Fiscalité: règles visant à empêcher l'utilisation abusive des entités écrans à des fins fiscales
Le Parlement européen a adopté par 637 voix pour, 2 contre et 6 abstentions, suivant une procédure législative spéciale (consultation du Parlement), une résolution législative sur la proposition de directive du Conseil établissant des règles pour empêcher lutilisation abusive dentités écrans à des fins fiscales et modifiant la directive 2011/16/UE.
Les députés rappellent que lutilisation abusive dentités écrans à des fins fiscales entraîne une diminution des obligations fiscales et une perte de recettes fiscales au sein de lUnion. Ils estiment essentiel que la directive fixe des normes ambitieuses et proportionnées pour la définition dexigences communes en matière de substance minimale, pour lamélioration de léchange dinformations entre les administrations fiscales nationales et pour la dissuasion de lutilisation dentités écrans promues par certains intermédiaires.
Le Parlement européen a approuvé la proposition de la Commission sous réserve des amendements suivants :
Identification des entreprises qui ne satisfont pas aux indicateurs de substance minimale
Selon les députés, les États membres devraient exiger des entreprises remplissant les critères cumulatifs suivants quelles effectuent une déclaration aux autorités compétentes des États membres :
- plus de 65% des recettes enregistrées par lentreprise au cours des deux années d'imposition précédentes constituent des revenus pertinents;
- lentreprise exerce une activité transfrontière pour lun des motifs suivants: i) plus de 55% de la valeur comptable des actifs de lentreprise relevant du champ dapplication de larticle 4, points e) et f), étaient situés hors de lÉtat membre de lentreprise au cours des deux années dimposition précédentes; ii) plus de 55% des revenus pertinents de lentreprise sont perçus ou versés au moyen de transactions transfrontières;
- au cours des deux années d'imposition précédentes, lentreprise a externalisé la gestion des opérations courantes et la prise de décision sur des fonctions importantes à un tiers.
Indicateurs de substance minimale à des fins fiscales
Les entreprises remplissant les critères relatifs aux entreprises déclarantes devraient déclarer dans leur déclaration fiscale annuelle, pour chaque année d'imposition, si elles satisfont aux indicateurs de substance minimale suivants:
- lentreprise possède ses propres locaux dans lÉtat membre, dispose de locaux réservés à son usage exclusif ou de locaux quelle partage avec des entités du même groupe;
- lentreprise dispose dau moins un compte bancaire ou compte de monnaie électronique actif qui lui est propre dans lUnion pour la réception des revenus pertinents;
- un ou plusieurs administrateurs de lentreprise sont habilités à prendre des décisions en ce qui concerne les activités qui génèrent des revenus pertinents pour lentreprise ou en ce qui concerne les actifs de lentreprise;
- la majorité des salariés équivalents temps plein de lentreprise ont leur résidence habituelle au sens du règlement (CE) 593/2008 dans lÉtat membre de lentreprise ou sont à une distance telle dudit État membre quelle soit compatible avec le bon exercice de leurs fonctions.
Les entreprises devraient accompagner leur déclaration fiscale de pièces justificatives comprenant :
- une vue densemble de la structure de lentreprise et des entreprises associées et les éventuels accords dexternalisation significatifs, notamment la justification de la structure, décrits dans le contexte dun format standardisé;
- un rapport de synthèse des pièces justificatives présentées au titre du présent paragraphe, contenant en particulier: i) une brève description de la nature des activités de lentreprise; ii) le nombre de salariés employés en équivalent temps plein; iii) le montant du résultat avant et après imposition.
Renversement de la présomption
Les États membres devraient prendre des mesures pour permettre aux entreprises présumées être dépourvues de substance minimale de renverser cette présomption, sans retard indu ni surcoût administratif. À cette fin, les entreprises devraient fournir les preuves supplémentaires suivantes: i) un document permettant de vérifier la justification commerciale de la création de lentreprise dans lÉtat membre où lactivité est exercée; ii) des informations sur les profils des salariés à temps plein, à temps partiel et freelance tout en garantissant des niveaux élevés de protection des données et de la vie privée.
LÉtat membre devrait étudier une demande de renversement de la présomption dans un délai de neuf mois à compter de la présentation de la demande et celle-ci serait réputée acceptée en labsence de réponse de lÉtat membre après expiration de ce délai de neuf mois. Ceci sappliquerait également aux demandes dexemption des entreprises.
Lorsquun État membre estime quune entreprise a renversé de manière satisfaisante une présomption de manque de substance, il devrait pouvoir adopter une décision certifiant que lentreprise est dotée de substance minimale à des fins fiscales. Cette décision pourrait rester valable jusquà 5 ans à compter de la date dadoption de la décision.
Conséquences fiscales de labsence de substance minimale
Lorsquune entreprise est dépourvue de substance minimale à des fins fiscales dans lÉtat membre où elle a sa résidence fiscale, cet État membre devrait rejeter toute demande de certificat de résidence fiscale présentée par lentreprise en vue dune utilisation en dehors de la juridiction de cet État membre.
Lorsquil rejette une demande concernant un tel certificat, lÉtat membre devrait établir une déclaration officielle qui justifie cette décision et indique que lentreprise na pas droit aux avantages prévus dans les accords et les conventions prévoyant lélimination de la double imposition en matière dimpôts sur le revenu et, le cas échéant, sur la fortune, ou dans les accords internationaux qui ont un objet ou un effet similaire.
Pénalités
Les députés soulignent que les États membres doivent partager les informations pertinentes auxquelles ils ont accès, mettre en uvre des systèmes favorisant léchange desdites informations et, enfin, infliger les sanctions proposées aux entités non conformes.
Les pénalités devraient comporter i) une sanction pécuniaire administrative dau moins 2% des recettes de lentreprise au cours de lannée d'imposition concernée, si lentreprise qui est tenue deffectuer une déclaration ne respecte pas cette exigence pour une année d'imposition dans le délai prescrit, et ii) une sanction pécuniaire administrative dau moins 4% des recettes de lentreprise si lentreprise fait une fausse déclaration.
Demande de contrôle fiscal conjoint
Lorsque lautorité compétente dun État membre a des raisons de croire quune entreprise ayant sa résidence fiscale dans un autre État membre na pas respecté les obligations qui lui incombent en vertu de la directive, le premier État membre pourrait, en indiquant ces raisons, demander à lautorité compétente du second État membre de procéder à un contrôle fiscal conjoint de lentreprise. Si lautorité compétente requérante nest pas en mesure de procéder à un contrôle fiscal conjoint pour des raisons dordre juridique, lautorité compétente de lÉtat membre requis devrait engager un contrôle national dans un délai dun mois à compter de la date de réception de la demande.
Réexamen
Au plus tard cinq ans après la date de transposition de la directive, la Commission devrait présenter un rapport sur la mise en uvre et le fonctionnement de la directive. Le cas échéant, le rapport serait assorti dun réexamen en vue daccroître lefficacité de la directive et dune proposition législative modifiant la directive.
Le rapport devrait évaluer :
- limpact de la directive sur les recettes fiscales dans les États membres, sur les capacités de ladministration fiscale et, en particulier, la nécessité ou non de modifier la directive;
- sil serait approprié dajouter un indicateur de substance fondé sur le bénéfice avant impôts par salarié et détendre aux entreprises financières réglementées lobligation de déclaration des indicateurs de substance minimale à des fins fiscales et, le cas échéant, de réexaminer lexemption qui leur est accordée.