pologne en 2018 et en 2019, 40% en Hongrie et en Grèce en 2019 et 38% au Portugal. Ces chiffres démontrent que de graves défaillances des marchés publics continuent d’avoir cours dans plusieurs États membres.

Le Parlement a souligné qu’une étude sur la mise en œuvre des fonds de la PAC a révélé que le décaissement des fonds agricoles de l’Union posait de sérieux problèmes dans au moins cinq États membres. Il a pris note avec inquiétude d’informations faisant état du détournement structurel de la ligne budgétaire du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Il a demandé à la Commission et aux États membres de renforcer les mesures contre l’accaparement de terres, les appels d’offres irréguliers ou d’autres procédures d’attribution et utilisations abusives de l’argent de l’Union, en particulier lorsque des autorités et des gouvernements nationaux sont impliqués.

Les députés ont regretté la situation actuelle, dans laquelle une personne peut recevoir des montants illimités des fonds en gestion partagée. Ils ont demandé à la Commission d’inclure dans sa proposition de révision du règlement financier une modification qui préciserait que la Commission garantit que les paiements provenant du budget de l’Union et revenant à un unique bénéficiaire n’excèdent pas, au cours d’un exercice donné, un total annuel agrégé par personne physique. En ce qui concerne la PAC, des versements de 500.000 EUR au titre du premier pilier et de 1 million d’EUR au titre du deuxième pilier constitueraient des montants annuels totaux par personne physiques adéquats.

Solutions disponibles et prévention dans la situation actuelle

Le Parlement a regretté que le taux de mise en examen à la suite des recommandations de l’OLAF aux États membres soit passé de 53% lors de la période 2007-2014 à 37% sur la période 2016-2020.

Les autorités des États membres sont invitées à faire tout leur possible pour améliorer le taux de mise en examen et à coopérer étroitement avec les institutions et organes de l'UE afin de garantir le recouvrement des fonds détournés par la criminalité organisée et les oligarques. Le Conseil est invité à approuver une augmentation du financement des ressources humaines de l’OLAF, du Parquet européen et d’Europol afin qu’ils puissent s’acquitter de leur mission.

Les députés ont déploré le fait que depuis le 1er janvier 2021, la Commission n'a pu prendre aucune mesure appropriée pour appliquer le règlement sur la conditionnalité. Ils ont réitéré la position du Parlement selon laquelle le règlement sur la conditionnalité doit être appliqué sans exception à partir du 1er janvier 2021. Les députés ont également relevé qu’en vertu du règlement établissant la facilité pour la reprise et la résilience (FRR), les États membres doivent veiller à la prévention et à la correction des conflits d’intérêts, de la corruption et de la fraude, ainsi qu’à la transparence lors du versement des fonds.

Enfin, le Parlement a regretté que les bases de données sur les bénéficiaires des fonds de l'UE ne contiennent pas d'informations sur les bénéficiaires finaux et leurs bénéficiaires effectifs. Il a également déploré qu'il ne soit pas possible pour les autorités de contrôle d'identifier les bénéficiaires ultimes des fonds ou d'établir si des ONG ont été utilisées pour déguiser le financement d'organisations terroristes et extrémistes.