Législation sur les services numériques

2020/0361(COD)

Le Parlement européen a adopté par 539 voix pour, 54 contre et 30 abstentions, une résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à un marché unique des services numériques (Législation sur les services numériques) et modifiant la directive 2000/31/CE.

La position du Parlement européen adoptée en première lecture dans le cadre de la procédure législative ordinaire modifie la proposition de la Commission comme suit :

Objectif et champ d’application

Le règlement a pour objectif de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur des services intermédiaires en établissant des règles harmonisées pour un environnement en ligne sûr, prévisible et digne de confiance qui facilite l’innovation, dans lequel les droits consacrés par la Charte des droits fondamentaux, notamment le principe de protection des consommateurs, sont efficacement protégés.

Le projet de législation sur les services numériques définit clairement les responsabilités et les obligations des prestataires de services intermédiaires, en particulier des plateformes en ligne, telles que les médias sociaux et les places de marché. Il s’appliquera aux services intermédiaires fournis aux bénéficiaires du service dont le lieu d’établissement ou de résidence se situe dans l’Union, quel que soit le lieu d’établissement des fournisseurs de ces services.

Les obligations instaurées sont proportionnées à la nature des services concernés et adaptées au nombre d'utilisateurs, ce qui signifie que les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche en ligne (comptant plus de 45 millions d'utilisateurs actifs par mois dans l'Union européenne) seront soumis à des exigences plus strictes. Les micro-et-petites entreprises seront exemptées de certaines obligations liées à la législation.

Mesures de lutte et de protection contre les utilisations abusives

La législation sur les services numériques associe la notion de «contenu illicite» à l’idée générale que «ce qui est illicite hors ligne devrait également l’être en ligne». Les mesures comprennent des procédures clairement définies pour supprimer les produits, services et contenus illicites en ligne.

Le fournisseur devra, dès qu’il a effectivement connaissance ou est informé d’une activité illégale ou d’un contenu illicite, agir rapidement pour retirer ce contenu ou en rendre l’accès impossible dans le respect des droits fondamentaux des bénéficiaires du service, y compris le droit à la liberté d’expression et d’information.

Tous les fournisseurs de services d’hébergement devront mettre en place des mécanismes de notification et d’action facilement accessibles et faciles à utiliser, qui permettent de notifier aisément au fournisseur de services d’hébergement concerné les éléments d’information spécifiques que la partie notifiante considère comme un contenu illicite. À la suite de cette notification, le fournisseur pourra décider s’il est d’accord ou non avec cette évaluation et s’il souhaite ou non retirer ce contenu ou en rendre l’accès impossible.

Le fournisseur de services d’hébergement devra informer la personne ou l’entité ayant notifié le contenu spécifique sans retard injustifié après avoir pris une décision sur la suite à donner à la notification.

Traçabilité des professionnels

Les plateformes en ligne qui permettent aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels devront veiller à ce que ces derniers puissent uniquement utiliser leurs services pour promouvoir des messages relatifs à des produits ou services ou proposer des produits ou services à des consommateurs situés dans l’Union si, avant l’utilisation de leurs services à ces fins, elles ont obtenu les informations suivantes, s’il y a lieu: i) le nom, l’adresse, le numéro de téléphone et l’adresse de courrier électronique du professionnel; ii) un exemplaire du document d’identification du professionnel; iii) les coordonnées du compte de paiement du professionnel; iv) le registre du commerce sur lequel le professionnel est inscrit ou v) une autocertification du professionnel.

Avant d’autoriser le professionnel concerné à utiliser ses services, le fournisseur de la plateforme en ligne s’efforcera, dans toute la mesure du possible d’évaluer si ces informations sont fiables et complètes. Lorsque les professionnels concernés ne fournissent pas ces informations dans un délai de 12 mois, les fournisseurs suspendront les services fournis à ces professionnels jusqu’à l’obtention des informations en question.

Droit à l’information

Lorsque le fournisseur d’une plateforme en ligne permettant aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec des professionnels prend connaissance qu’un professionnel propose un produit ou service illégal à des consommateurs situés dans l’Union, il devra informer, dans la mesure où il dispose de leurs coordonnées, les consommateurs qui ont acheté le produit ou service en question par l’intermédiaire de son service, au cours des six mois précédant le moment où il en a été informé.

