Résolution sur le projet de décision d’exécution de la Commission autorisant la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP4114 × MON 810 × MIR604 × NK603 ou du maïs génétiquement modifié combinant deux ou trois des événements uniques DP4114, MON 810, MIR604 et NK603, de produits consistant en ces maïs ou produits à partir de ceux-ci, en application du règlement (CE) nº 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil

2022/2694(RSP)

Le Parlement européen a adopté par 398 voix pour, 173 contre et 24 abstentions, une résolution faisant objection au projet de décision d'exécution de la Commission autorisant la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié DP4114 × MON 810 × MIR604 × NK603, consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci, et du maïs génétiquement modifié combinant deux ou trois des événements uniques DP4114, MON 810, MIR604 et NK603, en application du règlement (CE) n° 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil.

Le 2 mai 2018, Pioneer Overseas Corporation, basée en Belgique, a présenté, au nom de Pioneer Hi-Bred International, Inc. basée aux États-Unis, une demande de mise sur le marché de denrées alimentaires, d'ingrédients alimentaires et d'aliments pour animaux contenant du maïs génétiquement modifié DP4114 × MON 810 × MIR604 × NK603, consistant en ce maïs ou produits à partir de celui-ci (le maïs génétiquement modifié).

Le 26 janvier 2022, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a rendu un avis favorable sur cette demande.

Absence d'évaluation de l'herbicide complémentaire

Les députés ont souligné qu'un certain nombre d'études montrent que les cultures GM tolérantes aux herbicides entraînent une utilisation plus importante d'herbicides complémentaires, en grande partie à cause de l'émergence de mauvaises herbes tolérantes aux herbicides. Le colza GM peut donc être exposé à des doses plus élevées et répétées de glyphosate, ce qui peut entraîner une augmentation de la quantité de résidus et de leurs produits de dégradation dans la récolte.

La résolution indique que l'EFSA a conclu en novembre 2015 qu'il était peu probable que le glyphosate soit cancérigène et l'Agence européenne des produits chimiques a conclu en mars 2017 qu'aucune classification n'était justifiée. Au contraire, en 2015, le Centre international de recherche sur le cancer, l'agence spécialisée dans le cancer de l'Organisation mondiale de la santé, a classé le glyphosate comme cancérogène probable pour l'homme. Un certain nombre d'études scientifiques récentes évaluées par des pairs confirment le potentiel cancérigène du glyphosate.

Questions en suspens concernant les toxines Bt

La toxicité des toxines Bt a été évaluée sur la base d'études d'alimentation, en utilisant uniquement des protéines Bt isolées produites par des bactéries. Les tests toxicologiques réalisés avec des protéines isolées ont peu de valeur, car les toxines Bt présentes dans les cultures génétiquement modifiées, comme le maïs, le coton et le soja, sont intrinsèquement plus toxiques que les toxines Bt isolées. En effet, les inhibiteurs de protéase (IP), présents dans les tissus végétaux, peuvent augmenter la toxicité des toxines Bt en retardant leur dégradation. Cette toxicité accrue n'est pas prise en compte dans les évaluations des risques de l'EFSA, alors qu'elle est pertinente pour toutes les plantes Bt dont l'importation ou la culture est autorisée dans l'Union. Les risques pour les humains et les animaux qui consomment des denrées alimentaires et des aliments pour animaux contenant des toxines Bt et qui découlent de cette toxicité accrue due à l'interaction entre l'IP et les toxines Bt ne peuvent donc pas être exclus.

Un certain nombre d'études montrent que l'on a observé des effets secondaires susceptibles d'affecter le système immunitaire à la suite d'une exposition aux toxines Bt et que certaines toxines Bt peuvent avoir des propriétés adjuvantes, ce qui signifie qu'elles peuvent augmenter l'allergénicité d'autres protéines avec lesquelles elles entrent en contact.

En outre, une étude scientifique a révélé que la toxicité des toxines Bt peut également être accrue par l'interaction avec des résidus de pulvérisation d'herbicides, et que des études supplémentaires sont nécessaires sur les effets combinatoires des événements « empilés » (cultures GM qui ont été modifiées pour être tolérantes aux herbicides et pour produire des insecticides sous la forme de toxines Bt).

Prise de décision antidémocratique

La Commission reconnaît qu’il est problématique que les décisions relatives à l’autorisation d’organismes génétiquement modifiés continuent d’être adoptées par la Commission sans qu’une majorité qualifiée des États membres y soient favorables, ce qui est très largement l’exception pour les autorisations de produits dans leur ensemble, mais qui est devenu la norme pour les décisions concernant les autorisations de denrées alimentaires génétiquement modifiées et d’aliments génétiquement modifiés pour animaux.

Au cours de sa neuvième législature, le Parlement a déjà adopté 27 objections à la mise sur le marché d'OGM. Aucune majorité qualifiée d'États membres ne s'est prononcée en faveur de l'autorisation de l'un de ces OGM. Les raisons pour lesquelles les États membres ne soutiennent pas les autorisations sont le manque de respect du principe de précaution dans le processus d'autorisation et les préoccupations scientifiques relatives à l'évaluation des risques.

Le Parlement a souligné que les amendements adoptés par le Parlement européen le 17 décembre 2020 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 182/2011, qui ont été adoptés au Parlement comme base de négociation avec le Conseil, stipulent que la Commission n'autorise pas les OGM lorsqu'il n'y a pas une majorité qualifiée d'États membres en faveur. Il a insisté pour que la Commission respecte cette position et a appelé le Conseil à poursuivre ses travaux et à adopter d'urgence une approche générale sur ce dossier.

Bien qu'elle reconnaisse elle-même les lacunes démocratiques, le manque de soutien des États membres et les objections du Parlement, la Commission continue à autoriser les OGM.

Respect des obligations internationales

Les députés ont rappelé que l’objectif de développement durable 3.9 des Nations unies vise, d’ici 2030, à réduire nettement le nombre de décès et de maladies dus à des substances chimiques dangereuses, à la pollution et à la contamination de l’air, de l’eau et du sol. Ils ont estimé que l'autorisation de l'importation du maïs génétiquement modifié augmenterait la demande de cette culture traitée au glyphosate, ce qui accroîtrait l'exposition des travailleurs et de l'environnement dans les pays tiers. Le risque d'exposition accrue des travailleurs et de l'environnement est particulièrement préoccupant en ce qui concerne les cultures GM tolérantes aux herbicides, étant donné les volumes plus importants d'herbicides utilisés.

Selon une étude évaluée par des pairs et publiée en 2020, le Roundup, l'un des herbicides à base de glyphosate les plus utilisés au monde, peut provoquer une perte de biodiversité, rendant les écosystèmes plus vulnérables à la pollution et au changement climatique.

En outre, l'UE, en tant que partie à la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB), a la responsabilité de veiller à ce que les activités relevant de sa juridiction ou de son contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement d'autres États.

Recommandations

Sur la base de ces considérations, le Parlement estime que le projet de décision d'exécution de la Commission n'est pas conforme au droit de l'Union et demande à la Commission de retirer son projet de décision d'exécution.

Il est également demandé à la Commission

- de ne pas autoriser les cultures génétiquement modifiées tolérantes aux herbicides tant que les risques sanitaires liés aux résidus n'auront pas fait l'objet d'une étude approfondie au cas par cas;

- de tenir compte des obligations de l'UE au titre des accords internationaux, tels que l'accord de Paris sur le climat, la convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB) et les objectifs de développement durable des Nations unies, et de veiller à ce que les projets d'actes d'exécution expliquent comment ils respectent le principe de «ne pas nuire».