Le Parlement européen a adopté par 503 voix contre 6 et 4 abstentions une résolution sur un nouvel instrument commercial visant à interdire les produits issus du travail forcé.
Selon les estimations de l'Organisation internationale du travail (OIT), 25 millions de personnes dans le monde sont actuellement en situation de travail forcé et, parmi elles, 20,8 millions sont soumises à un travail forcé imposé par le secteur privé et 4,1 millions à un travail forcé imposé par l'État. Les femmes et les filles représentent 61% des personnes soumises au travail forcé, les travailleurs migrants étant particulièrement vulnérables. En outre, on estime que 160 millions d'enfants seront soumis au travail forcé dans le monde au début de l'année 2020.
L'économie de l'UE est liée à des millions de travailleurs dans le monde entier par des chaînes d'approvisionnement mondiales et les consommateurs de l'UE veulent être certains que les biens qu'ils achètent sont produits de manière durable et équitable, garantissant un travail décent à ceux qui les produisent.
Étant donné que le travail forcé est un phénomène complexe et qu'une interdiction des produits issus du travail forcé ne suffira pas à éradiquer le travail forcé et à s'attaquer au problème à la racine, l'UE devrait également se concentrer sur le dialogue avec les pays tiers, l'assistance technique, le renforcement des capacités et la sensibilisation.
La résolution indique que l'introduction d'une interdiction des produits issus du travail forcé est une priorité politique du Parlement et de l'UE dans son ensemble.
Le Parlement a demandé un nouvel instrument commercial compatible avec l'OMC pour compléter les règles de diligence raisonnable en matière de durabilité des entreprises, interdisant l'importation et l'exportation de produits fabriqués ou acheminés en recourant au travail forcé et qui devrait être complété par des mesures pour le commerce intra-UE. La nouvelle proposition pourrait être basée sur les meilleures pratiques des pays ayant une législation similaire en place, comme les États-Unis et le Canada.
Le nouvel instrument devrait permettre d'interdire les produits issus du travail forcé provenant d'un site de production particulier, d'un importateur ou d'une entreprise particulière, ceux provenant d'une région particulière dans le cas du travail forcé appuyé par un État et ceux provenant d'un navire de transport ou d'une flotte particulière.
En vertu du nouvel instrument de l'UE, les autorités publiques, de leur propre initiative ou sur la base d'informations qu'elles ont reçues, devraient retenir les marchandises à la frontière de l'UE lorsqu'elles estiment qu'il existe des preuves suffisantes que ces marchandises ont été fabriquées ou transportées dans le cadre du travail forcé.
L'importateur dont les marchandises ont été retenues devrait alors avoir la possibilité de réfuter cette accusation en prouvant que les marchandises n'ont pas été fabriquées ou transportées dans le cadre du travail forcé, ce qui pourrait alors conduire à la libération des marchandises. La résolution a souligné que les preuves de l'absence de travail forcé doivent être fondées sur les normes de l'OIT.
Tout en reconnaissant qu'un certain nombre d'entreprises de l'UE font déjà des efforts pour s'assurer que les pratiques qui violent les droits de l'homme et les droits du travail n'ont pas lieu dans leurs chaînes d'approvisionnement, la résolution a appelé la Commission à :
- offrir aux entreprises, en particulier aux PME, un soutien technique et tout autre soutien approprié pour se conformer aux nouvelles règles afin d'éviter les charges inutiles pour les PME;
- évaluer la mise en uvre de l'instrument et son impact sur les entreprises de l'UE;
- veiller à ce que le nouvel instrument de l'UE exige des entreprises responsables qu'elles fournissent des mesures de réparation et correctives aux travailleurs affectés avant que les restrictions à l'importation ne soient levées;
- créer des lignes directrices pour aider les entreprises à mettre en place un processus de cartographie de la chaîne d'approvisionnement afin d'identifier ce qui constitue une information pertinente.
Le Parlement a demandé la création d'une base de données publique contenant des informations sur les fournisseurs individuels, le risque qu'ils représentent ou, au contraire, des preuves de travail décent, ce qui pourrait réduire la charge administrative des entreprises. La résolution demande également qu'une liste publique des entités, régions et produits sanctionnés soit créée et tenue à jour.