Publicité sur les plateformes en ligne

Les fournisseurs de plateformes en ligne qui présentent de la publicité sur leurs interfaces en ligne devront veiller à ce que les bénéficiaires du service puissent, pour chaque publicité spécifique présentée à chaque bénéficiaire individuel, de manière claire, précise, non ambiguë et en temps réel:

- se rendre compte que les informations présentées sont de la publicité, y compris au moyen d’indications bien visibles;

- identifier la personne physique ou morale pour le compte de laquelle la publicité est présentée et identifier la personne physique ou morale qui a payé pour la publicité;

- obtenir des informations utiles concernant les principaux paramètres utilisés pour déterminer le bénéficiaire auquel la publicité est présentée et, le cas échéant, la manière dont ces paramètres peuvent être modifiés. Les informations doivent être directement et facilement accessibles à partir de la publicité.

Les fournisseurs de plateformes en ligne ne devront pas présenter de publicité aux bénéficiaires de services sur la base d’un profilage en utilisant les catégories particulières de données sensibles.

Interfaces truquées

Les interfaces truquées de plateformes en ligne sont des pratiques qui peuvent être utilisées pour persuader les bénéficiaires du service de se livrer à des comportements non désirés ou de prendre des décisions non souhaitées qui ont des conséquences négatives pour eux. Les interfaces truquées et les pratiques trompeuses visant à influencer les choix des utilisateurs seront interdites.

Transparence des systèmes de recommandation

Les fournisseurs de plateformes en ligne qui utilisent des systèmes de recommandation devront établir dans leurs conditions générales, dans un langage simple et compréhensible, les principaux paramètres utilisés dans leurs systèmes de recommandation, ainsi que les options dont disposent les bénéficiaires du service pour modifier ou influencer ces paramètres.

Les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche en ligne devront proposer aux utilisateurs un système de recommandation de contenus qui ne se fonde pas sur leur profilage.

Mécanisme de réaction aux crises

Dans le contexte de l'agression russe contre l'Ukraine et de ses conséquences particulières en matière de manipulation de l'information en ligne, un nouvel article a été ajouté introduisant un mécanisme de réaction aux crises.

Ce mécanisme sera activé par la Commission sur recommandation du comité des coordinateurs nationaux pour les services numériques. Il permettra d'analyser l'impact des activités des très grandes plateformes en ligne et des très grands moteurs de recherche en ligne sur la crise en question et de décider de mesures proportionnées et efficaces à mettre en place pour le respect des droits fondamentaux.

Protection des mineurs en ligne

Les fournisseurs de plateformes en ligne accessibles à des mineurs devront mettre en place des mesures pour garantir un niveau élevé de protection de la vie privée, de la sûreté et de la sécurité des mineurs au regard de leur service. Ils ne devront pas présenter de publicité qui repose sur le profilage utilisant des données à caractère personnel concernant le bénéficiaire du service dès lors qu’ils savent avec une certitude raisonnable que le bénéficiaire du service est un mineur.

Risques systémiques présentés par les très grandes plateformes

Les très grandes plateformes en ligne et moteurs de recherche qui présentent un risque maximal, devront se conformer à des obligations plus strictes mises en œuvre par la Commission. Il s’agit notamment de prévenir les risques systémiques (tels que la diffusion de contenus illicites, par exemple la diffusion de matériel pédopornographique ou de discours de haine illégaux, l’incidence du service sur l’exercice des droits fondamentaux et sur les processus démocratiques ou encore l’utilisation, y compris par manipulation, du service ayant un effet néfaste sur la protection de la santé publique et des mineurs, ainsi que des conséquences négatives graves sur le bien-être physique et mental de la personne, ou sur la violence à caractère sexiste). Des audits indépendants pourront également être menés.

Gouvernance

Afin de garantir la mise en œuvre efficace et uniforme des obligations prévues par la législation sur les services numériques, la Commission disposera d’un pouvoir exclusif de surveillance des très grandes plateformes en ligne et des très grands moteurs de recherche en ligne en ce qui concerne le respect des obligations propres à ce type d'acteur. Ils seront surveillés au niveau européen en coopération avec les États membres. Ce nouveau mécanisme de surveillance préserve le principe du pays d'origine, qui continuera de s'appliquer aux autres acteurs et aux exigences couvertes par la législation sur les services numériques.