Impact des nouvelles technologies sur la fiscalité: crypto-technologies et technologies de chaînes de blocs

2021/2201(INI)

Le Parlement européen a adopté par 566 voix pour, 7 contre et 47 abstentions, une résolution concernant l’impact des nouvelles technologies sur la fiscalité: crypto‑technologies et technologies de chaînes de blocs.

Le Parlement estime que les nouvelles solutions technologiques, telles que la chaîne de blocs, peuvent être employées par les administrations fiscales pour mieux répondre aux besoins des contribuables, pour échanger des informations entre juridictions, ainsi que pour décourager la corruption, mais que ces technologies peuvent également être utilisées à mauvais escient et servir de canal à des activités illicites, dans l’intention criminelle d’éviter l’impôt. La visibilité accrue des transactions des chaînes de blocs pourrait faciliter les efforts déployés par les administrations fiscales pour lutter contre la fraude fiscale.

Potentiel des nouvelles technologies telles que la chaîne de blocs

La résolution souligne que l’adaptation des capacités informatiques des autorités fiscales à l’aide des nouvelles technologies émergentes, telles que les technologies des registres distribués comme les chaînes de blocs ou l’intelligence artificielle, doit permettre de favoriser des procédures fiscales et administratives intelligentes, de faciliter le respect des obligations fiscales par les citoyens et les entreprises, et d’améliorer la traçabilité et l’identification des opérations imposables et de la propriété des actifs corporels et incorporels dans un environnement mondialisé où les opérations transfrontières se multiplient.

La technologie des registres distribués et la chaîne de blocs, grâce à ses caractéristiques uniques, comme la traçabilité et sa capacité à stocker des données immuables et fiables, et donc à protéger l’intégrité de ces données, pourrait offrir un nouveau moyen d’automatiser la perception de l’impôt.

Les députés ont toutefois souligné que l’utilisation de la chaîne de blocs, de l’intelligence artificielle (IA) et d’autres outils numériques par les administrations fiscales a ses avantages mais présente aussi des risques, en particulier en matière de qualité des données, lesquels doivent être dûment atténués, notamment pour prévenir les violations de la vie privée et le traitement biaisé et discriminatoire des contribuables.

La résolution a préconisé de recenser les meilleures manières d’utiliser la technologie afin de renforcer la capacité d’analyse des administrations fiscales, de normaliser les données afin de faciliter le respect des obligations fiscales des PME et des contribuables (au moyen notamment de normes communes de déclaration) et de veiller à ce que la fiscalité corresponde davantage à l’environnement commercial à l’ère numérique, tout en garantissant un niveau élevé de protection des données.

La Commission est invitée à :

- évaluer la manière dont les différents États membres taxent les crypto-actifs ainsi que les différentes politiques nationales en matière de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales dans le domaine des crypto-actifs;

- prendre en considération les solutions numériques existantes dans les États membres et à évaluer la possibilité d’intégrer des solutions fondées sur la chaîne de blocs sur les plateformes d’échange d’informations afin de promouvoir l’audit et l’échange d’informations en temps réel;

- envisager la création d’une nouvelle plateforme de formation et de partage des bonnes pratiques entre les autorités fiscales nationales dans le domaine de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales au sein de l’économie numérique, et notamment dans le contexte de l’utilisation des crypto-actifs;

continuer d’évaluer l’incidence opérationnelle et les aspects liés à la gouvernance fiscale de la technologie des chaînes de blocs et des autres registres distribués, notamment dans le cadre du programme Fiscalis.

Enjeux fiscaux liés aux crypto-actifs

Les députés estiment que les crypto-actifs doivent être soumis à une imposition équitable, transparente et efficace, afin de garantir une concurrence juste et des conditions de concurrence équitables entre le traitement fiscal des actifs et des produits financiers et entre les prestataires de services financiers. Ils invitent les autorités à envisager un traitement fiscal simplifié pour les petits opérateurs et sont favorables à la création d’un environnement propice à l’innovation sur le marché unique numérique pour les entrepreneurs, les PME et les jeunes pousses.

La résolution a souligné la nécessité :

d’adapter la notion d’établissement stable, notamment au moyen d’une définition claire de l’établissement stable virtuel, conformément aux normes internationales, étant donné que les opérateurs de l’économie numérique peuvent exercer d’importantes activités commerciales dans un État membre sans y établir de présence physique;

- de disposer d’une définition claire et largement acceptée des crypto-actifs à des fins fiscales;

- de trouver une définition cohérente du fait générateur afin de garantir un niveau d’imposition adéquat, tout en évitant les cas de double imposition.

En raison de la dynamique des marchés de crypto-actifs, les députés estiment qu’il est urgent de disposer de règles quant au choix du type d’imposition à appliquer, à la définition du fait générateur, au moment et au lieu où un fait générateur se produit, ainsi qu’à sa valorisation.

La Commission est invitée à tenir compte de la question des crypto-actifs, de la numérisation et des nouvelles technologies dans toutes ses propositions législatives prévues et à venir dans le domaine fiscal. Les États membres sont invités à tenir compte des spécificités de l’utilisation des crypto-actifs dans leurs réformes fiscales nationales et à envisager de mettre au point des systèmes plus efficaces.

Progression dans l’élaboration d’un cadre réglementaire et juridique efficace

Le Parlement a souligné que les crypto-actifs sont utilisés dans le monde entier et que le traitement fiscal des crypto-actifs doit se fonder sur une approche internationale coordonnée. L’OCDE, qui a déjà accompli un travail considérable en matière de fiscalité et de traitement des crypto-actifs, pourrait être en l’espèce une enceinte appropriée. En l’absence d’accord international sur l’imposition des crypto-actifs, l’Union et ses États membres sont dépourvus d’une base sur laquelle ils pourraient bâtir une approche intelligente et tournée vers l’avenir.

La Commission est invitée à présenter une évaluation des principaux faits générateurs et des formes de revenus associés aux crypto-actifs et à réaliser une analyse d’impact sur les bonnes pratiques recensées pour taxer équitablement et efficacement les crypto-actifs.

La résolution a préconisé d’adopter une approche commune en ce qui concerne la fiscalité des crypto-actifs dans le respect des compétences définies par les traités. Le Conseil est invité à engager un dialogue structuré avec le Parlement sur cette question.

Il est par ailleurs nécessaire de modifier le champ d’application de la directive relative à la coopération administrative afin que le cadre pour l’échange d’informations dans le domaine fiscal englobe les crypto-actifs et la monnaie électronique. La Commission est invitée à inclure dans sa prochaine révision de la directive, les futures recommandations de l’OCDE sur la déclaration des crypto-actifs et les révisions de la norme commune de déclaration, ainsi que les recommandations du Parlement telles que formulées dans sa résolution sur l’application des exigences de l’Union en matière d’échange de renseignements fiscaux.